Nouvelle Chronique

Je vous convie à une chronique plus originale à une forme de dialogue entre un jeune homme de 24 ans et son ainé de 62 ans, et finalement si on prête une attention au questionnement formulé par Maxence, nous décelons que l’écart d’âge est insignifiant en regard de l’intelligence dont témoigne Maxence dans la formulation de ses questions. Maxence dénote tout au long de l’interview une réelle profondeur et une curiosité non feinte sur le sujet. Permettez-moi de vous présenter en quelques mots Maxence :
Maxence a 24 ans, après une enfance en Charente maritime, passionné de science et de cinéma, il a commencé ses études d’ingénieur à l’ENSMA (École nationale supérieure de mécanique et d’aérotechnique) après une école préparatoire au lycée Montagne à Bordeaux. Souhaitant explorer également une autre passion, le cinéma, il fait une formation en audiovisuel et digital durant 2 ans à Rouen. Durant cette période, il a réalisé plusieurs courts métrages. Après ses études il est parti au Canada durant un an dans le cadre d’un Permis Vacance-Travail avant de rentrer sur Paris et de travailler actuellement pour un web Magazine dédié à la finance. Maxence rêvait de créer une émission de podcast qui résultait de sa volonté, d’associer puis de lier ses deux passions que sont la science et l’audiovisuel. Maxence m’a joint et m’a proposé une première émission, j’en ai accepté l’augure et l’intérêt, ma confiance que nous pouvions en tirer le meilleur parti pour informer.
Maxence : L’idée de se transcender, d’augmenter ses capacités est une idée qui a été finalement popularisée ces dernières années par les GAFAM notamment qui la véhiculent et investissent en ce sens, mais c’est une idée qui remonte finalement presque aux origines de l’humanité. D’où vient cette quête si obstinée selon vous ?
Éric : Plusieurs motifs conduisent à cette quête d’augmentation de l’homme, motifs qui se réfèrent le plus souvent à des tentatives permanentes de surmonter, de dépasser, les limites actuelles du corps humain en ayant recours à la génétique ou à des artefacts. L’obstination de cette quête, elle tient finalement à quelques raisons, le refus de la mort, le rejet de la finitude, l’inacceptation de l’encerclement du corps. Dans les temps les plus reculés de l’histoire, l’homme a toujours souhaité, s’affranchir de l’enveloppe corporelle dans laquelle il est assigné à résidence depuis l’Eden. Mais ce refus de la mort le conduit finalement depuis toujours à rechercher comment la vaincre, comment triompher de cette fin inéluctable à laquelle il est promis. Vous évoquiez les origines de l’humanité, et vous avez raison d’y faire référence, puisque cette quête de l’homme augmenté, de l’immortalité, n’est pas nouvelle. Et j’invite chacun à découvrir toute la mythologie grecque [Icare, Pygmalion, Prométhée la Calypso], la mythologie sumérienne [Gilgamesh] et les récits bibliques notamment le prologue du livre de la Genèse et Babel pour découvrir qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil. Le rêve d’immortalité est finalement une histoire qui appartient à une mémoire enfouie, celle de notre éternité, depuis notre sortie d’Eden.
Maxence : Beaucoup d’Oeuvres de science-fiction ou d’anticipation sont devenues réalité par la suite. Norbert Wiener, vous en parlez dans votre livre « La conscience mécanisée », imagine à la sortie de la Seconde Guerre mondiale une société totalement contrôlée et régulée par la cybernétique, nous y sommes. Le romancier Greg Bear lui phantasme des microstructures assemblées atome par atome, inoculées dans le corps humain ; en 2020 des techno-scientifiques ambitionnent la programmation d’êtres cyborgs à partir de cellules cardiaques artificielles en combinant à la fois l’intelligence artificielle et l’impression 3D. Les récits fantastiques, ne sont-ils pas finalement Éric, les récits révélateurs, les récits finalement dystopiques d’un monde à venir ?
