Les enfants cobayes modifiés par CRISPR Cas9

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Source : Alliance Vita :

Bébés CRISPR : Les inquiétudes se confirment

L’affaire des premiers bébés génétiquement modifiés par CRISPR-Cas9, nés en novembre 2018, ne cesse de se compléter d’informations alarmantes. Cette expérimentation a abouti à la naissance de deux fillettes, véritables cobayes de la technique qui les a créées.

Lors de son annonce, qui avait suscité une réprobation mondiale, le scientifique à l’origine de cette grave transgression, He Jiankui, expliquait avoir franchi cette ligne rouge car il poursuivait l’hypothèse de « rendre ces bébés résistants au VIH », en désactivant un gène, le gène CCR5. Ce gène code, notamment, pour un récepteur placé sur des cellules du système immunitaire (les lymphocytes). Or, le virus VIH utilise justement ce récepteur pour pénétrer ces cellules et les infecter.

Peu après, des voix se sont élevées pour dénoncer ce qui semble être les réelles intentions de cet apprenti-sorcier. Il souhaitait expérimenter l’impact de cette modification sur les facultés cognitives, car ce même gène CCR5 pourrait être impliqué dans les facultés d’apprentissage, ce qui n’est qu’une supposition.

Rapidement, et face au tollé mondial suscité, les revues scientifiques avaient refusé de publier l’étude, car le scientifique avait enfreint des règles éthiques et déontologiques. Si bien que ce document a été tenu relativement secret. Mais il semblerait que JAMA (Journal of the American Medical Association) soit actuellement en train de l’étudier, et l’aurait confié à de nombreux experts, y compris à George Church de la Harvard Medical School. Mais est-ce aux revues scientifiques de faire « la police » des transgressions éthiques ? Des experts ont demandé à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) de se pencher sur ce grave problème. L’OMS a créé un groupe d’experts et élaboré l’idée d’une hotline pour signaler toute tentative de fabrication de bébés génétiquement modifiés.

Une journaliste de la MIT Technology Review a pu se procurer le document d’origine et l’a transmis à quelques experts. Leurs conclusions, présentées en 12 points, sont accablantes. Les questions soulevées sont multiples. Elles concernent, par exemple, la liberté et le consentement éclairé des parents ; n’ont-ils pas été contraints, tenus dans l’ignorance des enjeux, manipulés ? Mais aussi les données tenues secrètes, comme les noms des personnes impliquées (spécialistes de la fécondation in vitro, obstétriciens) ne sont pas mentionnés. Pourquoi ? Etaient-ils au courant de ce qu’ils faisaient ? Et bien entendu, ces experts dénoncent les nombreux biais scientifiques, une fraude à la réglementation de la procréation assistée etc.

Le document de He Jiankui démontrait déjà que ces embryons génétiquement modifiés étaient des « mosaïques », c’est-à-dire que d’autres mutations que celles ayant motivé l’expérience se sont produites à d’autres endroits du génome, de manière différente d’une cellule embryonnaire à l’autre, ce qui rend les conséquences imprévisibles.

Ces enfants, nés de bricolages procréatifs, sont pris en otage de leur mode de conception, et en payent le prix. Il est urgent de mettre un coup d’arrêt mondial à ces transgressions, qui ne sont même plus des essais sur l’homme, mais des essais d’homme.

En ouvrant la voie à la création d’embryons transgéniques pour la recherche, la loi bioéthique française alimenterait cette transgression. Il est encore temps pour les sénateurs, qui examineront cette loi en janvier 2020, de revenir sur cette mesure.

De l’homo sapiens à l’homo cyborg

Auteur Eric LEMAITRE

De l’homo sapiens à l’homo cyborg

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« L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant ».

 Le post-humain sera-t-il le prochain stade de notre évolution ? La profusion en masse de produits technologiques de ces nouveaux artefacts, familiarise et conditionne l’homme sur l’avènement d’une suprématie de la technologie qui embrassera le monde ou l’embrasera.  La promesse de se façonner en s’appuyant sur les convergences technologiques dans les quatre domaines de l’informatique, de l’information cognitive, de la génétique et de la bio technologie afin de rendre possible la greffe l’homme avec de nouveaux attributs décuplant une puissance démiurgique.  L’homme cyborg ne relève plus de l’imaginaire de romanciers de science-fiction mais bien d’une réalité qui est bientôt aux portes de notre humanité.

