La révolution génétique ou le nouvel Eugénisme

Dans le contexte d’un monde social envahi par un consumérisme progressiste, ces idéologies d’hier, que l’on croyait en définitive à jamais éteintes, ressurgissent sous la forme d’un être bestial, revêtu d’un masque d’agneau ! C’est ainsi qu’avec les avancées des techniques de procréation médicalement assistée, et la possibilité de déceler sur l’embryon ou le fœtus, les anomalies génétiques, est évoqué le « retour de l’eugénisme », un eugénisme plus angélique, plus doux forcément !

Un texte de Eric LEMAITRE

avec les contributions de Jérôme SAINTON Docteur en Médecine et Claude BOUCTON

La révolution

génétique

ou le nouvel Eugénisme

 

L’Eugénisme, l’idéologie transhumaniste

auréolée aujourd’hui d’humanisme

L’eugénisme qui fut jadis une théorie scientifique visant à intervenir sur le patrimoine génétique de l’espèce humaine, engendra hier la pire monstruosité que connut l’humanité, avec la montée de l’idéologie Nazie. Pourtant l’idéologie eugéniste refait bel et bien surface, cette hydre que l’on croyait définitivement éteinte, s’est enveloppée d’un nouvel habit plus convenable, d’une apparence séante.

Ainsi les idéologies barbares combattues hier, continuent d’avancer dans les esprits de manière plus subtile, ce que certains ont qualifié de « monstre doux », nouveau spectre qui avance, masqué, auréolé d’humanisme, mais au demeurant terrifiant.

Ce monstre doux que décrivait Alexis d’Alexis de Tocqueville « un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. Il est absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance; il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages; que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre? ».

Dans le contexte d’un monde social envahi par un consumérisme progressiste, ces idéologies d’hier, que l’on croyait en définitive à jamais éteintes, ressurgissent sous la forme d’un être bestial, revêtu d’un masque d’agneau ! C’est ainsi qu’avec les avancées des techniques de procréation médicalement assistée, et la possibilité de déceler sur l’embryon ou le fœtus, les anomalies génétiques, est évoqué le « retour de l’eugénisme », un eugénisme plus angélique, plus acceptable forcément !

Si les pro GPA et PMA se défendent en dénonçant un pur fantasme, se moquant de l’accusation de pratiques qui ne s’éloignent pas des idéologies eugénistes, il importe que ces derniers reconnaissent que l’apparition et l’évolution de techniques de plus en plus sophistiquées, conduisent nécessairement à développer les pratiques eugéniques. Après les infanticides connus au cours de l’histoire, ou ceux qui épisodiquement sont relatés dans les actualités, l’interruption de grossesses ou le fœticide sélectif ont été largement prescrits après l’épisode de la tragédie de la Seconde Guerre mondiale. Le fœticide sélectif s’est imposé dans les esprits avec les nouvelles capacités techniques de diagnostic génétique (analyse chromosomique), ou morphologique (échographie), sur le fœtus. Enfin, comme le rapporte le biologiste Jacques Testart[1] « la conjonction de la fécondation hors du corps (1978) et de l’examen de l’ADN embryonnaire (1990) a permis de développer le diagnostic préimplantatoire (DPI) sur les embryons issus de la fécondation in vitro (FIV) depuis les années 1990 ».

Subrepticement, l’idée d’une sélection des êtres humains dès leur naissance, gagne les esprits. Lorsque l’expression de société eugéniste est utilisée, l’usage de ces mots suscite une opposition vive, targuant souvent ceux qui utilisent ces termes, de communiquer une pure invention, dénigrant le progrès ou s’opposant à toute forme d’égalité. Pourtant nous sommes bel et bien arrivés à une conception eugéniste de la société, lorsque notamment le dépistage est proposé aux femmes enceintes, pour détecter d’éventuelles anomalies, et proposer ainsi aux mères, l’interruption de leur grossesse. A ce jour, il importe de porter à la connaissance de chacun, que tous les fœtus trisomiques ont quasiment fait l’objet d’une interruption de grossesse. Ainsi au cours de ces dernières décennies, le dépistage de la trisomie 21 a connu un essor indéniable, avec un taux de couverture croissant de femmes enceintes demandant un diagnostic prénatal, ce qui a eu pour résultat, une très importante augmentation du nombre d’amniocentèses, une procédure médicale invasive utilisée lors du diagnostic prénatal.

Sur un plan sociologique, toutes les dernières enquêtes d’opinion révèlent que les femmes sondées reconnaissent qu’elles choisiraient d’éliminer un fœtus ayant été diagnostiqué comme trisomique. Or avec l’avènement d’une société orientée vers la performance, l’image de soi, c’est un monde profondément consumériste qui aspire dès lors à un bien-être idéalisé, et à un enfant idéal indemne de toute anomalie génétique.

La fragilité d’un enfant différent des autres, constituerait pour beaucoup, et dès lors, dans l’imaginaire social, une charge insurmontable pour les parents. Cette idée d’accueillir, puis d’accompagner, un enfant avec un handicap, devient, hélas et bien souvent, une idée intolérable. Cela en dit long sur les mutations sociales mortifères que nous vivons aujourd’hui dans ces contextes idéologiques, où les tenants d’un darwinisme social, ne rencontreraient plus à terme d’opposition. Dans un futur proche nous pourrions ainsi accepter « la sélection des plus aptes ».

Implicitement, avec les progrès de la techno science, les avancées techniques conduiront certainement à un déplacement de la dimension de l’accueil et du don de l’enfant, vers une notion de désir d’enfant et d’un désir choisissant ce que devra être cet enfant, répondant ainsi parfaitement aux normes et conventions sociales. Cette dimension que nous décrivons est bien souvent objectée, or l’empreinte consumériste progresse dans les mentalités au fur et à mesure que les conceptions matérialistes de la vie avancent, de fait l’idée de choisir un embryon sain peut conduire demain au choix d’un embryon ne présentant certes aucune anomalie mais dont le désir est aussi qu’il soit doté de caractères répondant aux désirs des parents si l’offre médicale le permet. Rappelons qu’en France la loi bioéthique encadre rigoureusement à ce jour les pratiques génétiques, le diagnostic préimplantatoire est ainsi autorisé quand l’un des parents peut transmettre une maladie génétique grave. Nonobstant rien interdit d’imaginer,  un futur plus laxiste moins préventif et passant par-dessus les lois morales.

L’eugénisme dans l’histoire

Le mot Eugénisme, est inévitablement associé à l’idéologie Nazie, qui fut à son paroxysme, l’expression d’une idéologie foncièrement anti humaine. Pourtant, l’eugénisme, qui signifie littéralement, bien naître, s’est défini au fil du temps, à la fois comme une méthode et comme une pratique visant à surpasser le patrimoine génétique initial de l’espèce humaine. La pensée eugéniste est pourtant très ancienne, il faut remonter à plusieurs millénaires, à l’époque où Pharaon entendait organiser le meurtre des enfants hébreux mâles, afin d’éviter que les Hébreux ne deviennent trop nombreux[2]. La Grèce Antique fut le témoin de l’élimination des enfants faibles, qui ne pouvaient que constituer une charge pour la société. A Sparte, ancienne ville du Péloponnèse, les anciens examinaient les aptitudes de l’enfant nouveau-né, et s’ils estimaient que l’enfant fût trop faible, vulnérable, ils le faisaient jeter dans un gouffre appelé « les Aphotètes ». Un enfant chétif, selon la conception et l’idéologie répandue à Sparte, ne devait pas à cette époque, être une charge pour la cité.

Il n’est pas contestable que le christianisme a combattu au sein de la société, une forme de rejet du plus fragile, et que de fait, l’Évangile constituât une forme de rempart à toute tentative de rejet du plus faible. Mais au cours du XIXe siècle, l’idée de laisser faire une sélection naturelle au sein de la société, gagna les esprits. Albert Spencer, sociologue et philosophe anglais, défendit en effet une forme de philosophie évolutionniste, il fut très tôt identifié comme l’un des principaux défenseurs de la théorie de l’évolution au XIXe siècle, avec Charles Darwin. Sociologue, Spencer conçut la société comme un ensemble, une organisation qui sélectionne naturellement les plus aptes, il est par ailleurs l’auteur même de cette expression « Sélection des plus aptes ».

L’eugénisme est une approche idéologique, qui fut développée par Francis Galton, un cousin de Charles Darwin. L’un et l’autre, ont tenu des thèses, qui en leur temps ont bousculé les conceptions, qui étaient jusqu’à présent, associées au monde du vivant.  Charles Darwin entendait donner une explication théorique de l’hérédité des caractères acquis par les espèces, et concluait à l’évolution naturelle des espèces. Francis Galton anthropologue, pionnier de la biométrie, et brillant statisticien, souligne le rôle primordial et prédictif des facteurs héréditaires, jouant un rôle corrélatif dans la détermination des différences individuelles. Francis Galton promouvait les concepts de race inférieure et supérieure, même s’il fallait recontextualiser les positions idéologiques de l’anthropologue, il convient cependant de souligner que Galton fera valoir l’hérédité des qualités intellectuelles et des qualités physiques, ceci lui donnant à penser, selon Dominique Aubert-Marson[3] Biologiste et chercheur, « que l’appartenance à une « race douée » (nature) joue un rôle majeur, l’environnement (nurture) jouant un rôle mineur… »

Etrange destin de deux hommes et de même parenté, Charles DARWIN et Francis Galton dont les idéologies furent finalement assez proches, l’un défendant la sélection naturelle, et l’autre la sélection sociale.

Relativement à l’analyse sociale, Galton eut recours à la courbe de Gauss pour classer les individus et repérer non pas « l’homme moyen », mais « l’homme génial », puisque c’est ce dernier qui évolue vers l’être parfait, la visée nécessaire de sa politique eugéniste. Nous comprenons mieux, comment une telle thèse mortifère a ainsi influencé des conceptions idéologiques dévastatrices, et marqué indélébilement le XXème d’une noirceur à la fois ineffaçable, et d’une odeur nauséabonde.

Le génie génétique

au service du nouvel eugénisme

Dans la période contemporaine, les progrès du génie génétique et le développement des techniques de procréation médicalement assistée, ont ouvert de nouvelles perspectives et possibilités médicales.  Avec le transhumanisme, s’ouvrent littéralement de nouveaux enjeux.

En effet, les transhumanistes accréditent l’idée, que le génome humain n’est finalement que le reflet d’une forme de programmation. Certes le génome est immensément complexe, mais la technoscience s’est employée à le décoder, à le manipuler, à le décrypter. Reprogrammer l’humain, ne relève plus, dès lors, d’une idée insolite ou biscornue. Concevoir des programmes génétiques, tels ces tests de programmation génétique du cerveau, sont, bel et bien, des tentatives menées dans les laboratoires du vivant. C’est dans ce contexte que les ingénieurs biologiques du Massachusetts Institute of Technology, ont en effet, créé un langage de programmation, qui leur permet d’appréhender, puis, de concevoir rapidement des circuits complexes ; l’ADN codé donnant ainsi de nouvelles fonctions pour les cellules vivantes. Que ne laisserait entrevoir de telles recherches, visant demain à doper artificiellement des hommes, voir les corriger, même avec des visées humanistes ! Si l’on commence ainsi, à réparer les dysfonctionnements du cerveau et guérir les anomalies, n’adviendra-t-il pas le temps de rechercher à idéaliser l’être humain, et anticiper le temps de l’homme augmenté et « performé », un nouveau type d’humain, un sur homme amélioré par le génie génétique.

Mais comme le souligne à nouveau Jacques Testart « c’est surtout la préoccupation de qualité du produit-enfant qui anime désormais la fabrique de l’humain. Outre les méthodes sélectives (choix d’un tiers géniteur, sélection d’un embryon), l’Aide Médicale à la Procréation vise à proposer l’amélioration de l’embryon, et des praticiens s’emballent de projets eugéniques quand la technologie prétend disposer d’outils efficaces et précis pour modifier le génome ».

De la sorte, le projet de conquête absurde et qui touche au génome humain ne semble plus avoir de limites, subséquemment la fécondation de bébés issus de plusieurs parents[4], pour obtenir un bébé « génétiquement parfait » n’est plus si improbable, le premier bébé, résultat d’une manipulation du génome de trois parents, est né au Mexique, l’enfant est en effet né de la manipulation de l’ADN de trois parents. Il s’agissait de transférer des matériaux génétiques du noyau pour éviter que la mère ne transmette à son enfant des gènes défectueux responsables du syndrome de Leigh « de transmission maternelle », une maladie neurologique progressive caractérisée par des lésions neuropathologiques.