Éric : Oui Maxence, vous avez raison et parmi ces récits, celui écrit par Aldous Huxley, est sans doute le roman, le plus emblématique. Le meilleur des mondes est en effet le roman dystopique par excellence. Dans le meilleur des mondes, la reproduction sexuée telle que nous la concevons de nos jours a totalement disparu dans cette fiction dystopique. Notez que la prédiction associée à « la fin de la reproduction sexuée » n’est pas en soi nouvelle. Je vous invite notamment à découvrir le Faust de Goethe qui a été écrit en deux pièces 1808 et 1832. Dans l’une des scènes de cette pièce de théâtre, un mystérieux personnage Méphistophélès fit irruption, ce personnage n’est pas moins l’émissaire du diable, il promet la fin de la reproduction sexuée et l’avènement de la fécondation in vitro. Le meilleur des mondes est le prolongement de la vision faustienne de l’homme. En effet dans le roman « Le meilleur des mondes » les êtres humains sont tous créés en laboratoire, les fœtus y évoluent dans des utérus totalement artificiels, l’ectogenèse. Puis ces êtres sont conditionnés durant leur enfance. Les traitements que subissent les embryons au cours de leur développement déterminent leurs futures prédilections, aptitudes, comportements, puis en accord avec leur future position, sont affectés dans la hiérarchie sociale soit comme Alpha [L’élite], les Béta [chargés de fonctions d’encadrement], les Epsilon [les manuels] etc. Ce roman dystopique nous renvoie en somme à l’univers de GATTACA. Cet univers où l’on conçoit en revanche des êtres génétiquement parfaits, sans défaut ou presque. Est-ce que ceci relève toujours aujourd’hui de la science-fiction ? la réponse est sans doute que nous n’en sommes plus si loin ! La fécondation in vitro existe bel et bien ; depuis 1978. Certes l’enfant ne nait pas dans un utérus artificiel, mais il n’est pas impensable que l’on y arrive un jour. Puis l’autre avancée génétique est celle du CRISPR CAS9, ce fameux bistouri biologique, en forme de ciseau, un enzyme spécialisé qui permet de procéder au découpage d’un brin de l’ADN défectueux et de le remplacer. Le génie génétique permet à ce jour de modifier facilement et rapidement le génome des cellules animales et végétales. Cet outil le CRISPR CAS9 permettrait potentiellement s’il est maitrisé demain ; d’éditer un génome susceptible de ne pas transmettre à la descendance, des défauts génétiques.
Maxence : Nous sommes dans une société qui ne tolère plus la mort, la maladie, un monde aseptisé. En réponse à ces fléaux, l’argument que l’on entend est celui-ci : le progrès peut soigner tous ces maux : Internet permet de rapprocher les gens, de rester en contact, les progrès en médecine et robotique permettent de soigner les maladies, de redonner l’ouïe, la vue ! Voire bientôt de retrouver le contrôle de ses membres. On se dit que les arguments avancés sont plutôt louables, pourquoi faudrait-il s’en méfier ?
Éric : A l’instar de votre propos nous pourrions citer le projet « Brain computer interface » qui fit usage de capteurs placés à l’intérieur de la boite crânienne, donnant ainsi la possibilité à une personne de donner des instructions à un dispositif mécanique complexe, comme l’exosquelette. Les tests cliniques qui sont en cours depuis 2015 avec des personnes tétraplégiques, témoignent de l’avancée faramineuse de ces premières formes d’hybridation biomécanique.
Mais je crois qu’à ce stade ; nous confondons deux choses, la médecine réparatrice et la médecine augmentée. Entre les deux, nous avons bien deux médecines, celle réparatrice, qui vise à apaiser, à soigner et améliorer les conditions de vie et l’autre transcendante, qui vise à satisfaire des fantasmes pour étendre les facultés cognitives et physiques, puis donner à l’être humain de nouveaux pouvoirs.
Avec cette médecine augmentée, nous le constatons et vous l’avez implicitement, mentionnée dans votre question : les barrières entre le vivant et la matière tombent et on invente le cœur artificiel, prothèse intracorporelle conçue pour se substituer au cœur natif, ainsi les frontières biologiques et mécaniques se brouillent. On peut également dans la même veine et désormais « imprimer » de la peau biologique, se raffermir d’un exosquelette comme ces recherches effectuées dans les laboratoires techno-scientifiques, rappelées précédemment. Nous pouvons aussi interfacer l’homme et la machine et finalement inventer l’homme bionique, l’homme machinisé en quelque sorte. Tout cela est donc possible !