Passer de l’homo sapiens à l’homo cyborg, c’est passer finalement à une autre nature, celle du « glébeux » comme l’entonne le cantique « comme l’argile entre les mains du potier », à celle d’un être qui le transcende biologiquement. Ce cantique spirituel nous rappelle que nous avons été façonnés par le potier, pétris par lui, autrement dit, nous avons été conçus par Dieu à partir de la poussière. Mais cette nature-là est contestée par l’homme qui ne se satisfait ni de ce corps, ni de cette faculté de penser dans les limites que lui confère la nature reçue. Comment alors ne pas songer à ce texte de Pascal :

« L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant ».

L’homme est ainsi et finalement « assis » entre deux infinis, lui, l’être fini, délimité mais la vanité l’emmène ou le conduit à dépasser sa finitude à reculer les frontières de ces deux infinis, il entend ici explorer au-delà de ces deux barrières, passer si possible par-dessus l’encerclement de son corps pour s’approcher de ces deux horizons de l’incalculable.

L’homme entend ainsi agir à l’échelle de l’infiniment petit, celle du nanomètre, échelle que nous avons souvent dû mal à imaginer mais qui avoisinerait à titre de comparaison la proportion d’une orange à l’échelle de la terre. Ici l’homme entend exécuter ses projets pour agir au niveau le plus élémentaire de la matière et juste au-dessus de cette échelle, modifier la structure de l’ADN comme nous l’avions vu précédemment. Mais l’aspiration de l’homme est aussi son dépassement, la possibilité de se connecter et d’implémenter ou d’embarquer de nouveaux composants, des composants extra biologiques, des micro structures bardés d’intelligence. C’est l’homme intriqué, homme biologique et homme matière, l’homme génétiquement modifié. Ce combat-là devrait intéresser les écologistes, mais je doute qu’ils en fassent en réalité leur priorité.

A l’envers de ce monde naturel, le monde de la cognitique[1], cette discipline de l’ingénierie rattachée aux sciences de l’information aurait pour vocation d’interfacer l’homme, interconnecter le vivant avec le numérique et conférer de nouveaux attributs, l’homme deviendrait de fait une nouvelle forme d’entité, une entité hybride moitié homme, moitié machine, un homme cyborg. De fait l’homme appareillé ne saurait en soi choqué ou bouleversé la pensée transhumaniste, puisque l’homme est vu comme une machine biologique et non un être trinaire corps, âme, esprit. De fait modifier, interfacer l’homme d’attributs non biologiques est au fond, selon la conception transhumaniste, une dimension qui fait partie intégralement de la nature future de l’homme. L’habillage technologique de l’être humain s’articulera dès lors autour de nouvelles technologies, résultant des progrès faramineux de l’ingénierie, associés aux sciences de l’informatique, cognitives, de l’information et génétiques, de la « convergence des NBIC ». Cette confluence des NBIC est considérée comme l’ultime saut qui permettra de penser l’évolution de l’homme, centrée sur la performance à la fois physique et cognitive de l’homme, le nouvel homme. Si cela paraît être impossible pour nos lecteurs, certains qui nous lisent ont dans leur entourage ou eux-mêmes un pacemaker, une prothèse auditive ou autres dispositifs bio embarqués dans l’organisme, la possibilité d’imaginer demain que l’être humain s’inocule de microstructures ne relève pas de fait de l’impossible. Subrepticement l’ingénierie cognitique entend bien s’affranchir de ces barrières morales et rendre de facto possible la mutation de l’être humain.

La vision projetée concernant l’évolution du genre humain relève d’une conception purement matérialiste et mécaniste touchant le fonctionnement du corps biologique, il n’y avait donc plus qu’un pas à faire entre l’approche de « l’homme machine » de Julien Offroy de la Mettrie et l’homme automate de Jacques Vaucanson[2] inventeur du premier automate reproduisant les principales fonctions mécaniques de l’homme. Il suffisait d’imaginer la symbiose de l’homme et de la machine. Le rêve de greffer ou de connecter le corps humain n’appartient plus ainsi au domaine de la science-fiction, de nombreuses avancées tendent toujours et aujourd’hui démontrer la possibilité d’unir à la chair de l’homme, des pièces artificielles, d’hybrider ainsi l’homme, de connecter les prothèses et le cerveau humain. Le cyborg, une nouvelle vision anthropologique de l’homme est devenue le fruit d’un fantasme humain visant à libérer finalement l’homme du dualisme corps/esprit, c’est l’homme composite, moitié nature, moitié artifice, c’est l’homme greffé d’extensions artificielles. L’hybridation notamment à l’intelligence artificielle, pourrait à terme le dispenser de raisonner, puisqu’en un clic, la greffe lui permettra d’arbitrer rationnellement ses choix, de penser le monde, l’environnement avec une vision augmentée, une acuité accrue, une perception étendue.