La Grande-Bretagne était devenue le premier pays au monde à autoriser la conception d’enfants « à trois parents ». La technique imaginée par Doug Turnbull, de l’université de Newcastle, au Royaume-Uni, et dénommée « transfert pronucléaire » (PNT), consiste à prélever le noyau de l’ovule de la mère contenant des mitochondries défaillantes. L’ovocyte est ensuite fécondé avec le sperme du père, puis le noyau de l’œuf est transféré dans l’ovule énucléé de la donneuse.

Or pour le professeur Royère, le directeur procréation, génétique et embryologie humaine à l’Agence de la biomédecine en France, « Le risque est que la manipulation induise chez l’embryon de nouvelles pathologies ou anomalies, alors qu’on cherchait au contraire à obtenir un bébé sain ».

Les avancées sournoises du transhumanisme

Les avancées du transhumanisme sont sournoises, subtiles comme nous l’écrivions précédemment, le nouvel eugénisme, empreinte un nouveau langage, teinté d’humanisme et de progressisme, et qui dans l’air du temps, passe beaucoup mieux, nous faisant ainsi passer pour des ringards, des conservateurs surannés, ne comprenant rien à l’avènement du progrès.

Or ce nouvel Eugénisme revêtu, des habits du transhumanisme, progresse du fait, à la fois de notre désertion, de l’abandon des valeurs morales, et de la défection de l’éthique, que l’on nous défend de promouvoir, sans être taxé de défenseur de l’inégalité.

Ainsi, qu’est-ce qu’aujourd’hui le Conseil Consultatif National d’Éthique, sinon des hommes et des femmes, dont la plupart ne sont plus habités par la dimension du spirituel, qui apporte la raison à la conscience, « la conscience, à la science ».

Jérôme Sainton Docteur en Médecine évoquait dans un mémoire de fin d’étude en Bioéthique, l’Éthique de la mise en œuvre[5] et non du fond, la bioéthique a dans ce nouveau contexte sociétal pour fonction de compenser la réalité, de mettre des mots sur des pratiques, afin de nous convaincre que c’est bien l’homme qui fixe les règles. Elle a donc in fine pour objectif de familiariser, « d’habituer les gens aux développements technologiques pour les amener à désirer bientôt ce dont ils ont peur aujourd’hui. […] Le Comité National d’Éthique est d’abord un comité de bienveillance de l’essor technoscientifique. Certaines technologies seraient très mal acceptées aujourd’hui, mais si, dans quinze ou vingt ans, elles sont bien acceptées, ce sera en partie grâce aux comités d’éthique, qui auront dit : “il faut développer la recherche, il faut faire attention, il faut attendre un peu, il faut un moratoire…” toutes sortes de propositions qui n’ont rien à voir avec un interdit et qui permettent de s’accoutumer à l’idée. » (J Testart, en collaboration avec Christian Godin, Au bazar du vivant : biologie, médecine et bioéthique sous la coupe libérale, Seuil (points virgule), Paris, 2001, p.132-133). Ainsi la bioéthique a pour finalité d’adapter l’homme au système technicien : c’est elle qui assure la transition entre les anciennes et les nouvelles valeurs.

Le monde, habité par des désirs prométhéens, installe ainsi, et au fil de son histoire, une technicité qui réduira l’humain au rang de machines, puisque notre génome en est réduit à n’être qu’un logiciel programmable à souhait. En écrivant ces lignes, résonne en moi ces mots de l’écologie humaine, « Prendre soin de l’homme, de tout l’homme » qui est l’antithèse de l’homme modifié ou augmenté, l’antithèse d’un transhumanisme qui aliène la dimension ontologique de l’homme, l’essence même d’une finitude qui ne trouve sa grandeur qu’en son créateur.

[1] Jacques Testart Biologiste français qui a permis la naissance du premier bébé éprouvette en France en 1982.

[2] Le récit est rapporté dans le livre d’Exode chapitre 1.

[3] Dominique Aubert-Marson Maître de conférences, Laboratoire de biologie du développement et de la différenciation neuromusculaire, Université Paris Descartes

[4]http://www.rtl.be/info/magazine/science-nature/un-bebe-issu-de-trois-parents-biologiques-differents-voit-le-jour-grace-a-une-methode-controversee-854463.aspx

[5] Nous reprenons ici l’intégralité du texte de Jérôme Sainton, extrait de son mémoire de Bioéthique, Jérôme Sainton est Docteur en médecine.

« Le transhumanisme n’est qu’un eugénisme relooké »

Revue de presse, extrait du blog Usbek & Rica

« Le transhumanisme est un eugénisme mou, consensuel  et démocratique. Dans l’inconscient collectif, le terme « eugénisme » renvoie sans cesse – par méconnaissance historique – aux nazis. C’est une erreur : il s’agit d’une logique de sélection pour  « l’augmentation » de l’espèce et c’est l’essence même du transhumanisme, qui n’est qu’un eugénisme relooké. Je dis « mou », « consensuel » et « démocratique » car c’est sans violence apparente et ça se passe avec notre consentement, et même à notre demande.  En 1974 sont apparues les premières banques de sperme : les CECOS (Centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain, Ndlr). On y parla bientôt « d’appariement de couples reproducteurs », une formule qui aurait dû nous alerter. »

Lire la suite de l’article https://usbeketrica.com/article/le-transhumanisme-est-un-eugenisme-relooke

Etats généraux de la bioéthique : « besoin d’humanité » et rejet du transhumanisme

Tout ce qui est possible techniquement est-il souhaitable ? Génétique, procréation, robotique, fin de vie… En termes de santé et de médecine, les questions éthiques sont nombreuses. Elles ont fait l’objet d’une consultation citoyenne du 18 janvier au 30 avril dans le cadre des États généraux de la bioéthique, qui précèdent la révision à venir de les lois de bioéthique.

Lire la suite sur le blog :

https://usbeketrica.com/article/etats-generaux-bioethique-des-citoyens-pour-plus-d-humain-et-pas-de-transhumain

Perpetua, ou les pièges du débat actuel sur la place des femmes

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Un texte à lire sur le blog de Phileo Sophia écrit par un ami Etienne Omnés…

Phileo-sophia

Moi – « C’est vrai que la place des femmes n’a pas toujours été d’être devant la vaisselle et enfermée à l’intérieur. Ca a beaucoup varié selon les époques. Je lisais le martyr de Perpetua de Tertullien il n’y a pas longtemps, et j’ai été frappé par l’opinion extrêmement positive que Tertullien le mysogyne a de Perpetua la chrétienne: dans cette histoire les hommes ont un mauvais rôle, entre le père qui veut lui faire trahir Jésus et son frère qui pleurniche… et elle est magnifiquement décrite. »

L’autre (perplexe) – Oui mais… elle meurt à la fin. »

A ce moment-là, c’est moi qui me suis retrouvé perplexe. Mais bien sûr qu’elle meurt à la fin! C’est même sa plus grande gloire et son plus grand achèvement. C’est la culmination du positif dans le récit de Perpetua. Elle donne sa vie pour son Maître, comme les généraux romains qui sacrifient leur vie…

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Les idéologues du genre et leurs lectures déconstructives du monde social

Il convient de prendre conscience que la notion idéologique de genre est aujourd’hui appréhendée au-delà de la réalité biologique, ce qui fait débat aujourd’hui !  Cette déconnexion du genre masculin, féminin est la résultante d’une réflexion qui puise sa source  dans toute une littérature française, Jacques Dérida, Foucault puis Judith Butler. Judith Butller ira encore plus loin dans la réflexion notamment dans son essai qui l’a fit connaitre Trouble dans le genre paru en 1990…

C’est cette idéologie autour des études du genre, et donc la construction sociale qui en découle selon ses partisans , qui assigne de façon quasi exclusive un sens aux différences sexuelles …

Donc effectivement déconnecter totalement l’identité de la part biologique nous conduit à une forme de conception extrême, voire à une confusion des genres, en fait c’est nous conduire à refuser l’altérité y compris dans nos regards. C’est un déni de différences ou de la différence … 

Quand nous faisons usage du terme idéologie ce n’est pas dans un sens péjoratif, le mot idéologie est ici utilisé pour indiquer comment une conception du monde se construit. L’idéologie est adossée à une série d’idées à des fins de structurer une représentation du monde. Il est vrai que la notion d’idéologie a dérivé en connotation péjorative, mais ce n’est pas le sens de mon propos, lorsque j’emploie le terme. Le terme idéologie (littéralement science des idées, un terme qui avait été utilisé lors de la révolution française par le philosophe et général Antoine Destutt de Tracy) était ainsi employé par Condorcet pour désigner l’apport des sciences au progrès de l’esprit humain. Donc pour revenir aux études du genre, nous pouvons ici indiquer qu’un certain nombre d’auteurs ont conceptualisé, structurer, construit une représentation argumentée et étayée du monde, parmi ces auteurs, j’en citerai au moins deux … Joan Wallach.Scott et Judith BUTLER.

Dans un contexte d’emploi du concept genre, plusieurs universitaires américains se nourrissent alors, à partir de années 1980 en particulier, de ce qu’on appelle alors aux États-Unis la « French Theory », c’est-à-dire notamment les travaux de Jacques Derrida, Michel Foucault, Jacques Lacan, Roland Barthes.

La lute des sexes la vision marxiste des idéologues du genre

L’historienne Joan Wallach. Scott qui travaillait depuis les années 1970 sur l’histoire des femmes, a contextualisé sa lecture du monde social et l’histoire de la femme dans une perspective marxiste. L’historienne rapporte la vie de la femme dans le récit humain et ses successions générationnelles comme une lutte de classe.

Pour rappel la perspective marxiste est l’évocation d’une dialectique se focalisant sur la lutte sociale des classes du maitre à l’esclave, de la plèbe et des propriétaires, des gueux et de la noblesse, en un mot des oppresseurs et des opprimés.

Pour revenir à Joan Wallach.Scott, l’historienne questionne en 1988 dans son essai Gender and the Politics of History l’approche patriarcale et masculiniste de l’histoire et reproche notamment à certains auteurs marxistes de considérer la culture de classe comme universelle sans prendre en compte la dimension de la domination masculine.

Ainsi Joan Wallach.Scott souligne la division sexuée du travail qui maintient les femmes dans une position subalterne, de dominée dans la société, et ce, en dépit de leur accès au salariat. Cette division sexuée se trouve éclairée par l’articulation entre sphère économique et sphère familiale. Les auteures portent ainsi une attention soutenue aux facettes multiples de la travailleuse qui est aussi épouse, mère ou encore soutien de la vie familiale. Ces identités imbriquées, convergeant dans la soumission des femmes à la cellule familiale, expliquent que leurs pratiques économiques soient également subordonnées aux besoins de cette dernière.

Pour Joan W.Scott , il ne s’agit plus en effet de simplement décrire l’histoire des femmes mais de mettre en lumière les rapports de genre jusque-là cachés qui définissent l’organisation des sociétés, en fait au-delà d’une lecture réductrice de lutte des classes. Une idéologie funeste, une forme de lutte marxiste des sexes se dessine dont l’aboutissement ou la fin de cette lutte pourrait bien être de sortir de l’animalité sexuée ou autrement dit de l’hétérosexualité mettant ainsi fin finalement à des rapports de hiérarchisation et de domination.

Le rapport au sexe vu comme une construction seulement sociale

Il convient de prendre conscience que la notion idéologique de genre aujourd’hui est appréhendée au-delà de la réalité biologique, ce qui fait débat aujourd’hui !  Cette déconnexion du genre masculin, féminin est la résultante d’une réflexion qui puise sa source  dans toute une littérature française, Jacques Dérida, Foucault puis Judith Butler. Judith Butler ira notamment encore plus loin dans la réflexion notamment dans son essai qui l’a fit connaitre Trouble dans le genre paru en 1990…

pour Judith Butler, c’est le genre qui construit le sexe : je résume en deux mots sa pensée autrement plus étayée, s’il existe selon elles des différences biologiques, elles ne sont pas en elles-mêmes significatives.