Mais au-delà du possible, la question est finalement de savoir si tout cela est bien utile et si ceci ne relève pas d’un fantasme. Le fantasme d’un progrès continu, sans limites aucunes, comme l’imaginait le philosophe Condorcet ! Vous en conviendrez, nous sommes, en face finalement d’une forme « d’évolution de l’espèce humaine » qui ne relèverait plus d’un jeu qui résulterait des seules forces mécaniques et naturelles, mais d’un relais biologique dont l’homme serait devenu aujourd’hui l’unique et premier artisan. En d’autres termes et cela rejoint votre première question et ma première réponse, l’homme refuse sa nature biologique trop fragile, trop vulnérable et il faut donc l’appareiller, la protéger, l’équiper pour surmonter les défis d’une vie biologique en tout point faillible. Mais voilà s’il est en effet louable de réparer, est-il besoin d’augmenter et en conséquence de dénaturer. L’homme sera-t-il un homme s’il est dévêtu en quelque sorte de son enveloppe biologique pour revêtir l’enveloppe bionique.
Maxence : Ken Loach, Le réalisateur de Sorry we missed you qui traite de l’ubérisation de la société, dit regretter dans une interview que les gens ne pensent plus à l’intérêt commun et finalement au bien de tous, mais davantage aujourd’hui à leur bonheur et aspirations personnelles. Est-ce que l’Intelligence Artificielle, peut être la solution comme l’avance Peter Thiel qui déclare que l’IA est communiste ? À l’instar du modèle chinois, l’IA porte l’idée qu’elle ne pense pas aux intérêts d’une seule personne, mais d’une société entière. Sur le papier ça fait rêver, est-ce que ce serait la solution est ce que cela vous semble possible ?
Éric : Le terme d’Intelligence Artificielle, me fait déjà sourire, prêter à la machine de l’intelligence est un oxymore puisque nous y associons le mot artificiel. « L’IA » est davantage une matière, un dispositif de calculs codés et mécaniques, mais non une intelligence d’essence biologique et d’une complexité infinie. Je reprends cependant deux mots dans votre question : « l’IA est communiste », ce n’est pas faux, moi-même dans un autre ouvrage intitulé la déconstruction de l’homme, j’avais utilisé le terme de de communisme numérique, un autre modèle de société, une forme d’égrégore qui serait en quelque sorte un nouveau paradigme de communauté sociale, renversant les axiomes sociaux et économiques traditionnels fondés sur l’accès à la « gratuité » et à la fin de toute verticalité comme l’avait imaginait le philosophe transhumaniste FM 2030 Fereidoun M. Esfandiary.
Ce modèle économique, fondé sur le monde numérique, est en passe de prendre les relais de l’État, en proposant une dimension servicielle au-delà des services jusqu’à présent payants. Ainsi demain, le recours jusqu’à présent à des prestataires payants ne sera plus nécessaire, car une offre de service accessible à tous et « gratuite » sera largement proposée. Un nouvel âge d’or où le « gratuit » constituera la promesse, comme l’est d’ores et déjà un grand nombre, d’applicatifs numériques, mais le supplément de service qui lui est indispensable sera toujours payant. Ce modèle ne peut en fin de compte survivre que s’il est payant. Le communisme avec un point ?
Maxence : Nous sommes de plus en plus dépendants aux machines et à la technique, ce confinement nous le montre bien. Les gourous de la Silicon Valley nous promettent de nous libérer des tâches ingrates, d’avoir le monde à portée de main, de gommer les inégalités… Sauf qu’aujourd’hui, en 2020, on apprend que les petites mains sont toujours là, dans les stocks d’Amazon ou Lidl sauf qu’elles répondent aux instructions d’une IA et ne peuvent communiquer qu’au moyen d’une trentaine de mots. On apprend par Newscientist que l’intelligence artificielle traitant le système de santé américain discrimine les populations noires. On constate des problèmes d’addictions et de manque de nos écrans notamment chez les enfants. Nos montres connectées, nos voitures nous donne des ordres, Netflix nous dit quoi regarder, google-nous dit quoi écrire dans nos emails. Pour l’instant on a l’impression que c’est nous qui sommes prisonniers de la machine. Finalement on nous promet une existence longue certes, mais pleine de frustrations, assujettis, court-circuité dans la prise de décision, dépourvu d’individualité et de libre arbitre … Nous serions-nous fait avoir ?