Notre Faust humain entend ainsi bouleverser les paradigmes, franchir le Rubicon, passer outre les lois de la nature et les interdits, l’homme fusionne avec la matière non cette fois-ci pour réparer les dysfonctionnements de son corps (oreilles, yeux, cœur, amputation) mais bien pour l’augmenter, l’homme devient non pas l’homme appareillé mais il devient l’homme mutant.

Ainsi l’évolution continue des progrès technologiques vise bien à mettre en place les technologies de réparation et d’amélioration en proposant un dépassement progressif de notre condition humaine actuelle : prothèses contrôlées par la pensée, cœurs artificiels, yeux bioniques. Dépasser la mort biologique c’est bien s’affranchir le plus possible des limites physiques. Le rêve transhumaniste comme le décrit Laurent Alexandre dans son livre « La guerre des intelligences » c’est décupler les connaissances cognitives et corporelles, c’est dépasser les frontières, les clôtures entre le vivant et la matière.  Ainsi en s’affranchissant des barrières du vivant et de la matière inerte, nous banalisons le vivant, nous transformons le vivant en jeu de lego, remplaçable, transformable à souhait, interchangeable.

Ray Kurzweil   ingénieur, chercheur, et futurologue américain, directeur de recherche chez google prédit que dès les années 2030 « nous allons grâce à l’hybridation de nos cerveaux, avec des nano composants électroniques, disposer d’un pouvoir démiurgique ». Pour la neuro biologiste Catherine Vidal pondère l’enthousiasme de Ray Kurzweil « Le cerveau humain est d’abord et avant tout spécifique de la matière vivante … Si la connaissance que l’on en a est encore très sommaire, vu son immense complexité, on sait qu’il compte 100 milliards de neurones ». Chaque neurone est connecté à 10.000 autres. Elle poursuit : « L’information qui circule dans le cerveau est à la fois électrique et chimique. C’est cette combinaison absolument unique qui va permettre de nuancer à l’infini les messages qui y circulent entre les neurones ». Pourtant grâce à des interfaces cerveau machine, des résultats spectaculaires ont été obtenus. Notamment chez des patients tétraplégiques. La prédiction de Ray Kurzweil n’est pourtant pas dénuée de fondements absurdes mais on ne peut cependant faire l’impasse de la complexité du vivant jusqu’à présent inimitable comme le souligne la neuro biologiste Catherine Vidal.

Mais le cyborg sera-t-il vraiment la fin du processus de l’évolution ? Serait-il la fin de l’évolution de l’espèce humaine, ou bien l’imaginaire nous projettera-t-il vers d’autres formes possibles de l’humanité. Il ne semble pas que ce processus s’achèvera, sans doute que Dieu mettra fin à cette entreprise démente, une humanité qui se transcende elle-même. Le délire des transhumanistes est aussi de songer de dématérialiser l’humain, autrement dit de le scanner numériquement, de scanner l’ensemble de son cerveau ou bien la totalité de ses souvenirs pour le réimplanter dans un cerveau reconstitué. Mais la conscience humaine ne se réduit pas un corps et je reprends cette citation extraite d’un blog « Est-ce uniquement la conscience qui fait notre identité ou bien l’union du corps et de la conscience ? », dans les deux cas la radicalisation transhumaniste touchant à la transformation de notre être modifie la perception de l’être humain, bouscule la vision anthropologique de l’homme.

Or il est urgent pour l’homme de se raisonner et de considérer que c’est bien dans l’éphémère d’une vie si fragile soit-elle que nous puisons le vrai sens de la vie et que la beauté d’un sourire, celui d’un proche, d’une main tendue pourrait bien changer notre condition d’homme et lui conférer l’espérance parfaite, d’être aimé, car c’est bien dans l’amour que nous trouvons la dimension parfaite que nous recherchons et qu’en vain nous courrons vers un bonheur factice en investissant la matière.

[1] La cognitique est une discipline de l’ingénierie rattachée au cadre plus global des sciences de l’information

[2] Jacques Vaucanson, 17091782 à Parisinventeur  Il conçut plusieurs automates, il perfectionna également et  entre autres les métiers à tisser.