C’est cette idéologie autour du genre, et donc la construction sociale qui en découle selon ses partisans , qui assigne de façon quasi exclusive un sens aux différences sexuelles …

Donc effectivement déconnecter totalement l’identité de la part biologique nous conduit à une forme de conception extrême, voire à une confusion des genres, en fait c’est nous conduire à refuser l’altérité y compris dans nos regards. C’est un déni de différences ou de la différence …

La radicalité idéologique 

L’autre idéologie montante et qui dépasse les débats autour des études du genre, c’est l’idéologie Queer.

Queer est au départ une insulte nord-américaine, qui vient nommer l’autre dans son étrangeté, sa bizarrerie, son anomalie, son excentricité…

En effet des groupes de lesbiennes, composés de chicanas (latinos), de chômeuses et n’appartenant pas au monde homosexuel nord-américain intégré (par sa lutte) dès les années 1970-1980, ont fait de cette insulte un étendard et se sont autoproclamées « queers » pour marquer leur volonté de non-intégration dans la société marchant au pas de la norme hétérosexuelle, blanche et middle class

L’approche Queer refuse ainsi l’enfermement de ces nouveaux sujets dans de nouvelles prisons identitaires qui pourraient perdurer dans le temps.

Le cœur du « queer », c’est la déconstruction du sexe, du genre, et partant du corps et de la jouissance sexuelle tels que l’un et l’autre sont normalisés.  Le genre (l’identité sexuelle) est fondée sur le binaire masculin/féminin, Pour les tenants de l’idéologie queer ces modalités sont de pures fictions, ces modalités résultent de constructions d’un discours dominant marqué une vision hétérosexuelle. Le sujet lui-même est fictif et il s’agira de détruire tout essentialisme déclaré ou caché dans les modes de la pensée. Il s’agit même d’un combat idéologique et revendiqué contre l’hétérosexualité, une manière de pointer l’animalité du rapport hétérosexuel…

La nature façonne-t-elle ce que nous sommes ?

Selon nous il y a dans toute construction une part de culture et une part de nature. La nature façonne aussi ce que nous sommes intrinsèquement. Si à nouveau nous revenons à la dimension de la couleur, la couleur lumineuse réfléchit la lumière, la couleur sombre l’absorbe. C’est bien une réalité au-delà de la perception cognitive et symbolique associée aux couleurs, dont nous comprenons aussi que les évocations associées divergent dans les contextes ou ces couleurs sont diffusées.

Là et nous pouvons tous objectivement le comprendre on est plus tout à fait dans le domaine des études sur le genre, nous n’entrons plus dans l’observation et l’analyse des comportements, ici Judith Butler tire une conclusion en regard de convictions affichées et revendiquées. Judith Butler s’inscrit dans une posture idéologique étayée, argumentée et assumée. Chacun est ici libre d’adhérer ou de ne pas adhérer à ce concept de genre qu’elle développe souvent avec brio.

Revenons si vous voulez bien à Judith BUTLER l’essai qui la fit connaitre est Gender Trouble, paru en anglais pour la première fois en 1990, c’est le livre dans lequel Judith Butler expose sa conception du genre. Son essai je l’avoue est parfois complexe et je reconnais toute ma difficulté à saisir les subtilités de ses analyses… C’est un vrai défi d’appréhender  sa pensée complexe, j’oserais écrire tourmentée, « la fécondité de sa pensée, d’autres plus critiques ont évoqué une logorrhée » ….

Par exemple Judith BUTLER entreprend dans son ouvrage de faire sauter le verrou de la ‘naturalité’ du sexe par rapport au genre. En abordant la sexualité dans d’autres termes que ceux de l’alternative domination/pro-sexe.

« Soyons féministes, non parce que nous sommes des femmes, mais parce que nous contestons les fondements de cette catégorie qui nous enferme, et au titre de laquelle nous sont imposées des normes oppressantes »

Butler réinterprète Simone de Beauvoir, « On ne naît pas femme, on le devient » ; pour Monique Wittig, idéologiquement très proche de Judith BUTLER, « Les lesbiennes ne sont pas des femmes » OU « Ce sexe qui n’en est pas un ». Judith BUTLER entend se démarquer du « système sexe-genre : pour Judith BUTLER il n’y a point de ‘nature’ antérieure à la construction sociale du genre ; le sexe, comme le genre, est une catégorie construite par le discours QUI FAIT advenir mais qui ne restitue pas un fait (la performativité) ; en d’autres termes : le sexe, c’est aussi (ou déjà) du genre.

Chez Judith Butler la contestation de la norme sexuelle s’explique par le fait que l’hétérosexualité serait selon elle le produit d’un conditionnement culturel qui nous imposerait dès le plus jeune âge le désir de l’autre sexe, d’où la structure parodique du genre puisque nous ne ferions que mimer un rôle que la société nous impose, et que nous serions tous des travestis

L’autre point abordée par Judith BUTLER porte sur le désir … Le désir selon elle n’étant pas un donné de la nature…

Le désir est SELON Judith BUTLER structuré par la relation et relève d’un rapport AU culturel. Or l’altérité n’est pas niée dans le désir homosexuel, elle est symboliquement intériorisée.

L’altérité est donc constitutive du désir. Or Butler ne voit pas que le désir est irréductible à la pulsion, qui est certes une construction psycho-affective irréductible à la pulsion sexuelle animale, mais dont l’objet est indéterminé. L’objet du désir authentique, lui, n’est pas indéterminé, puisqu’il est suscité par le mystère de la différence et de l’altérité, ce que montre très bien un philosophe comme Levinas.

Gender un changement de paradigme, l’analyse des contextes…

Le genre un changement de paradigme

La société postmoderne (occidentale) est marquée par l’éviction de la transcendance, cette éviction du référentiel autour d’un rapport à la transcendance a un effet accélérateur sur la promotion d’une déconstruction des stéréotypes, sur la promotion parallèlement de nouvelles conceptions sociales autour de nouveaux modèles pensant aujourd’hui la modernité : le transhumanisme et le genre.

Le genre, qui dans ses extrêmes COMME l’idéologie Queer prône la plasticité de l’identité sexuelle, son interchangeabilité, conduit à une forme de confusion, de tohu-bohu des repères jusqu’alors normés construit au fil de l’histoire sexuée Hommes et Femmes dans leurs rôles, leurs complémentarités et leurs singularités.

Cette déconstruction n’est pas selon nous, la résultante d’une doctrine savamment orchestrée qui nous serait imposée ; elle est en réalité l’émanation de plusieurs constats, constats qui ont certainement façonné une nouvelle anthropologie et une idéologie qui participent de cette déconstruction. Quels sont alors ces constats ?

  • L’uniformisation
  • L’égalitarisme
  • La liberté d’être indéterminée
  • Le relativisme
  • L’obsession de rester libres
  • Le consumérisme des biens à celui de la marchandisation des corps
  • La désincarnation du réel (la déprise sociale, la relation non incarnée)
  • L’éviction de la transcendance
  • La disparition de la figure de la mère
  • La disparition de la figure du Père

L’uniformisation.

La mondialisation est un processus économique d’universalisation des échanges s’est accompagnée d’une uniformisation des modes de consommation, des comportements culturels. Les métissages, les brassages qui sont en soi positifs et sont source de fécondité ont aussi subi la dictature d’un modèle de consommation qui au fil de matraquages promotionnels, publicitaires, fabriquent nos perceptions et représentations, conditionnant des attitudes, des pratiques de consommation.

Cette uniformisation devient plus visible aujourd’hui et par capillarité façonne subrepticement, inexorablement le monde.

Ce processus envahit toutes les sphères de la consommation et toutes les dimensions sociales, culturelles de notre monde.

Avec cette uniformisation qui gagne le monde, il n’est pas étonnant que la lecture de la culture devienne alors plus globale, moins signifiante… Au fond il est à craindre à terme que l’indifférenciation ne fabrique que des miroirs de semblables, que l’altérité ne fasse plus sens.

Une forme de conformisme social à laquelle participe la mondialisation, se dessine, glissant vers un narcissisme individuel, la volonté d’une promotion de l’individu, de son image.  Dans cette culture consumériste, ou l’on vante l’individu, il faut vanter la prévalence du conformisme, de la performance et effacer la différence. En me conformant à des modèles de consommation, lissés   je ne rencontre plus l’autre dans sa singularité. Comme le rappelle mon ami Alain LEDAIN et co-auteur de notre livre « Masculin-Féminin faut-il choisir ? », s’inspirant de l’écrivain Philosophe Emmanuel Mounier « Aucune communauté (nationale, associative, ecclésiale…) n’est possible dans un monde où il n’y a plus de prochain mais seulement des semblables qui ne se regardent pas. Chacun y vit dans une solitude et ignore la présence de l’autre : au plus appelle-t-il « ses amis » quelques doubles de lui-même, en qui il puisse se satisfaire et se rassurer. […]

Dans ce processus de lissage, d’uniformisation qui n’est pas nouveau, nous passons comme le décrit le livre de la Genèse (premier livre de La Bible) du monde de Babel (la fameuse tour), une seule langue, une seule ville, un seul type de matériau (la brique) à celui de Babylone le monde uniforme des marchands de bonheur qui atomise, formate ou pire lobotomise les esprits en fabriquant les illusions d’un paradis artificiel.

Pour François Xavier Bellamy « l’uniformisation nous laisse imaginer que si tout est partout identique, notre liberté n’aurait plus alors de frontières », notre marche, nos déplacements ne seraient plus alors entravés, à rebours de l’image d’un monde fait de reliefs et de défis à relever, où la rencontre avec le prochain, et non son semblable, donne de la saveur aux rencontres.

Quels que soient les convictions qui sont les nôtres, nos sensibilités culturelles, sociales, religieuses, politiques, etc. prenons conscience qu’il y a une forme d’emprise mondialiste, une forme d’universalisme d’un prêt-à-penser, d’un prêt à consommer aseptisé, qui nivelle les différences culturelles, lisse et codifie les comportements…

L’égalitarisme

L’égalitarisme, ce souci prégnant hier, de réparer les injustices, aujourd’hui de corriger ce que la nature a fait.

L’égalitarisme qui finit par dissoudre les cultures, arase les singularités, gomme les spécificités des identités qui caractérisent les êtres humains, jusqu’à nous dire finalement que la femme c’est n’importe quel homme. L’égalitarisme efface toute idée de l’autre dans sa dimension d’altérité et nous conduit à ce troisième constat…

La liberté d’être indéterminé

La Liberté d’être indéterminé (une vision ASEXUEE) est à rebours de l’altérité (vision sexuée). L’altérité qui est la condition de tout émerveillement.

Or pour François Xavier BELLAMY que je cite à nouveau « L’altérité est la condition de tout émerveillement, il faut donc que tout ne soit pas identique pour que mon attention, trouve de quoi s’étonner La liberté d’être indéterminée est le fantasme de notre civilisation d’aujourd’hui« . C’est cette liberté d’indétermination qui va influer toute une conception de l’homme et sur laquelle s’articule le socle de l’idéologie Queer.

Le relativisme

Pour les relativistes « il n’existe aucune vérité absolue ». Le relativisme c’est appeler bien ce qui est mal, et mal ce qui est bien, c’est confondre comme les hommes de Ninive au temps de Jonas, la droite de sa gauche.

On peut même à l’instar de Benoît XVI évoquer « une dictature du relativisme qui ne reconnaît rien comme définitif et qui donne comme mesure ultime uniquement son propre ego et ses désirs. »

L’obsession de rester libre emmurée dans le monde virtuel

A cette liberté d’indétermination de l’être humain, je relève une autre problématique : celle qui touche la dimension de toutes nos relations … Notre obsession de rester libre … Cette obsession de liberté finit paradoxalement par nous murer (sur nos tablettes numériques), nous évitant alors d’entrer dans la relation incarnée…

Nous vivons, je crois, une immense bizarrerie : notre monde court vers l’indifférenciation, l’uniformisation qui gomme les frontières mais atomise les relations, les solidarités, la rencontre du prochain (le syndrome de Babel, rassemblons-nous dans la même ville ou le même continent virtuel). Dans ce continent virtuel, nous sommes comme alors tentés de nous enfermer dans nos univers, à ne plus incarner une relation réelle, dans un monde réel qui est caractérisé par la rencontre du prochain, dans un face à face fécond…

Sixième constat : Du consumérisme à la marchandisation du corps humain

Nous l’observons, nous dérapons vers une société où le tout consumérisme dicte et soumet la nature à des impératifs économiques.