Éric : Votre commentaire est à nouveau très juste, nous avons été comme aspirés par l’armoire magique, le miroir aux alouettes, un leurre, un piège à rats. Ce monde des GAFAM et autres BATX les autres géants du WEB chinois savent de façon artificielle créer de nouveaux usages. Et je pourrais allégrement enrichir votre liste, les enceintes Alexa, les montres connectées, la machine à café connectée …). L’économie numérique se présente à nous comme une source infinie d’inventivités, de croissance, d’augmentation des biens, le toujours plus et jamais assez. Vous avez dans votre réflexion précédente un aspect oh combien juste. La robotisation s’est jusqu’à, présentée à nous, comme un palliatif pour nous libérer avantageusement de la corvéabilité, nous affranchir des tâches répétées. Puis l’IA c’est-à-dire « l’intelligence artificielle » est venue comme renforcer l’efficience du robot en proposant aux plus qualifiés d’alléger également les tâches intellectuelles répétées. Ainsi sont éliminés au fil de l’eau ces « notions de métier qui consistent à faire toujours la même chose »[1]. Les métiers, nécessitant de l’apprentissage sont en passe de disparaitre et pire de transformer les employés d’Amazon que vous citiez en nouveaux G.O.R de Gentils Ouvriers Robotisés. Notre société est poussée par ce nouveau mantra, il faut innover, il faut performer, il faut évoluer. Nous sommes en train d’adorer finalement le Dieu Néon de Sound of Silence, une chanson écrite par le duo mythique Simon & Garfunkel[2]. Dans leur chanson, le duo décrit ces enseignes lumineuses et tapageuses qui inlassablement nous invitent à consommer, à consommer et surtout nous privent d’échanger, de partager.
On nous impose finalement ce nouveau dogme, il n’y a pas le choix, ce sera forcément mieux, ce mantra comme je l’exprimais précédemment, il nous faut accepter le progrès sans condition, sinon nous « dévoluons », nous régressons, nous retournons à l’âge de pierre. Juste pour vous dire que le COVID 19 est en train de nous chambouler et de conditionner subrepticement notre monde, mais le risque est hélas l’accélération d’un mouvement qui est de nature à nous enserrer et à nous enfermer dans l’esclavage de l’égrégore numérique.
Souvenez-vous de ce film Métropolis de Fritz Lang. Pardonnez-moi je vais m’arranger avec le récit dystopique du film et lui donner une autre couleur plus actuelle, plus contemporaine. Disons que Métropolis dans ce récit réécrit en quelque sorte, est toujours une cité à l’architecture futuriste, une mégapole aux lignes et aux structures avant-gardistes, une ville cybernétique, une nouvelle Utopia[3] qui vit sous le joug de tyrans nos fameux GAFAM et BATX.
Les aristocrates de ce Nouveau Monde après la tempête COVID 19, se prélassent dans leurs palais numériques, tandis que la masse laborieuse des G.O.R, survivent dans leurs maisons calfeutrées sous la surveillance et le contrôle d’un nouveau Big Brother, le messie technologique leur promettant le paradis digital et de les protéger de l’intrusion d’une nouvelle bactérie létale, les gens ont peur, le messie technologique veille sur eux, il les protège avec tant de bienveillance, mais il épiera ceux qui n’ont pas accepté son pouvoir, les harcèlera, les persécutera.
Maxence : Beaucoup de gens, moi le premier, avons le sentiment d’être contraint à ce changement, que la lutte est vaine, dans une société où le maître mot est « l’adaptation » constante, sans quoi nous sommes rejetés aux bancs de la société, voir jugés. Certains ne s’aperçoivent malheureusement même pas de cela. Quelle solution avons-nous ? faut-il être en rejet total ou au contraire comme le numéro 2 dans le prisonnier ou le personnage principal dans 1984, faut-il s’y jeter corps et âme ? Y a-t-il un équilibre ?
J’anticipais déjà cette réflexion précédemment Maxence. Je souscris pleinement à votre propos vous avez raison. Pour même l’appuyer, j’aimerais vous faire découvrir deux auteurs Marie David et Cédric Sauviat qui ont brillamment pensé le sujet et qui touche cette thématique que vous abordiez précédemment l’IA, Marie David et Cédric Sauviat sont tous deux diplômés de l’école polytechnique, voici ce qu’ils écrivent à propos du progrès à la page 154 de leur ouvrage : « Intelligence Artificielle la Nouvelle Barbarie », … « Les conséquences de cette course folle ne sont jamais discutées », j’ajoute, jamais anticipées, jamais évaluées, puis ces ingénieurs poursuivent leurs commentaires respectifs et là nous relevons toute la pertinence de leurs propos… « En son temps il aurait été criminel de refuser d’isoler les murs avec l’amiante, de ne pas équiper les écoles de tablettes numériques, de ne pas se lancer dans tel médicament puis de découvrir 20 années plus tard les dégâts catastrophiques du caractère cancérigène de l’amiante, des effets absolument néfastes de l’usage des écrans par des enfants parce que tout simplement le temps biologique n’est pas celui de l’innovation technologique ».