Les transhumanistes et la pensée darwiniste

Les transhumanistes et la pensée darwiniste

La filiation du transhumanisme avec le darwinisme n’est pas en soi contestable en ce sens que la théorie de l’évolution défendue par Charles Darwin postule que les formes supérieures de la vie procèdent des formes intérieures et que, de fait, nous allons vers l’idée du mieux, d’un progrès toujours continu.  Dans la position transhumaniste et l’idée que les transhumanistes se font du progrès, il est possible de changer la nature de l’homme, de le délivrer des lois naturelles, de le conduire à une nature supérieure ; la sélection artificielle prend ainsi aujourd’hui, chez les transhumanistes, le relais de la sélection naturelle, l’homme doté de la capacité technique devient le moteur de sa propre évolution, de sa propre transformation.

Après avoir lu le livre de Nicolas Le Dévédec, La société de l’amélioration, je partage pleinement son point de vue concernant la pensée darwiniste ou néodarwiniste, et les dérives de l’idéologie transhumaniste qui prétend que l’humanité est à une nouvelle phase de son développement mais sans être soumis aux aléas de l’évolution biologique et complexe de l’espèce humaine comme l’envisageait le biologiste Julian Huxley, frère de Aldous Huxley. C’est désormais l’homme qui est aux commandes de sa propre mutation, réalisant ainsi le présage [1] de Pic la Mirandole qui vantait la mutabilité de l’homme en des formes supérieures.

Nicolas Le Dévédec rappelle dans son essai cité précédemment que déjà en 1756, Charles Augustin Vandermonde [2], médecin français, théoricien de l’hygiénisme et de l’eugénisme, déplorait la dénaturation de l’homme parmi toutes les espèces « du fait de s’être écarté de son état en affaiblissant sa conformation naturelle ». Cette pensée de Charles Augustin Vandermonde est de fait transposable à cette volonté qui habite la pensée transhumaniste de rendre possible cette mutabilité chez l’être humain, de dériver vers d’autres formes, notamment d’augmenter l’homme et de l’orienter ou de le muter vers de nouvelles dispositions physiques et cognitives.

Sur ces contextes d’évolution de l’homme via la sélection naturelle qui est le fondement de la théorie évolutionniste, nous pouvons légitimement nous interroger sur la pensée philosophique qui habite l’esprit de Charles Darwin et la théorie de l’évolution qu’il défend. En effet, le processus évolutif guidé par la sélection naturelle serait a priori et selon Charles Darwin guidé, sinon orienté sur l’idée du progrès. Ce processus graduel théorisé et décrit par Charles Darwin repose en effet sur la transmission à la descendance des variations ou mutations positives et qui auraient été communiquées à la descendance. Il résulte de ce processus et selon cette théorie de l’évolution une amélioration continuelle, un continuum du progrès des espèces, créant des êtres toujours complexes et de mieux en mieux adaptés. Au fond et finalement, la théorie darwinienne ne repose-t-elle pas sur une idée exclusivement philosophique, celle du progrès continu, déjà partagée par les Lumières, se pourrait-il que l’observation de Darwin ne s’appuierait en réalité que sur un seul postulat philosophique, l’évolution selon Charles Darwin ne pouvant en effet être pensée que sous le signe de l’amélioration des espèces ?

Or, cette réalité supposée par Darwin est contredite par cette autre réalité. En effet, les variants génétiques défavorables s’accumulent dans le génome humain. De fait, notre patrimoine génétique a vocation à se dégrader inlassablement sans qu’aucune sélection darwinienne n’en soit la cause. Cette accumulation récente est déjà perceptible : une étude publiée dans la revue Nature en 2012 révèle que 80 % des variants génétiques délétères dans l’espèce humaine sont apparus depuis au moins 5 000 ans. Un autre article scientifique paru dans le Triple C postule l’existence de codes correcteurs d’erreurs génomiques ; l’auteur soutient l’évolution darwinienne, mais témoigne dans cet article que la fréquence des mutations génétiques [5] ne peut en réalité conduire qu’à la dégénérescence des génomes et donc constitue un obstacle à leur transmission dans le temps.

De facto, l’on peut penser que le transhumanisme s’inscrit dans l’urgence d’une horloge qui lui annonce que le temps court contre l’homme. Le transhumanisme, dans cette urgence d’une fin inexorable et prévisible, s’engage finalement dans un combat contre cette dégradation déjà perceptible dans le génome humain. Au fond, le combat génétique livré par les généticiens faustiens n’est ni plus ni moins que d’inverser une loi fatale, celle de la fin programmée de l’homme déchu.  Les transhumanistes livrent une dernière bataille contre cette fatalité funeste. Pressentant la dégradation biologique de l’homme, de façon sans doute inconsciente, les transhumanistes se refusent à cette fatalité, s’emploient à découvrir le saut technologique qui inverse la réalité d’un processus involutif, cette régression inscrite dans nos gènes.