Ce dérapage de la dictature économique, nous en avons eu la récente illustration à travers la proposition de deux sociétés du numérique d’encourager leurs employées de congeler leurs ovocytes Google, Apple. J’imagine que beaucoup parmi vous ont pu être choqués par ce glissement de nos sociétés consuméristes vers la marchandisation de l’être humain. Alors que file l’horloge biologique, Google Facebook et Apple pourraient ainsi subventionner demain la congélation des cellules reproductrices de leurs employées, afin de rendre ces femmes finalement corvéables à leurs métier et leur permettre de faire carrière.

Or c’est une boîte de pandore qui s’ouvre une nouvelle fois vers la commercialisation possible des ovocytes humains, en incitant les mères à le devenir le plus tard possible pour ne pas interrompre la belle carrière qui leur est promise et ce au nom de l’égalité femmes/hommes.

la déprise sociale, le repli sur soi, la désincarnation du lien social.

Etranges, n’est-ce pas justement ces mondes de la consommation qui nous poussent à une forme de déprise sociale, à nous replier sur nous-mêmes en nous rendant addictifs d’une société de consommation de plus en plus éthérée et de plus en plus virtuelle.

Nous vivons dans un monde désincarné où les rapports entre individus se dématérialisent : Nous prenons l’habitude de communiquer via les SMS, les réseaux sociaux (Facebook, Twitter…)  Parallèlement, nous perdons le contact avec la nature. En fait, nous sommes dans une époque de grand mépris pour les corps et l’homme se donne bien souvent des projets qui dénient le réel. Il convient pourtant de se réconcilier avec lui.  La vraie culture doit ancrer l’homme dans la réalité et l’amener à fuir l’« hyper-connexion » et « l’hyper-virtualité » qui fatiguent les esprits. »

Nous entrons finalement dans un univers social désincarné, dont le projet social funeste est de nous libérer des stéréotypes culturels, une société qui s’ouvrira inévitablement à un technicisme et à la technologie numérique appuyé par des idéologies qui croient nous affranchir des contingences de la nature.

Dans ces contextes d’une société éloignée du réel, Jacques ATTALI fait valoir que nous nous séparerons à terme de la procréation. Nous entrons selon l’essayiste dans l’apologie de la liberté individuelle.

Toujours pour Jacques Attali, « nous allons inexorablement vers une humanité unisexe, sinon qu’une moitié aura des ovocytes et l’autre des spermatozoïdes, qu’ils mettront en commun pour faire naître des enfants, seul ou à plusieurs, sans relation physique, et sans même que nul ne les porte. Sans même que nul ne les conçoive si on se laisse aller au vertige du clonage ». Ce n’est ni plus ni moins que « le meilleur des mondes » décrit par Aldous Huxley.

L’éviction de la transcendance

Ce dernier constat est la négation de la transcendance, la promotion d’une religion laïciste,  « l’homme devient la mesure de toutes choses, plus rien ne peut mesurer l’homme… » ? L’homme débarrassé de toute idée et toute référence à un Créateur auquel il aurait à rendre compte.

Au nom d’une idéologie égalitariste, nous passons d’une conception anthropologique d’un homme et d’une femme semblables, différents mais aussi complémentaires vers une forme de société postmoderne transhumaniste qui veut réparer la conception sexuée. Accomplir enfin le fantasme de l’humanité qui non seulement prétend à l’indétermination mais aspire à se libérer de toutes les contingences imposées par la nature.

Pour conclure notre propos et rappelé par l’un de mes amis philosophe, citons ici le mythe de l’androgyne dans Le Banquet de Platon, mythe d’une humanité autosuffisante et rebelle que Zeus a puni en séparant les êtres humains originels en deux, pour diminuer leurs forces concurrençant celle des dieux. Nier la sexualité revient à nier sa propre insuffisance et rêver d’autosuffisance sur la base d’une liberté toute puissante en apparence, mais en réalité, impuissante parce que fantasmée et faisant l’économie du réel qu’elle nie plutôt que de s’y confronter. Se confronter au réel, c’est se confronter à ses propres limites, à ses propres insuffisances.

L’égalité forcenée qui conduit à « la perte du pouvoir maternel ».

La révolution anthropologique s’inscrit dans une réinvention de la nature et dans ce projet d’ectogenèse, concerne l’identité même de la femme, « la perte du pouvoir maternel » comme l’écrit Laetitia Pouliquen (Auteur du livre, Femme 2.0, Féminisme et transhumanisme, quel avenir pour la femme). Nous sommes dans des contextes d’évolution générale de la société où la femme d’une manière générale est incitée à devenir un homme comme les autres.

Les changements en cours, et notamment transhumanistes, peuvent s’associer à une évolution des marqueurs identitaires, et engager un réajustement des équilibres biologiques, des différences entre l’homme et la femme.

Ainsi le monde scientiste, numérique, le cyborg dans lequel nous avons basculé, est de nature à muter le rapport au mystère et à l’altérité en offrant à la femme de nouvelles perspectives, en la faisant évoluer dans une nouvelle dimension de transmutation, une nouvelle expérience de la matière autorisant la fécondation hors de l’utérus féminin.

Avec ce projet de fécondation hors de l’utérus féminin, il ne s’agit ni plus ni moins que :

de modifier le corps de la femme

de prôner la liberté morphologique, de rendre la liberté à son corps,

de dépasser pour les transhumanistes, les mythes biologiques,

d’enjamber les barrières biologiques de manière radicale,

de donner enfin la possibilité à la femme de vivre une vie débarrassée des contraintes sociales

L’appareil génital destiné à porter un enfant est finalement vu dans l’idéologie cyborg et chez les transhumanistes comme une forme d’assujettissement qui ne permet pas à la femme de vivre pleinement son projet social.

Cette idéologie de l’égalité absolue libérée du prisme de la différence sexuée, des contraintes du corps de par les apports que lui offriront demain les évolutions de la science, pousseront la femme à être finalement n’importe quel homme. Cette dimension de la représentation de la femme vécue dans cette perspective idéologique et scientifique est de fait une inversion des représentations féministes passées, elle ne conduit ni plus ni moins qu’à l’effacement même de la femme en termes d’identité.

La nouvelle idéologie féministe fondant en quelque sorte l’incitation de la femme à devenir n’importe quel homme, ôte finalement à la femme toute dimension touchant son altérité, sa différence. Il en résulte alors pour la femme une perte de la complémentarité, une perte des fonctions qui permettent l’imbrication harmonieuse des identités quand elles évoluent dans la concordance. Une harmonie qui a été en effet pervertie depuis la chute de l’homme et de la femme rendant parfois impossible cette complémentarité épanouissante.

La disparition de la figure paternelle 

Lors de la construction de notre identité dans notre petite enfance, nous avons tous besoin de repère, de représentation de garçon vis-à-vis de son père, de fille vis-à-vis de sa mère. Nous avons également besoin de nous identifier vis-à-vis de l’autre sexe, mais il est difficile de se construire en garçon si on n’a pas d’homme autour de soi et de fille si on a pas de mère. De plus, les relations parentales sont triangulaires, ce qui permet de défusionner avec la mère en s’identifiant à l’autre sexe

Le contact de l’enfant s’opère en premier lieu dans l’utérus de la mère, c’est la dimension maternelle qui est prégnante pour l’enfant à naitre qui entend le cœur et la voix de sa mère. C’est cette fonction matrice, qui est à la fois source nourricière, protection et réceptacle de vie qui vont jouer un rôle déterminant dans le processus de vie de l’enfant et de contact en premier lieu avec la vie que lui transmet la mère. Très vite la mère représente l’abri, la sécurité, la protection, la chaleur, l’affection, la fusion, la compréhension La mère représente l’amour.

Le rôle du père est essentiel, en ce sens qu’il intervient dans cette fonction de séparation (il coupe le cordon ombilical), « d’expulsion du sein maternel », de distinction, de différenciation. Le père doit éduquer ses enfants dans le sens étymologique du mot  » educare  » : faire sortir, tirer dehors, conduire au-dehors avec soin, mettre debout.

La fonction du père est de séparer l’enfant de la mère. Il doit s’interposer entre la mère et l’enfant pour permettre à l’enfant de développer son identité en dehors de la symbiose maternelle et rappeler à la mère qu’elle est aussi une femme, une amante, un être de plaisir, non seulement un être de devoir généreux. Si la mère représente l’amour fusionnel, le père représente les limites, les frontières, la séparation psychologique.

L’enfant a besoin de sentir toute l’attention de la mère pour découvrir sa puissance. Mais il a aussi besoin des interdits de son père pour connaître ses limites et apprendre à faire attention aux autres. L’enfant apprend, par sa mère, qu’il est au centre de l’univers, de son univers ; il doit apprendre, par son père, qu’il existe d’autres univers avec lesquels il devra collaborer pour survivre et s’épanouir. Un psychiatre rapporte que l’enfant doit apprendre à se situer à mi-chemin entre l’attitude du chat et du chien. « Le chat se croit le maître en voyant tout ce que son  » esclave  » fait pour lui, alors que le chien perçoit son propriétaire comme son maître parce qu’il est capable de tout faire pour lui ».

La présence du père permet d’éviter d’être fasciné par des modèles, mais si cette figure est absente, alors le garçon va partir à la recherche de cette construction virile

Le dépassement des limites de la finitude

 Plus cette humanité se soumet à la nécessité de la Technique (terme que j’emprunte à Jacques Ellul), de l’organisation sociale, de l’accès au « bonheur matériel » moins elle évoque le besoin de religion. L’homme n’a plus besoin du secours de Dieu puisqu’il peut compter sur la science conquérante- pour vivre sur de nouvelles idéologies pour prétendre au confort, au bien vivre.

Nous entrons comme le définissait Julian Sorell Huxley, biologiste et père de l’eugénisme (1887-1975) dans une forme de transhumanisme dépassant les limites de la finitude que lui impose notamment la mort.

Nous prenons ainsi conscience du fantasme de l’humanité et de la perversion auxquelles conduisent de telles aspirations, une telle utopie mêlant idéologies de libération du corps et nouveaux pouvoirs qui par enchantement augmentent les capacités cognitives et physiologiques de l’homme en lui greffant de nouveaux attributs. N’allons-nous pas finalement vers une société démiurgique ?

Il est intéressant de noter le sens étymologique de démiurge totalisant dont la racine grec est démiourgos   comprenant le mot « démos », désignant «le peuple » et de «ergos», « travail », le mot signifiant artisan ou fabricant. Le transhumanisme évoqué apparait comme le reflet d’un Démiurge qui traduit la parfaite synthèse conjuguant à la fois le travail sur la matière (la puissance technique) et de l’esprit totalisant !

Le gender : un dévoiement de la passion pour l’égalité

Notre monde est traversé par des crises plurielles. En l’espace de trois décennies, nous avons connu les mutations les plus importantes jamais vécues dans l’histoire de l’humanité. Nous assistons à une forme de déchristianisation programmée de la société, la volonté insidieuse d’effacer, de gommer toutes les traces de l’éthique judéo-chrétienne dont notre société a été imprégnée depuis deux mille ans.  Nous changeons de paradigmes, les valeurs sociales fondées sur la famille sont remises brutalement en cause, de nouvelles idéologies participent de ce changement radical. C’est cette idéologie que nous souhaitons ici mettre au grand jour à travers le concept « gender », car l’idéologie « gender » entend bien se débarrasser de toute référence judéo-chrétienne en combattant ses valeurs, en prônant la norme sociale et l’évolution des mœurs comme le nouveau modèle social à promouvoir.

Notre monde est traversé par des crises plurielles. En l’espace de trois décennies, nous avons connu les mutations les plus importantes jamais vécues dans l’histoire de l’humanité. Nous assistons à une forme de déchristianisation programmée de la société, la volonté insidieuse d’effacer, de gommer toutes les traces de l’éthique judéo-chrétienne dont notre société a été imprégnée depuis deux mille ans.  Nous changeons de paradigmes, les valeurs sociales fondées sur la famille sont remises brutalement en cause, de nouvelles idéologies participent de ce changement radical. C’est cette idéologie que nous souhaitons ici mettre au grand jour à travers le concept « gender », car l’idéologie « gender » entend bien se débarrasser de toute référence judéo-chrétienne en combattant ses valeurs, en prônant la norme sociale et l’évolution des mœurs comme le nouveau modèle social à promouvoir.