Mais que dire des lois bio éthiques pas encore votées quand on apprendra demain le catastrophisme psychologique que l’on aura généré auprès d’enfants sans père ou sans mère au nom d’une forme d’égalitarisme infondé. Au risque comme vous l’indiquiez fort justement d’être mis au ban de la société pour avoir eu l’outre Cui dance de rejeter en bloc, le soi-disant progrès moral et le meilleur des mondes promis.
Maxence : Nous comprenons que pour lutter contre l’uniformisation de la société et son assujettissement il faut commencer par se cultiver, nourrir l’âme. Dans cette époque ou on a délaissé l’esprit, on voit pourtant de plus en plus de gens se tourner vers les néo-religions notamment aux Etats-Unis, au développement personnel, à la méditation, certains changent de vie en quête de sens pour se reconnecter aux autres et à la nature. Est-ce une conséquence directe de cette société et cela est-il positif ? Peut-on y voir l’espoir d’un renouveau spirituel ?
Éric : Nous sommes à l’heure des SMS, des « posts », des assertions, des raccourcis, qui sont à mille lieues des textes pensés par toute une littérature philosophique, théologique ou même de romans ou autres essais. Les réseaux sociaux nous livrent en pâture, leurs cargaisons de messages pauvres sans densités, sans intensités. On s’imagine penser, mais c’est souvent de la pensée bricolée, sans réelle consistance, dans l’artifice. Je préfère de loin lire en effet, pour enrichir et nourrir l’âme comme l’esprit.
En ce sens vous rejoignez le propos de l’écrivain Bernanos[4], ce dernier disait à peu près ceci que la modernité est une conspiration contre toute forme de vie intérieure. Je rejoins aussi la pensée de l’urbaniste Paul Virolio urbaniste et philosophe quand ce dernier nous indiqua que « …le progrès technologique a détruit […] l’humble préférence du proche et du prochain, le savoir être soi-même, dont Montaigne nous entretenait comme la plus grande chose au monde… »
La « valeur » de notre postmodernité est l’adulation des objets. Dans ce contexte notre époque s’enfonce dans une forme d’atomisation sociale, une atomisation quasi nucléaire qui se traduit par un véritable morcellement dans lequel nous nous glissons, un monde sans contacts, en distance, en pièces sans doute un monde en miettes, avec l’arrive brutale du COVID 19, cette nouvelle peste.
Nous sommes en effet face à une perte de sens, une perte de sens aggravée, du fait que cette civilisation n’accepte pas de reconnaître l’existence d’un Créateur, Le monde post-moderne se caractérisant également par un rejet de l’ancien récit métaphysique, celui d’un Dieu qui se révèle à la totalité de notre humanité et au monde au travers de la Bible. Ce même courant post-moderne conteste ou nie toute idée de transcendance, idolâtre de manière aveugle la raison humaine et la conduit inexorablement à l’irrationalité. Cette irrationalité qui entend conduire l’humanité à un nouveau récit, celui de sa propre transcendance, de sa propre auto divinisation. Un terme y sera mis et cela nous le savons intimement, au plus profond de nous-mêmes, même si nous ne souhaitions pas l’avouer, le reconnaitre.
[1] J’emprunte l’expression aux deux auteurs du livre Marie David et Cédric Sauviat : Intelligence Artificielle : La Nouvelle Barbarie Editions du Rocher Idées. Livre publié en 2019.
[2] Je fais référence à ce groupe Mythique dans l’une des chroniques de mon nouvel Essai.
[3] Livre de Thomas More écrit en 1516. Je vous renvoie à la description de ce livre, dans mon précédent essai : La mécanisation de l’homme.
[4] L’auteur notamment de la France contre les robots, Georges Bernanos est un écrivain français : 1888 -1948