Ce sont dans ces contextes que la mutabilité est promue par les idéologies de la postmodernité. Mutabilité du corps promue, en raison des recherches engagées dans le domaine de la génétique, il devient peu à peu concevable de modifier le génome humain. La   technique CRISPR-Cas9 [6] récemment découverte est, en effet, une enzyme utilisée en génie génétique pour modifier facilement et rapidement le génome. La protéine Cas9 a été notamment largement mobilisée comme un dispositif d’ingénierie du génome pour produire des ruptures du double brin d’ADN ciblé, ce qui permet, entre autres, d’éditer avec précision des portions d’ADN et de modifier ainsi le génome des cellules, de provoquer une nouvelle mutation ou bien de procéder au remplacement d’un gène défectueux par un gène sain.

Ainsi, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, il devient possible d’être l’acteur de sa propre évolution, de l’évolution de son ADN. L’humain veut avoir la mainmise dans sa propre chair, de la muter ce qui ne semble plus impossible de par la possibilité de changer le brin défectueux ou bien imparfait et d’attribuer un brin sain, sans défaut. Nous comprenons de fait beaucoup mieux cette intuition partagée par Aldous Huxley : « La révolution véritablement révolutionnaire se réalisera non pas dans la société, mais dans l’âme et la chair des êtres humains », en raison même de son côtoiement avec son frère biologiste, théoricien de l’eugénisme et père du terme « transhumanisme ».

Mais l’évolution génétique ne se limite pas au cadre de notre génome. Elle peut consister à prolonger radicalement la vie, à augmenter également le nombre des connexions neuronales, ou encore à nous interfacer ou nous hybrider avec des « organes » artificiels afin d’augmenter l’homme, de fournir de nouvelles facultés physiques et cognitives.

La volonté d’inverser le cours de l’histoire biologique ressemble à un combat de désespoir, une bataille de toutes les forces faustiennes contre l’inéluctable, jusqu’à ce que Méphistophélès ne vienne s’en mêler pour passer un nouveau pacte avec le genre humain.

Notes :

[1] Fable commentée précédemment.

[2] François Vandermonde [1727-1762] était docteur en médecine de Reims. Il est à l’origine d’un essai : Essai sur la manière de perfectionner l’espèce humaine.

[3] L’idée darwinienne repose également, dans ses fondements, sur une idée philosophique préconçue des origines, davantage que sur l’idée de la finalité historique du développement en forme de progrès continuel.

Il s’agit, comme le déclare, l’Ecriture, d’une tentative, de nier le Créateur, sinon dans son existence, au moins dans ses actes créateurs et dans sa relation avec la création.

Il faut savoir que Darwin s’est orienté vers l’agnosticisme, quittant après 1836 et progressivement, un théisme aigri qui persistait dans ses pensées et ses écrits et qui, quelque part, le hantait. Après 1836, ses vues matérialistes se développaient. Après 1851, Darwin ne croyait plus à un Dieu bienveillant, mais un certain théisme/déisme a subsisté dans son esprit jusque dans les années 1860, confessant qu’il était confus à propos de Dieu. Néanmoins, même dans la sixième édition des Origines (1872), nous retrouvons la mention du Créateur avec les mêmes mots que dans la première édition de 1859 : « There is grandeur in this view of life, with its several powers, having been origi-nally breathed by the Creator into a few forms or into one; and that whilst this planet has gone cy-cling on according to the fixed law of gravity, from so simple a beginning endless forms most beauti-ful and most wonderful have been, and are being, evolved. »

Dans une lettre à Thomas Henry Huxley datant de 1879, il écrit : « In my most extreme fluctuations I have never been an Atheist in the sense of denying the existence of a God. I think that generally (and more and more as I grow older), but not always, that an Agnostic would be the more correct description of my state of mind » (publiée la première fois dans Life and Letters). En 1881, donc un an avant sa mort en 1882, Darwin a retravaillé son autobiographie écrite en 1876, et nous y trouvons ces mots étonnants et hautement significatifs :

« the  extreme  difficulty  or  rather  impossibility  of  conceiving  this  immense  and  wonderful  universe, including  man  with  his  capacity  of  looking  far  backwards  and  far  into  futurity,  as  the  result  of  blind chance of necessity. When thus reflecting I fell compelled to look to a First Cause having an intelligent mind in some degree analogous to that of man; and a deserve to be called a Theist. This conclusion was  strong in my mind, as far as I can remember, when I wrote the ‘Origin of Species;’ and it is since that time that it has very gradually, with many fluctuations, become weaker. But then arises the doubt, can the mind of man, which has, as I fully believe, been developed by a mind as low as that possessed by the lowest animals, be trusted when it draws such grand conclusions? I  cannot  pretend  to  throw  the  least  light  on  such  abstruse  problems.  The mystery of the beginning of all things is insoluble by us; and I for one must be content to remain an Agnostic. »

[4] https://www.lemonde.fr/sciences/article/2013/01/24/allons-nous-devenir-debiles_1822291_1650684.html.