Les études du Genre

Le pédopsychiatre Vincent Rouyer rappelle que « les gender studies avaient pour but plutôt louable au départ de démontrer que la domination de l’homme sur la femme était de nature culturelle et acquise. De fait, il a existé et il existe encore des cultures et des sociétés matriarcales. (D’après certains anthropologues, c’était le cas des premières sociétés préhistoriques qui d’ailleurs auraient été caractérisées par leur grande violence.) Nonobstant, les auteurs de ces études sur le genre se sont crus obligés pour ce faire de nier la différence homme femme. Je ne reviendrai pas sur les arguments scientifiques qui viennent contredire ces hypothèses et qui sont admirablement développés dans le reportage du norvégien Harald Eia»

Je cite à nouveau Vincent Rouyer : « Ce qui me semble par contre complètement pervers, c’est l’idée d’articuler systématiquement la différence avec un rapport hiérarchique (en tout cas en ce qui concerne la différence des sexes) ; d’où l’origine de cette théorie du genre. Pour dénoncer le lien dominant/dominé, on supprime tout simplement la différence. »

L’autre point, selon Vincent Rouyer, « c’est l’impression que l’on cherche à détruire un ordre qui s’est créé autour des valeurs fortes héritées tant du christianisme que de la philosophie gréco-latine pour ce qu’elle a de meilleur, à savoir le respect de la vie humaine et son caractère inaliénable, tout en maintenant le fait que l’homme n’est pas lui-même sa propre mesure. Ces valeurs tant qu’elles étaient liées les unes aux autres ont permis à l’humanité de progresser car elles étaient fortement cohérentes, même si elles portaient un idéal sublime et difficile à atteindre. Ce qui caractérise notre société moderne, c’est justement la perte des idéaux et de la cohérence. On s’appuie sur certaines valeurs chrétiennes, non pour exalter les autres mais pour les combattre. Ainsi nous parle-t-on sans cesse d’amour et de sincérité au mépris de la vérité. L’amour n’en sort pas grandi, bien au contraire. J’ai du mal à percevoir un ordre nouveau dans tout cela tant la déconnection du réel est flagrante. Si un ordre nouveau sort de ce chaos, il ne pourra être que totalitaire. »

Une idéologie revêtant les habits de la science…

Ainsi une nouvelle idéologie  est de nature à faire basculer l’ensemble de notre société en le produisant sur de nouvelles normes susceptibles de déstructurer ses fondements millénaires.

Citons en outre l’intellectuel juif Shmuel Trigano : « L’inscription dans la Loi, dans l’univers des symboles, de la normalité d’une famille reposant sur le couple homosexuel représente […] un enjeu qui engage la façon de comprendre l’humain. C’est une manipulation anthropologique. C’est d’abord sur ce plan fondamental que la question se pose, bien avant les plans moral, philosophique ou religieux. »

Un ordre ancien fondé sur une société sexuée, la complémentarité, l’altérité homme et femme inspirée des valeurs judéo-chrétiennes et prenant sa source dans le livre de la Genèse, est susceptible de rentrer en collision avec un nouveau modèle sociétal, une forme d’ordre nouveau, celle du genre, la société dessexualités. Société des sexualités se fondant sur la loi du « genre », masculin ou féminin, libérée en quelque sorte du sexe biologique, dans le cadre d’une disparition des « hommes » et des « femmes »

Cette nouvelle norme sociale conteste la différence complémentaire. Si elle revendique l’égalité homme/femme, sa posture est l’égalitarisme : ni homme, ni femme… ni père, ni mère.

Selon le concept gender, les études sur le genre postulent en effet que « l’homme et la femme n’ont pas de dynamisme naturel qui les pousserait l’un vers l’autre » : seuls les conditionnements ou les déterminants sociaux rendraient compte de cette inclination. Par ailleurs, les tenants des études Gender aiment citer Simone de Beauvoir: « Une femme ne nait pas femme, elle le devient ». Ces mêmes études contestent la reconnaissance de la différence réelle et tangible d’une femme en regard de l’homme.

Pour Simone de Beauvoir, l’absence de « destin anatomique » relève en effet d’un postulat que l’on voudrait asséner comme une vérité fondée sur la seule construction de la dimension sociale niant ainsi l’aspect naturel (anthropologique).

Or  l’identité masculine comme féminine, l’identité de la femme comme celle de l’homme sont aussi des corolaires de leur sexe biologique. Cela ne les réduit pas pour autant à des rôles à jouer dans la société mais les invite à vivre en complémentarité en regard de leurs identités sexuées et différenciées.

C’est une erreur de penser aux seuls destins imposés par les éducateurs. S’il est vrai que les apprentissages dans les repères naissent aussi de déterminants sociaux, ils peuvent aussi et fondamentalement constituer des repères justes relevant de la transmission de valeurs au-delà de la norme sociale, construisant ainsi l’homme et la femme à des fins de rencontres épanouissantes, complémentaires, fécondes et fertiles.

Il est vrai que les détracteurs de la manifestation du 13 janvier contre le « mariage pour tous » répondront que l’identité n’est pas une qualité innée, statique, qu’elle est la résultante de l’interaction dynamique avec un environnement qui conditionne le devenir de l’être. Je connais ces références et, comme socio-économiste, je ne les conteste d’ailleurs pas. (J’adhère aux thèses de Bourdieu et ses travaux sur l’habitus.) Dans la théorie du genre, ce que je conteste, c’est de façonner idéologiquement la société à d’autres apprentissages, de lui fabriquer à son insu d’autres repères.

Mais au moins qu’il nous soit donné la liberté de poursuivre la transmission de ces « convictions repères » qui sont la reconnaissance de la différence réelle et tangible d’une femme en regard de l’homme !

Les études du Genre voudraient nous faire dire que les caractères sont interchangeables entre hommes et femmes, que les marqueurs identitaires des sexes sont à relativiser. Pourquoi le contesterions-nous ?

Pourtant la différence entre un homme et une femme nous semblent significatifs sur le plan de leurs comportements, de leurs émotions, de leurs sensibilités. Il serait manifestement peu honnête de le nier… sauf si l’expérience du couple homme-femme ne relevait pas du vécu.  Que dire de l’expérience de la maternité que nul homme n’a intrinsèquement vécu dans sa chair et qui façonne le caractère unique de la femme-mère ?

Prenons également l’exemple de la dimension symbolique de « l’épaule » qui peut faire sens dans la vie des couples homme et femme, notamment dans sa dimension de protection et de capacité à affronter le danger, d’entreprendre sans doute. Je ne dénie pas cette aptitude chez la femme notamment mère qui, évidemment est aussi sur cette posture de protectrice et sait incontestablement entreprendre pour l’enfant. Je parle ici de la capacité de l’homme à être pour sa femme dans une représentation qui soit rassurante, dans une aptitude à savoir affronter, à savoir faire face. L’homme n’est pas supérieur à la femme, ils sont simplement et intrinsèquement complémentaires, côte à côte. Au-delà de la simple attirance des corps, la femme recherche dans l’homme ce qui lui manque et vice et versa pour l’homme.

La théorie du Genre me donne le sentiment d’un modèle social qui veut se substituer à un modèle ancien, d’une pensée nihiliste « façon nietzschéenne »… volonté de programmer un reset, de reformater la mémoire collective, de reconstruire l’organisation, la pensée sociale et sociétale en quelque sorte.

Le genre se veut finalement libre de référence biologique : « l’homme et la femme dans leur différence sexuée peuvent s’incliner aussi bien vers le masculin que vers le féminin ».

Est ainsi contestée cette irréductible dissymétrie qui est fertile, féconde entre un homme et une femme et qui existe pourtant bel et bien. Nonobstant, elle est la condition d’un échange nécessaire, parce que complémentaire, chez deux être ontologiquement semblables mais aussi différents.

La théorie du genre qui prône l’affranchissement de toute attache, pense l’exception pour faire passer un nouveau modèle sociétal, une nouvelle norme sociale fondée finalement sur une société qui aurait pour miroir l’image d’un masque travesti qui change de genre selon la nuit ou le jour. Les repères étaient jadis religieux, judéo-chrétiens notamment, fondés sur l’altérité des sexes qui est une réalité biologique. Aujourd’hui force est de reconnaître l’émergence d’une pensée déstructurant le socle sociétal bâti sur la cellule familiale, d’une idéologie déviante qui renverse les tabous, détricote ce que des millénaires ont construit dans la mémoire collective.

La théorie du genre devient la nouvelle norme sociale posant un nouveau curseur, celle de l’éthique de l’ouverture et de la tolérance.

Un nouveau modèle sociétal face à l’ordre ancien…

Nous sommes en effet passés d’une société fondée sur la différence des sexes à la dimension asexuée de la société, une forme de revendication narcissique, consumériste, portée par une idéologie qui entend devenir aujourd’hui la pensée dominante… et qui progresse par capillarité de façon à atteindre l’ensemble des couches de la société. Les études du genre sont une option philosophique et ne relèvent nullement d’un caractère scientifique. Elles  n’ont pour seule vocation que de renverser un mode de pensée transmis par la religion judéo-chrétienne et cherchent même à stigmatiser ceux qui pensent différemment. Ainsi relevons l’affichage récent de réquisitoires et l’incitation à la dénonciation des élus se positionnant contre le « mariage pour tous ».

Je vois dans le Gender une idéologie qui se veut indiscutable, et demain persécutrice, culpabilisante pour ceux qui choisiront d’offrir à leur fille une dinette, plutôt qu’un jeu de mécano.

Bien entendu, les tenants du Gender formeront nos enfants. Dans leurs discours militants, ils évoqueront de nouvelles normalités. En revanche, ceux qui enseigneront la différenciation à leurs enfants seront accusés de souffrir de phobie honteuse et de pathologie religieuse.

Les adeptes du Gender proscriront les jeux de mécano à tout garçon et leur prescriront plutôt la dinette. Je vois là l’émergence d’une pensée totalitaire, organisée d’une certaine manière, une stratégie déployée visant, après l’égalité homme femme, la recherche à tout crin de l’égalitarisme à toutes les échelles de la société. Je crois ne pas avoir tort, car il s’agit bien d’une stratégie sociale, politique qui accompagne fort bien le projet de loi du « mariage pour tous ». L’égalité du « mariage pour tous », c’est l’égalitarisme des identités.

Je suis ainsi et résolument opposé à cette idéologie car « Non ! Un homme n’est pas une femme comme une autre », « Non, une femme n’est pas un homme comme un autre ! »

« Quand Les mots ne sont plus que ce que l’on décide qu’ils doivent être, on n’est plus dans le domaine du sens, mais de la confusion. » Bertrand Vergely

Pour conclure et faire suite à un article écrit par mon ami Alain LEDAIN citant Georges ORWELL, auteur du fameux livre 1984…

Ce livre, à l’aune de la théorie du genre, mériterait une nouvelle lecture que j’invite finalement à redécouvrir. Dans ce  roman fiction, Georges ORWELL prophétisait la ruine de l’homme par la « confiscation de la pensée et la prolifération de la technocratie ». Georges ORWELL nous révèle ainsi une société hors du temps qui pourrait finalement être la nôtre, plongée dans une ‘hypnose sociale’ où la perversion du langage prédomine… La NOVLANGUE…

Le genre qui nie ou désavoue l’identité sexuelle est une NOVLANGUE. Pour définir ce mot curieux, Georges ORWELL le définit à travers l’un de ses personnage de fiction  « Ne voyez-vous pas que le véritable but du Novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? A la fin nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. »…

Voici pourquoi il est urgent de réveiller auprès de tous cette prise de conscience d’une société qui demain imposera le LA de sa pensée, la norme sociale qui aujourd’hui est sur le point de faire disparaitre les mots ‘Père’ et ‘Mère’ du code civil, évacue la référence à l’homme et la femme reliée à leur origine sexuelle…

Aujourd’hui, cette nouvelle norme, qui sera enseignée dès la classe de première, n’apparaît probablement pas significative. Nonobstant la perversité de cette pensée qui a pris l’habillage d’études, l’idéologie renferme la réalité d’un changement de paradigme radical qui lentement pénètre la société  en l’ankylosant, en l’engourdissant, en l’endormant.

Cette idéologie est exactement comme le serpent dans l’œuf (référence au magnifique film de Bergman). La scène se joue à Berlin. Une forme d’oppression peu à peu nauséabonde envahit la ville, une ville qui peu à peu étouffe. La liberté se resserre. Une ombre menaçante et agressive s’impose peu à peu sur la ville. Le Nazisme se dévoile.  Le Gender, nouvelle norme sociale, se substituera à la dimension de la valeur, celle du Livre, des Ecritures qui nous révèlent la pensée de Dieu et nous disent que la femme et l’homme créés côte à côte sont complémentaires. Cette idéologie introduira inévitablement une pensée totalitaire.

La novlangue caractérise bel et bien notre société. Bertrand Vergely, philosophe et théologien français, ancien élève de l’École normale supérieure de Saint-Cloud, déclare que  « bidouiller une famille grâce à un montage juridico-médical et appeler cela famille n’est pas raisonnable. Les mots ont du sens quand ils renvoient à une réalité. Quand ils ne sont plus que ce que l’on décide qu’ils doivent être, on n’est plus dans le domaine du sens, mais de la confusion. Le règne de la confusion, sa dictature et avec elle la confusion des esprits et des comportements, n’est-ce pas ce dont nous souffrons déjà et qui risque de nous engloutir ? Est-il besoin d’en rajouter ? »

Eric LEMAITRE

La révolution bioéthique

Dans la destruction du réel, dernier livre de Bertrand Vergely , le philosophe dénonce les trois dernières folies majeures de l’homme fait Dieu, folies qu’il assimile à trois névroses :

La névrose à l’égard de la manière de naître qui se traduit par les nouvelles parentalités, et touche à la dimension d’une fécondation artificielle faisant rencontrer le désir et la technique.
La névrose à l’égard de la dimension relationnelle qui se traduit par l’apparition demain d’un robot affectif, nouveau substitut du rapport à l’autre et impacte la dimension de l’identité
Et la névrose à l’égard du réel qui se traduit par l’avènement d’un monde virtuel engendrant le corps déconnecté de tout ancrage à la réalité.
Tous ces changements ont un même dénominateur, la déconstruction ontologique, ce que les philosophes appellent l’être. Cette destruction de l’être, était hélas prévisible, déjà prédite dans le livre de la Genèse, depuis le Jardin d’Eden, depuis la prétention de l’homme à devenir l’égal de Dieu et cette tentative d’effacer son image en nous.

Cette destruction de l’entièreté associée à notre humanité résulte de la prétention à nier notre finitude, la prétention de nous orienter vers une forme d’autosuffisance singulière.

Ainsi comme l’écrit Bertrand Vergely « L’homme-Dieu est fort tant qu’il n’est pas démasqué. Comme tous les pervers, il n’aime guère que sa perversion soit nommée ».

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Les névroses contemporaines

Dans la destruction du réel, dernier livre de Bertrand Vergely , le philosophe dénonce les trois dernières folies majeures de l’homme fait Dieu, folies qu’il assimile à trois névroses :

  • la névrose à l’égard du réel avec l’avènement d’un monde virtuel engendrant le corps déconnecté de tout ancrage à la réalité.
  • La névrose à l’égard de la dimension relationnelle  nous connectant au monde sans être relié à la table de son prochain
  • La névrose à l’égard de la manière de naître qui se traduit par les nouvelles parentalités, et touche à la dimension d’une fécondation artificielle faisant rencontrer le désir et la technique.

Tous ces changements ont un même dénominateur, la déconstruction ontologique, ce que les philosophes appellent l’être. Cette destruction de l’être, était hélas prévisible, déjà prédite dans le livre de la Genèse, depuis le Jardin d’Eden, depuis la prétention de l’homme à devenir l’égal de Dieu et cette tentative d’effacer son image en nous.

Cette destruction de l’entièreté associée à notre humanité résulte de la prétention à nier notre finitude, la prétention de nous orienter vers une forme d’autosuffisance singulière.

Ainsi comme l’écrit Bertrand Vergely « L’homme-Dieu est fort tant qu’il n’est pas démasqué. Comme tous les pervers, il n’aime guère que sa perversion soit nommée ».

Pour prolonger la réflexion du Philosophe Bertrand Vergely et revenir à ces dimensions du désiré et de l’identité, ces deux thématiques sont en effet importantes, car elles convoquent des dimensions à la fois anthropologiques et métaphysiques …

Aussi chaque dimension autour des notions de désir et d’identité devrait être appréhendée, dans toute leur amplitude.

Cette question autour de ces thèmes du désir et de l’identité nous renvoie ainsi à celle formulée par Edgar Morin sur la complexité de l’individu que l’on tente de segmenter, de catégoriser sans relier les parties de l’identité humaine entre elles. Il faut ainsi penser la complexité humaine dans son identité biologique, subjective, sociale, culturelle et spirituelle. Dans un monde virtuel qui tente de déconnecter, de déraciner le corps du réel, et on oublie alors que l’être, l’identité humaine est aussi inscrite dans la dimension biologique. L’ancrage de l’être humain dans toutes ces composantes, biologique culture, social spirituel sont un principe d’unité et de diversification de l’espèce humaine. Toutes ces dimensions s’intriquent et forment l’identité mais une identité qui n’est pas déconnectée de sa nature également biologique. Or prétendre dissocier ces dimensions, c’est en quelque sorte aliéner ce qui fait l’homme dans son entièreté

Pourtant je ne vais pas me livrer à une explication de textes, mais plutôt vous partager les résonances de ces mots. Les réflexions qui sont les miennes autour du mot désiré et de l’identité « être soi ».

Or avec la fécondation in vitro, la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui, la question posée « Suffit-il d’être désiré pour être aimé et être soi » nous renvoie à nous interroger sur les enjeux de demain face à un changement de paradigme celle de la manière de naître.

Sommes-nous en fait, en train de basculer dans une nouvelle ère de la modernité, celle du transhumanisme ? Un transhumanisme parfois déconnecté qui n’a pas pris toute la mesure de la dimension ontologique de l’homme, en effet notre identité demeure entre autres, enracinée dans le biologique :

Mais qu’est-ce que nous dit cette technique qui gomme la paternité ou la maternité, interfère dans la manière de naître, ouvrant désormais la possibilité de faire jaillir la vie hors de la vie ?

Quelles incidences auront de fait un système technicien qui efface le Père ou la Mère sur la construction de l’être, de son identité, de soi pour reprendre cette question autour de l’identité et du désiré ?

Mais avant d’aller plus loin sur les enjeux et répondre aux éléments déclinés dans cet avant-propos, reprenons la dimension du désiré et celle de l’identité…

La dimension du désiré.

Le mot « désiré » en soi a des résonances forcément multiformes et qui s’applique à la dimension même de l’objet. Le désir se définit en philosophie comme ce qui « nous porte vers une réalité que l’on se représente comme une source possible de satisfaction ».

Il est ainsi étrange que dans notre monde, d’être les témoins d’un glissement sémantique, nous ne parlons plus ainsi de don, d’accueil de l’enfant mais de désir d’enfant. Ainsi nous sommes passés de l’accueil de l’enfant au « désiré ». Nous prenons de fait conscience d’un déplacement, de la part de signifiant dans les mots, allant de l’accueil inconditionnel au désir d’enfant, du don à la satisfaction d’un besoin.

Nous entrons de fait de plain-pied dans un monde de réification, d’envie non nécessairement altruiste, avec en arrière-plan la rupture du lien générationnel.

Avec la dimension du désiré, nous enfonçons enfin dans un monde qui rêve l’aboutissement d’un homme désincarné de son réel, auto construit qui se suffit à lui-même, qui n’a plus besoin de l’autre, qui évacue le relationnel, car le monde technique et numérique répondrait à l’ensemble de ses besoins. A partir du moment où l’enfant n’est plus reçu mais construit (construit par la rencontre entre le désir et la technique), cette construction augure d’un monde où, en dernière analyse, l’homme ne dépend plus que de lui-même : un homme auto-construit qui se suffit à lui-même. Perspective révélatrice d’une profonde solitude et de futures souffrances.

Mais au fond qu’est-ce que cette société qui veut la performance, qui aspire à un désiré, une norme et non à la dimension relationnelle qui touche à l’enfant accueilli tel qu’il est, né depuis des millénaires d’une relation homme et femme et non fécondé par une techno science augurant bien, et inévitablement dépeint par Aldous Huxley, un monde transhumaniste.

Avec la GPA nous passons bien d’une dimension de verticalité, c’est-à-dire celle du lien générationnel, à celle d’une dimension (plus) horizontale, la gestation pour autrui, ce n’est plus la gestation pour l’enfant, mais bien la gestation pour autrui et il y a là avec cette dimension du désiré, une dimension clientéliste qui forcément m’interroge et doit tous nous questionner.

En passant du lien générationnel, à une dimension plus horizontale, il y a de facto une rupture avec une histoire, un passé, une filiation, un héritage. Nous entrons de fait, de plain-pied dans l’horizontalité. L’horizontalité qui avec la GPA s’appuie nécessairement sur les avancées de la science pour faire émerger la vie.  

Au fond la question est aussi la suivante, le désir et aimer suffisent-ils pour combler toutes les dimensions qui toucheront ce qui fait que j’existe ?

La dimension de l’identité

En réfléchissant à la question de l’identité orientée sur le devenir de l’enfant, il semble sans doute important de postuler que l’identité proprement dite se façonne autour d’un environnement multiforme qui ne saurait être seulement réduit à la seule dimension sociale, culturelle, affective, la construction de l’identité de l’enfant est également inséparable de conditions qui touchent à la dimension de la vie prénatale mais également au fait qu’il reçoit un capital épigénétique qui imprime en lui une mémoire parentale. Ce capital épigénétique qui se construit en regard de l’impact de notre environnement et que nous transmettrons potentiellement à notre descendance.

  •   La vie prénatale participe de la construction de l’enfant

Des chercheurs ont en effet en premier lieu postulé que la mémoire parentale et prénatale s’imprime en effet durablement dans l’enfant à naître.  Un enfant sera en effet marqué à la fois par son héritage génétique mais également par le lien utérin qui l’unit très tôt à sa mère, et un enfant à naître peut ressentir négativement les impacts d’une dissociation, d’une rupture, un enfant sera comme touché dans son inconscient par les effets d’une séparation.

Ainsi l’étape de la fécondation et la naissance sont loin d’être une parenthèse sociale, un événement abstrait dans la vie de la mère et de l’enfant à naître du fait même des échanges utérins existant entre l’enfant et sa mère.

Plusieurs chercheurs ont mis à jour, le fait suivant : le fœtus à naître est un être à la sensorialité très développée ce qui va fonder des échanges d’une grande intensité avec la mère, il y aura dès lors comme une empreinte indélébile. Nous savons également aujourd’hui à quel chaos peut mener et aboutir une grossesse qui n’a pas été investie psychiquement par la mère qui s’inscrit dans le déni de la grossesse. Dans le cas de la GPA, la personne qui porte l’enfant ne s’investit pas dans la grossesse d’un enfant qui n’est pas le sien, elle s’inscrit, cette personne dans une prestation de service et une prestation technique.

La « Gestation Par Autrui » conduit de fait à une forme de rupture du lien, et cela touche aussi et au-delà à des questions profondes autour de la vie.

A ce propos une psycho thérapeute écrivait « N’est-il pas tragique de volontairement gommer les attaches de filiations biologiques maternelles et/ou paternelles comme repères majeurs dans la vie d’un enfant, de lui dire implicitement : » Tu oublies tes origines, ce n’est pas si important, tout se passe bien de cette façon aussi » ? Il se fait que non. Ce n’est pas ainsi que les choses se passent » fin de citation.

Ainsi notre identité d’homme et de femme demeure également enracinée dans le biologique et il me semble que l’existence d’une hérédité épigénétique transgénérationnelle est totalement démontrée. L’épigénétique s’exprime au travers de couches d’informations induites par l’environnement au sens large (une mémoire parentale  transmise soit par le Père, soit par la Mère) ; certaines marques épigénétiques pourraient même passer à la descendance.

Les incidences d’un système technicien qui efface la paternité ou la maternité

sur la construction de l’identité

En regard d’une techno science qui rend possible la fécondation sans relation sexuée, que signifiera demain le fait de grandir sans Père  ?