[5] Catarina D. Campbell & al., « The human mutation rate using autozygosity in a founder population »; Nature Genetics (Letter), 2012-09-23, doi:10.1038/ng.2418.

[6] Une technique de ciseau pour couper l’ADN. La protéine Cas9 est une enzyme qui est utilisée en génie génétique pour modifier facilement et rapidement le génome des cellules animales et végétales

Le transhumanisme :  critique de l’essentialisme et de la sacralisation de la vie

Auteur Eric LEMAITRE

Le transhumanisme :  critique de l’essentialisme et de la sacralisation de la vie

La sacralisation de la vie mérite en soi d’être appréhendée, que faut-il ici entendre ici ou comprendre. Le sacré est sans doute ce qui dépasse la vie même, la transcende et confère cette dimension à la fois de mystère et de sacré. Lorsque nous évoquons la sacralisation de la vie, cela sous-entend qu’il ne faut pas l’atteindre en éteignant par exemple la vie, en la blessant, en modifiant ce qui fait son essence.  La dimension du sacré témoigne d’un aspect qui est au-dessus de moi et que je dois infiniment respecter, la dignité de l’homme, de la vie humaine doit être le principe même qui régit l’existence et ce de manière inaliénable. La dignité de l’homme est par exemple un principe sur lequel il n’y a pas à céder, car au-dessus de nous-même. La sacralisation n’est pas le fétichisme, la vie n’est pas ainsi un objet, l’objet de la vie transcende la matière et nécessite qu’on lui voue non l’adoration mais le respect dû à cette dimension qui nous dépasse.

Or dans ces contextes, réduire la vie humaine à une dimension qui n’aurait pas de sens au-delà de la matière confine l’existence humaine à une forme de désacralisation, à une perte totale de sens. Or nous comprenons le transhumanisme comme l’expression en réalité d’une désespérance et d’un rejet de la vie imparfaite, où devrions-nous plutôt dire le rejet de l’homme déchu. Le transhumanisme est la révolte de l’homme ne supportant plus d’avoir été déchu de sa condition originelle, il faut donc comme nous l’avions déjà exploré : orienter la recherche scientifique dans l’exploration de solutions qui auront pour objet de changer la nature de l’homme y compris de gommer toute empreinte d’un récit ancien qui le relierait à l’idée même de Dieu. Le transhumanisme veut pourvoir redéfinir la nature et franchir les Rubicon des lois naturelles, ainsi la conception génétique et eugéniste que se donne les tenants d’un post humanisme, légitime selon eux la désacralisation, la désacralisation est légitime du fait que la figure de la personne handicapée leur est insupportable. Dans ces contextes de corriger la nature de l’homme, il faut à tout prix fustiger dans le génome humain, le gêne délétère ou défectueux. Puisque la liberté du corps est proclamée, il faut au nom de ce principe de désacralisation, désacraliser la naissance et comme nous l’avions déjà écrit précédemment, puisque la procréation sexuée est associée à la mort, il convient alors de modifier le modèle de la naissance humaine en proposant une autre voie qui pourrait être celle de la réplication de l’être humain par voie de clonage ou bien si l’IA l’autorise répliquer l’identité du cerveau.

Menant une réflexion bioéthique dense à la suite de sa lecture de CS LEWIS l’homme aboli, Léon Kass Médecin et promoteur de l’éducation libérale, partagea sa grande perplexité concernant le devenir de l’homme dans ces contextes de désacralisation de la vie, s’interrogeant sur les perspectives qui se dessinent à moyen ou long terme pour l’être, ou j’oserai écrire à court terme, « L’homme restera-t-il une créature créée à l’image de Dieu, aspirant à se rapprocher du divin, ou deviendra-t-il un artefact créé par l’homme à l’image de Dieu-, suivant les seules aspirations de la volonté humaine ? ».