Nous sommes d’ores et déjà les témoins de mutations sociales importantes, les témoins d’un effacement du Père, sous l’influence de la redistribution sociologique des rôles interchangeables des hommes et des femmes au sein d’une civilisation qui réinvente l’humanité, nous assistons ainsi à un mouvement inéluctable «vers une société sans père» dans laquelle la figure paternelle s’efface et l’autorité se délité de tout contenu.. Or gommer le Père c’est aliéner une part de l’essence même de notre humanité, c’est la vider de toute substance spirituelle, c’est proclamer l’immanence sans transcendance.  

Puis avec l’émergence des avancées et des techniques médicales, les progrès de la médecine conduisent à un « jaillissement de la vie qui ne se fait plus dans la vie », et à une sortie demain, du vivant hors du vivant, finalement à l’accomplissement d’une dénaturation de la manière de naître, nous entrons dans un post humanisme annonciateur d’une vision mortifère et de destruction, d’une part de notre humanité, dépouillée de l’amour inconditionnel.

Soulignant la dimension mortifère sur cette dénaturation de la manière de naître, le docteur Benoît Bayle écrivait ainsi en 2004 : « La révolution “conceptionnelle” repose sur une incontestable réification de l’embryon humain. Celui-ci devient objet de surproduction, et par conséquent de destruction de masse, objet de contrôle qualitatif et bientôt peut-être, prothèse thérapeutique. Cette surproduction et cette surconsommation embryonnaire sont l’objet d’un refoulement massif. Leur étude mérite pourtant d’être entreprise, par-delà les enjeux idéologiques qu’elle soulève… La révolution procréatique repose sur une véritable logique de surproduction, de sélection et de destruction des embryons humains ».

De fait dans ces contextes de vision mortifère de la vie, nous apprenons bien que la matrice maternelle et paternelle est indissociable au devenir même de l’enfant, l’enfant à naître peut de fait, ressentir négativement la rupture et être marqué dans sa mémoire prénatale des effets mêmes de cette désunion en quelque sorte.

S’il faut entendre le désir parental, et en effet il faut en effet entendre la souffrance des adultes. Cependant la question de la souffrance de l’enfant doit aussi être entendue. Or nous aurions tendance à oublier que ce qui est en cause, ce n’est pas tant le désir individuel que le bien des enfants. Il s’agit de fait de prendre la mesure de toutes les conséquences des désirs d’adultes qui peuvent amener plus tard de la souffrance dans le cœur des enfants puis l’inscrire durablement dans leurs mémoires.

Gommer, effacer, faire l’impasse, Ignorer les dissociations dans ce rapport utérin peut conduire ainsi à de profonds ravages en appréhendant pas toutes les conséquences d’une dénaturation de la vie du fait du pouvoir de la technique, d’un système technicien prométhéen qui jouerait avec le feu, en aliénant une part de la dimension ontologique d’un être humain, c’est-à-dire son âme, sa dimension spirituelle.  

En outre le besoin bien réel de connaître ses origines donne tort à tous ceux qui nient l’importance des caractéristiques biologiques de l’homme, en y voyant seulement des déterminismes et stéréotypes dont il faudrait se libérer.

Pour illustrer et conclure ce premier propos et conclure sur cette question, je citerai ce médecin pédiatre Janusz Korczak qui s’est engagé toute sa vie pour les droits de l’enfant « Plus le niveau spirituel de l’éducateur est pauvre, plus sa morale est incolore, plus grand sera le nombre des injonctions qu’il imposera aux enfants, non par souci de leur bien, mais pour sa propre tranquillité, et son propre confort égoïste ».

Il est intéressant de noter que Korczak s’était au cours de la seconde guerre mondiale totalement investi dans son travail de pédiatre auprès des enfants d’un orphelinat et qu’il ait volontairement renoncé à sa vie pour ses convictions, cela nous parle pour la grandeur de l’homme. Mais cela est secondaire, en regarde de la force de son message résumé dans cette citation si profonde.
Remerciements de l’auteur : « j’aimerais remercier mes amis Claude et Edmond Boucton, mon Ami le Docteur Jérôme Sainton, sans qui ce texte n’aurait pu être produit avec cette dimension réflexive et cette richesse notamment sur des références à la fois philosophiques et anthropologiques ».

La révolution anthropologique

L’anthropologie transhumaniste « percute » l’idée chrétienne d’un Dieu souverain qui a créé le premier couple humain (l’altérité), premier couple qui transgresse l’ordre divin qui fut de ne pas goûter au fruit de la connaissance du bien et du mal et se revêt par conséquent d’une nature mortelle.

Dans son livre « La nouvelle idéologie dominante », le sociologue Shmuel Trigano rend compte de « cette reconsidération (métaphysique et anthropologique) du vivant et de l’humain qui aboutit nécessairement à la redéfinition de la personne post-humaine, non plus dans son essence mais dans son incarnation individuelle. »

Ainsi le manifeste transhumaniste résumé par ces mots « Nous souhaitons nous épanouir en transcendant nos limites biologiques actuelles » prend le contrepied de l’anthropologie biblique et définit de facto une nouvelle conception de l’homme et de son corps : 

Le transhumanisme, repose à la fois sur « un mélange assez hétéroclite d’ésotérisme religieux et de scientisme laïc » débouche sur une « certaine négation de la création, c’est-à-dire de la finitude de l’homme créé ». « Le transhumanisme percute l’incarnation, le corps créé dans sa dimension finie. Il s’agit de contre carrer la nature, en modifiant l’ADN, en transmutant le corps humain, en revendiquant sa plasticité.

Le transhumanisme est ainsi marqué par la volonté de s’inscrire dans la transformation du réel aux frontières d’un monde désincarné ou tous les rêves de mutation deviennent possibles

 

Une révolution culturelle ?

Qu’est-ce qui se cache derrière ces mots « révolution anthropologique » ?

Notre monde est en mutation, nous l’avions déjà évoqué dans un chapitre précédent. La première mutation est l’homme lui-même (le terme embrasse la femme dans ce propos), certes il ne s’agit « pas encore » d’une mutation génétique mais culturelle, cette mutation[1] concerne en premier lieu le rapport à l’altérité, au corps, aux autres, à soi.

  • Le rapport à l’altérité, au prétexte de l’égalité homme/femme, c’est l’idée même de complémentarité et de différences sexuées qui est remise en question, en prétextant l’interchangeabilité, la plasticité des êtres, « le je ne suis pas mon corps». Dans ce rapport à l’altérité, il faut être libéré des stéréotypes et des environnements culturels qui déterminent les représentations, figent l’homme dans une identité non choisie[2], cette recherche d’égalité absolue et non la complémentarité annonce la fin ni plus ni moins de la femme.
  • Le rapport au corps, ce sont ces notions de finitude et de l’homme déchu qui sont progressivement et proprement contestées dans une époque matérialiste résolument tournée vers l’idée de progrès.
  • Le rapport aux autres, la notion même de prochain ne saurait faire sens chez les transhumanistes, puisque l’idée même de compassion et de charité est supplantée par l’idée d’un état ou d’une collectivité universelle bienveillante, un égrégore bienveillant, pour tous et bientôt la bienveillance d’un nouveau communisme numérique.
  • Le rapport à soi, c’est dans l’interaction aux autres que nous nous construisons, or ce monde virtuel ne construit pas des interactions, mais des interconnexions qui modifient également les représentations de soi comme sujet incarné.

Dans ces contextes de rapports à soi et aux autres, l’idéologie transhumaniste vient également heurter les conceptions anthropologiques de l’homme « tel qu’il est », c’est l’idée même de finitude, de limites naturelles que le transhumanisme entend percuter.

L’anthropologie transhumaniste « percute » l’idée chrétienne d’un Dieu souverain qui a créé le premier couple humain (l’altérité), premier couple qui transgresse l’ordre divin qui fut de ne pas goûter au fruit de la connaissance du bien et du mal et se revêt par conséquent d’une nature mortelle.

Dans son livre « La nouvelle idéologie dominante », le sociologue Shmuel Trigano rend compte de « cette reconsidération (métaphysique et anthropologique) du vivant et de l’humain qui aboutit nécessairement à la redéfinition de la personne post-humaine, non plus dans son essence mais dans son incarnation individuelle. »

Ainsi le manifeste transhumaniste résumé par ces mots « Nous souhaitons nous épanouir en transcendant nos limites biologiques actuelles » prend le contrepied de l’anthropologie biblique et définit de facto une nouvelle conception de l’homme et de son corps :

Le transhumanisme, repose à la fois sur « un mélange assez hétéroclite d’ésotérisme religieux et de scientisme laïc » débouche sur une « certaine négation de la création, c’est-à-dire de la finitude de l’homme créé ». « Le transhumanisme percute l’incarnation, le corps créé dans sa dimension finie. Il s’agit de contre carrer la nature, en modifiant l’ADN, en transmutant le corps humain, en revendiquant sa plasticité.

Le transhumanisme est ainsi marqué par la volonté de s’inscrire dans la transformation du réel aux frontières d’un monde désincarné ou tous les rêves de mutation deviennent possibles

[1] Ces dimensions concernant les mutations affectant la culture sociale nous les avons développées dans un livre co-écrit avec Alain LEDAIN Masculin/Féminin que faut-il choisir ? Editions FAREL, sur l’altérité je vous renvoie également à un article écrit par Éric LEMAITRE sur le Blog Ethiques Chrétiennes.

[2] Gender Trouble est un essai philosophique de Judith Butler qui a eu beaucoup d’influence sur la la théorie queer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La déconstruction de l’Homme

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Le titre d’un livre doit au fond synthétiser la pensée de son auteur ou des auteurs puisqu’il s’agit d’un ouvrage collectif. Le titre doit être porteur de sens et traduire dans une forme de résumé  l’ensemble d’une réflexion.

Cette réflexion est sur l’homme, ce n’est certainement pas le premier ouvrage qui traite de cette question.

De multiples ouvrages philosophiques, théologiques, même sociologiques, ont traité de l’homme dans l’ensemble des dimensions anthropologiques et sociales. Dans ces ouvrages, la dimension contextuelle de l’homme a été considérée, également abordée comme sujet social, culturel dans toute son étendue éthique, morale, spirituelle.

Ce livre n’a cependant pas l’ambition de traiter l’homme sur ses aspects sociologiques, philosophiques, anthropologiques, même si cet ouvrage collectif le fait par ailleurs en évoquant en effet une idée de déstructuration de l’anthropologie que font peser à la fois la modernité virtuelle, la société des écrans, le monde numérique, la technicité de notre époque.

Notre titre peut paraître étrange puisque sans équivoque nous abordons la « déconstruction de l’homme » dans un contexte d’idéologie transhumaniste et de société numérique. La déconstruction de l’homme comme :

  • l’envie de dépassement du génome humain,
  • le désir de modifier l’être humain, d’en finir avec l’encerclement du corps,
  • l’aspiration à mettre fin à la finitude qui renvoie à une échelle de l’homme dans le temps et l’espace,
  • la volonté enfin de libérer l’homme des tâches corvéables, de la sueur de son front, à travers une nouvelle révolution industrielle sans précédent : l’économie numérisée et l’intelligence artificielle.

L’intitulé « Déconstruction de l’homme » pourrait faire penser à un ouvrage écrit par le philosophe Jean-François Maté, L’homme dévasté. Le philosophe postule, lui aussi, la déconstruction de l’homme dans toute sa dimension culturelle, comme un être finalement destitué, limogé et dénonce la place prise par le monde virtuel qui s’est substitué au monde réel.

Le philosophe Mattéi [1] dresse en effet un diagnostic bien sombre de notre époque : « La déconstruction a fêté un bal des adieux à tout ce à quoi l’homme s’était identifié dans son histoire (…). L’adieu à ce qui faisait la substance de l’humanité, cristallisée dans son idée, est en même temps l’adieu à l’humanisme et, en son cœur, l’adieu à la condition humaine. Rien ne semble résister au travail de la taupe qui a sapé les principes sur lesquels reposait la civilisation. »

Dans ce livre, si nous évoquons l’emprise et la fascination de l’homme pour le monde virtuel nous dénonçons le risque d’une humanité en mal de surnaturel qui a idolâtré littéralement l’objet technique sans prendre conscience que cet objet technique est en train de la vampiriser, de la remplacer, de la contrôler.