La réflexion de Léon Kass nous conduit à la réflexion qui sous-tend la « théologie » transhumaniste à savoir une vision exclusivement matérialiste de l’homme. En effet la thèse matérialiste qui a pleinement prévalu au XIXème siècle prétend que tout ce qui existe, est une manifestation « mécanique » et physique, que tout phénomène est le résultat d’interactions matérielles. Cette conception purement matérialiste de l’être humain défait ainsi la dimension ontologique, déconstruit cette part de sacré consacré à l’existence humaine. Il s’agit ainsi pour le transhumaniste d’abolir la notion de finitude qui caractérise l’homme, il convient dès lors de prendre en main sa destinée afin de ne pas l’enfermer dans les limites défectueuses et imparfaites du corps biologique pour en fin de compte arracher l’homme à l’ordre des lois naturelles.

Cette nouvelle métaphysique, cette conception anthropologique entend remettre en cause la vision essentialiste celle de la primauté de l’essence sur l’existence, en redéfinissant en conséquence les frontières du corps entre réparation et amélioration, entre thérapie et augmentation.

Cette désacralisation de l’être humain donne ainsi naissance à une nouvelle médecine, celle non de la réparation mais de l’amélioration dont l’objectif n’est plus de remédier à des formes de handicap ou de guérir des maladies, mais de bien modifier l’homme ou de l’augmenter en termes de performances physiques, cognitives…

Hippocrate partageait une vision de l’homme qui n’est pas celle des idéologies enfermant l’homme ou le réduisant à une vision matérialiste ; mécanique, la dignité de l’homme est au cœur du serment d’Hippocrate, la nécessité d’en prendre soin. La sacralité de la vie est soulignée dans le serment dont le texte devrait interpeller toutes les consciences alors que cette vie dans sa dimension intégrale est le sujet aujourd’hui de remises en question. Réduire l’homme ainsi à la matière conduirait inévitablement à violer l’esprit du serment d’Hippocrate. N’oublions pas que les Pères de l’église ont été largement imprégnés de cette vision associée au respect du malade, notamment le Didaché, ce premier document du christianisme primitif qui souligne amplement le respect de la vie soulignant qu’il y a une « grande différence entre le chemin de la vie et celui de la mort ».

Le combat engagé dans la doctrine matérialiste, promue par le transhumanisme n’est pas le combat de la vie, c’est même exactement l’inverse, puisque ce qui est réduit à la matière n’est pas l’émotion, la vibration de l’âme, ce pont vibrant qui le relie au vivant mais à une dimension qui transcende notre être tout entier. Comme l’écrit[1] Mario-Beauregard chercheure en neuroscience « En dépit de déclarations fracassantes dans les médias grand public, les nouvelles découvertes n’ont pas permis d’expliquer les concepts basiques tels que conscience, l’esprit, le soi et le libre arbitre. Les hypothèses qui réduisent l’esprit aux fonctions du cerveau ou contestent son existence même en sont restés à ce stade- d’hypothèses. Elle ne repose pas sur des démonstrations convaincantes mais sur le matérialisme de promesse contre ce que le philosophe Karl Popper nous a mis en garde ».

En effet pour Karl Popper philosophe des sciences faisait valoir que « L’Univers, nous paraît intuitivement relever de la causalité, d’un enchaînement de causes et de conséquences, comme s’il s’agissait d’une horloge. En réalité, il n’en est rien. Depuis la mécanique quantique de Broglie, nous avons appris que nous vivons dans un univers de probabilités, un univers créatif, non mécaniste, et qui est en expansion. Cet univers est donc fondé sur des événements qui ont été guidés par certaines probabilités. Mais ces probabilités sont en général inégales : les probabilités deviennent des propensions, les phénomènes ayant tendance à s’orienter spontanément dans une seule direction. Donc, Dieu joue bien aux dés, mais les dés sont lestés : physique et métaphysique sont par conséquent indissociables. » (Misère de l’historicisme)

Autrement dit Karl Popper souligne que nous sommes en réalité aux antipodes du déterminisme, que nous avons notre propre liberté, que l’univers a lui-même sa propre liberté, nous ne sommes ni mus, ni contraints, libres de choisir, libres de nous déterminer. La responsabilité individuelle est au cœur même de la vie, cette liberté de l’homme était au cœur de l’Eden, la liberté est une dimension de la sacralité, l’essence devrais-je écrire de la dimension sacrée de notre existence.

Or je prends conscience que nous entrons dans un monde qui entend nous soumettre à l’injonction de ses directives, du poids de ses normes. Comme je l’indiquais dans une conférence ayant pour sujet le transhumanisme ce sera l’éthique du bien faire et non l’éthique de faire du bien, l’éthique du bien faire, c’est celle de la norme qui s’impose pour réguler, l’injonction de la norme qui réduit finalement la dimension de l’intelligence relationnelle, fait de tâtonnements, d’avancées, d’échanges argumentés, de postures, de freins ou d’envies. Le transhumanisme a une vision sociale nécessairement aux antipodes de la liberté, c’est le contraire de la liberté, la liberté qui est l’essence de la sacralisation de la vie. La liberté n’est pas l’autonomie, la liberté n’est pas le relativisme, la liberté est du côté de la vie, la liberté est du côté du sacré, contre la dimension mortifère ou liberticide.