« Sommes-nous donc en train de confier nos vies à des puissances de calcul inhumaines, sortes de main invisibles qui dotées en apparence des meilleures intentions sèmeraient en réalité le chaos, troubleraient le débat démocratique, modifieraient le destin de nos enfants, et nous imposeraient de surcroît à notre insu une terrifiante transparence ? » – commentaires de Violaine de Montclos et Victoria Gairin, journalistes du Point. [2]

Une déshumanisation du monde s’organise sous nos yeux et, pire, l’économie virtuelle qui se dessine sera destructrice d’emplois. Les algorithmes [3] et la robotisation vont révolutionner le monde de l’emploi en affaiblissant la dynamique et les ressorts qui construisent le travail humain.

Ce sont sans doute les grands équilibres économiques qui sont à terme menacés, même si quelques-uns de nos lecteurs souhaitaient pondérer notre propos en soulignant l’impact numérique qui est forcément multiforme (positif comme négatif) et générera de l’emploi. La question est : pour qui ? Et qui sera sur la touche ?

Il y a quelques temps, je sortais d’une soirée d’entrepreneurs et dirigeants chrétiens, un banquier indiquait qu’il lui était demandé de réfléchir à la numérisation de la banque, ce qui signifiait pour lui, rationalisation et meilleure gestion des ressources, en d’autres termes réduction des effectifs, suppression de succursales bancaires, remise en question de la dimension de la banque de proximité.

En préparant ce livre, nous lisions récemment que l’institut européen Bruegel [4] a publié les résultats de l’enquête [5] menée par un économiste et un ingénieur d’Oxford. Leur constat est sans appel : c’est la moitié des effectifs, soit un emploi sur deux à l’échelle européenne, qui dans un avenir proche sera réduite ou profondément transformée par le numérique, en partie menacée par l’évolution des services numérisés, menacée par la robotisation de la société, et ce dans les prochaines décennies.

La révolution numérique, digitale, robotique de l’intelligence artificielle est ainsi en cours. Selon la même étude, l’impact sera conséquent sur l’emploi, en raison de l’automatisation des tâches, de la puissance des inférences bayésiens [6] qui permettront de gérer les fonctions même les plus compliquées occupées jusqu’à présent par des êtres humains, voire de résoudre des problèmes qui auraient été confiés jadis à des emplois dits qualifiés.

L’homme s’est pris de passion pour la science, ce qui n’est pas en soi un mal, mais sa passion est devenue une idole, le scientifique est devenu scientiste se persuadant que la science nous fera connaître la totalité des choses et répondra à toutes les formes d’aspirations et de délires prométhéens.

Dans ce livre nous abordons ces projets démiurgiques qui transforment la vie sociale et l’être humain dans la démesure sans que ce dernier ait pris conscience qu’il a ainsi ouvert la boîte de Pandore à un être technique, une forme de bête apocalyptique qui prendra possession de lui. Pourtant ce projet démiurgique n’a ni le souffle ni l’âme insufflée par l’Esprit de Dieu. La bête et son monde d’images faisant de nous des iconoclastes seront sans aucun doute terrassés par ceux dont la conscience s’éveillera pour ne pas succomber à la tentation d’être de leur nombre.

Ainsi la révolution numérique, qui se déploie aujourd’hui sous nos yeux, est sur le point de remodeler la société de demain. Sa dynamique propre et la vitesse à laquelle elle se déploie sont de nature à rebattre toutes les cartes de la vie et de l’organisation sociale. Chaque révolution industrielle s’est accompagnée autrefois d’une restructuration de la vie sociale, chaque révolution industrielle a imposé une forme de réadaptation de la vie et des rapports aux autres.

La rapidité avec laquelle les innovations du monde numérique se déploient ne laissera dès lors aucun répit, d’où une désorientation sociale et psychologique qui sera sans précédent dans l’histoire. Le monde numérique est en train de casser les repères culturels qui avaient été à présent les nôtres ; la société sous nos yeux est sur le point d’être recomposée avec de nouvelles règles, de nouveaux codes, une nouvelle normalisation, de nouvelles oligarchies (les scientistes) dont les projets autour de la technicité sont de nature à fragiliser, à déconstruire l’homme, à renverser les valeurs, les tables de l’ancien monde, leurs hiérarchies, leurs institutions.

C’est la verticalité de l’ancien monde qui risque de disparaître au profit de l’horizontalité, la fin des intermédiaires, y compris des élus ; l’on pourrait imaginer de nouvelles formes de démocraties « débarrassée de toute forme de représentation nationale, » ce qui n’est pas impossible compte tenu du désaveu dont les personnels politiques font l’objet pour une grande partie d’entre eux. Internet pourrait répondre à la crise de la représentation qui se manifeste aujourd’hui résultant d’une abstention électorale croissante.

Sans doute, il faudra oser sortir de l’indolence, exprimer le refus de laisser aller dans le vertige de l’innovation technologique qui est en réalité une puissance destructrice nous poussant à toujours consommer et à considérer que tout devient artificiellement obsolète, y compris la culture et les institutions.

Il faudra se dégager d’une forme d’apathie et de bienveillance vis-à-vis de la technique en menant une critique réfléchie, argumentative à l’instar de Jacques Ellul. Il faudra avoir le courage de déloger les poncifs, les lieux communs, tels que : la technique est neutre, elle nous libère de la servitude, elle améliore notre espérance de vie, elle nous affranchit de l’aliénation des outils industriels. Ce sont aujourd’hui de véritables clichés, bien sûr l’on nous targuera ce propos de type : « la technique est ce que nous en faisons. »

Soit, la technique « est ce que nous en faisons, » mais justement, quelle réflexion éthique a été faite à propos de la technique puisqu’elle a été auréolée de neutralité, puisque nous avons pris la précaution de relativiser le discours autour de l’objet, d’édulcorer, de tempérer la critique pour ne pas offenser le progrès ? Or aujourd’hui nous prenons la mesure que de tels discours n’ont pas permis de peser les orientations, de discerner les intentions cachées d’une technique sans conscience, nous subissons aujourd’hui les avatars idéologiques associés à la séduction du progrès !

C’est l’essayiste et chercheur Evgeny Morozov qui indiquait dans son livre Pout tout résoudre cliquez ici que les technocrates neutres aux postures bienveillantes et attentistes ne s’engagent en réalité pas dans des considérations réellement réalistes prenant la mesure de tous les effets induits par la puissance des nouvelles technologies. Pour illustrer son propos, l’auteur pointait les technologies de reconnaissance faciale susceptibles d’être utilisées à bon escient pour rechercher par exemple un enfant perdu, mais ne mesurant pas que ces mêmes technologies de reconnaissance faciale pourraient s’avérer à terme être de véritables mini Big Brother aux mains d’une nouvelle Stasi. [7] Pour Evgeny Morozov ces technocrates neutres sont « aveugles des multiples contextes dans lesquels les solutions pourraient être appliquées et les nombreuses manières imprévisibles par lesquelles ces contextes pourraient diminuer leur efficacité. »[8]

Refuser de coopérer avec cette puissance bienfaisante et invisible demandera sans doute du courage. Ce monde virtuel et numérique laissera demain une place à la machine dominante et écrasante, atomisant l’homme en lui donnant l’illusion du bonheur, le sentiment d’autonomie mais d’un être ni libre, ni affranchi puisqu’en permanence dépendant et guidé par la machine.

Au fil de ces pages, je songeais à ce texte de l’apôtre Paul décrivant le monde à venir et le mystère de l’iniquité : déjà au premier siècle le mystère du mal agissait et trouvera son épilogue dans ce système politique économique et religieux que décrira l’apôtre Jean.

Ainsi l’apôtre Paul, en écrivant aux Thessaloniciens, leur indiquait : « Et maintenant vous savez ce qui le retient, afin qu’il ne paraisse qu’en son temps. Car le mystère de l’iniquité agit déjà ; il faut seulement que celui qui le retient encore ait disparu. Et alors paraîtra l’impie, que le Seigneur Jésus détruira par le souffle de sa bouche, et qu’il anéantira par l’éclat de son avènement.… » [9]

Le mot « iniquité » ou « anomie » décrit la nature d’un monde caractérisé par l’apostasie, et dont l’apothéose sera l’avènement de l’impie, l’homme sans foi ni loi, qui rejette tout attachement à Dieu et toute norme. C’est une forme d’incrédulité extrême et de confusion qui caractérisera le mystère de l’iniquité. L’anomie est l’équivalent du mot iniquité, un terme qui fut introduit par le sociologue Emile Durkheim qui caractérise l’état d’une société dont les normes réglant la conduite de l’humain et assurant l’ordre social apparaîtront totalement inopérantes. Dans ces contextes de déstructuration des grands principes de la famille, de la religion, de la politique, du travail qui ont régi l’homme, les humains seront prêts à s’essayer à de nouvelles technologies, idéologies, doctrines sociales, à une nouvelle vie sociale en se libérant en quelque sorte des socles culturels qui ont précédé les générations passées.

Or aujourd’hui, il n’est pas contestable que l’humanité est arrivée à cette dimension de relativisation du bien et du mal, à une forme de désintégration sociale du fait de l’individualisation extrême dans laquelle peu à peu les humains cheminent, ce que Jacques Généreux décrivait comme la Dissociété, la société morcelée, la société fragmentée, l’émergence d’une société d’étrangers, d’hommes étrangers à la destinée des autres comme le dépeignait également  Alexis de Tocqueville. « Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de patrie. » N’est-ce pas là les prémisses de la société numérique qui se dessine, ces réseaux sociaux ou nous ne voyons pas, nous ne touchons pas, nous ne sentons pas, et nous n’existons qu’en nous-mêmes et pour nous seuls ? Je trouve cette réflexion d’Alexis de Tocqueville fabuleusement prémonitoire et prophétique. Ainsi, l’usage déséquilibrant du monde virtuel est une sorte d’avortement de la communauté humaine traditionnelle.

Sans doute, en nous lisant, vous aurez le sentiment que nous dressons une prospective bien sombre de l’avenir de notre humanité, mais il y a sans doute urgence aujourd’hui de réformer nos pratiques et de prendre conscience que nous pourrions inverser ce processus en marche par un acte de résistance, en ne nous laissant pas absorber par le monde digital, l’économie numérique, le monde des écrans, en retrouvant le chemin de la transcendance, le sens de l’autre et de notre relation respectueuse de la nature, en nous réconciliant en définitive avec toutes les dimensions du réel, du beau, du bien et du vrai ; d’être les hommes et les femmes du quotidien et non d’un futur fascinant mais en réalité sans espérance.

Éric LEMAITRE

Notes:

[1] Jean-François Mattéi, 1941-2014.  Professeur de philosophie grecque et de philosophie politique. Auteur du livre L’Homme dévasté, paru aux collections Grasset, 18 février 2015, 264 p.

[2] Article du Point de septembre 2016 : « Ces algorithmes qui nous gouvernent. »

[3] L’algorithme se définit comme une méthode suivant un mode d’emploi précis fondée sur une série d’instructions à exécuter, une suite finie et non ambiguë d’opérations ou d’instructions permettant de solutionner un problème ou d’obtenir un résultat.

[4] L’institut européen Bruegel est un think tank, un observatoire d’experts de la vie quotidienne et économique européenne.

[5] Notre source est extraite de l’article paru dans :

http://www.itg.fr/portage-salarial/les-actualites/Robotisationnumerisationimpactemploisfutur. Autre source : rapport au gouvernement de Philippe LEMOINE, novembre 2014 : http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/rapport_TNEF.pdf, page 11.

[6] Inférences bayésiennes : méthode d’inférence permettant de déduire la probabilité d’un événement à partir de celles d’autres événements déjà évalués. Dans le domaine de l’intelligence artificielle, les programmes sont conçus à partir de cette méthode, ce qui confère à la machine des capacités d’autonomie et d’apprentissage. C’est cette révolution de l’intelligence artificielle qui est en marche.

[7] Le ministère de la Sécurité d’État dit la Stasi : service de police politique, de renseignements, d’espionnage et de contre-espionnage de la République démocratique allemande (RDA) créé le 8 février 1950.

[8] Extrait du livre de Evgeny Morozov, Pour tout résoudre cliquez ici, Editions FYP, p. 173.

[9] Citation extraite du Nouveau Testament 2 Thessaloniciens 2:6, version Louis Segond.