Lors d’une réunion dans les locaux de la vie associative  de Reims, une réunion sur le climat, je m’entretenais des solutions applicables localement et je croisais le regard d’une élève de science po Paris particulièrement brillante mais qui plaçait son discours sur un mode virulent et injonctif prétendant qu’il y avait aujourd’hui urgence de modifier les comportements, or le mode injonctif de son discours s’apparente à un exposé en réalité autoritaire, si certes, je peux comprendre l’urgence, la décision en réalité appartient à tout-à-chacun, de choisir de changer ou non de modèle, de comportement. Or il me semble que la liberté bonne ou mauvaise est bien une caractéristique de la liberté de l’être humain et fait partie de la sacralité de la vie.  La vie ne se gouverne pas avec le monde des normes, la vie est fondée sur l’échange et le relationnel, la sacralité de la vie est dans la dimension de l’échange, du partage, de l’éveil de la conscience.

La sacralité de la vie humaine, se résume selon moi par ce commandement[2] que Jésus considérait comme étant le plus grand. « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée. C’est le premier commandement et le plus grand. Et voici le deuxième, qui lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. ».

La sacralité de la vie doit être motivée par notre amour pour Dieu et pour les autres. Nous aimerons notre prochain et nous en prendrons soin (Galates 6.10, Colossiens 3.12-15), nous porterons secours à la veuve et l’orphelin, aux malades et aux laissés pour compte et nous ferons preuve de disponibilité pour protéger les autres contre toute forme de mal, qu’il s’agisse de l’avortement, de l’euthanasie, du trafic de personnes ou toutes les formes d’abus qui violeraient la dimension de la dignité. « La sacralité de la vie humaine peut être le fondement de nos actes, mais l’amour doit en être la motivation ».

[1] Citation extraite du livre « Du cerveau à Dieu » Editeur Guy Trédaniel éditeur. Page 151

[2] Bible évangile de Matthieu chapitre 22. Versets : 37- 39

Le transhumanisme c’est quoi au juste ?

La civilisation du laisser faire, le nouvel âge d’or, le monde sans limites, la civilisation sans curseur ou tout demain deviendra possible [Lire ce manifeste transhumaniste : https://iatranshumanisme.com/wp-content/uploads/2015/10/le-transhumanisme-prochaine-c3a9tape-de-la-civilisation.pdf ] ….  Une vidéo à voir pour comprendre les enjeux du post humanisme !

Gattaca : En route pour l’extravagance et la démesure de l’homme.

Comment ne pas songer dans ces nouveaux décors façonnés par le Transhumanisme à ce film qui nous projette dans un futur « Bienvenue à Gattaca ». « Bienvenenue à Gattaca » est un film de science-fiction qui n’utilise pas les codes du genre avec comme arrière-plan les effets spéciaux et des objets extravagants. Le film met plutôt l’accent sur une cité scientifique, un centre d’études et de recherches spatiales pour des jeunes gens au patrimoine génétique quasi parfait ! L’univers architectural de la cité scientifique ou évolue des hommes surfaits se caractérise par des lignes droites, des courbes parfaites, épurées, des décors comme l’escalier de forme hélicoïdale qui rappelle la structure de l’ADN. La cité scientifique et futuriste évolue dans un univers sans couleurs, sans réels contrastes, ou le déterminisme génétique triomphe, concevant des humains biologiquement sans défauts. Le centre de recherches est peuplé d’hommes et de femmes désincarnés, déshumanisés anonymes, comme mécanisés, surveillés, contrôlés. Des êtres surdoués aux capacités cognitives exceptionnelles, conçues par la génétique moderne, mais les visages sont énigmatiques, sans âmes, placides ils se croisent sans se rencontrer sans échanger, ils sont identiques, ils sont indifférents.

 Un texte

de

Eric LEMAITRE

 Le monde est traversé par de multiples feux et incendies, c’est toute la biodiversité qui est en péril :

  • la faune et la flore sont déstabilisées,
  • les ressources énergétiques ne sont pas inépuisables,
  • les écosystèmes sont fragilisés par les déséquilibres.

Nous ne sommes pas loin d’une faillite généralisée et cette faillite est autant économique, sociale et climatique. Jamais, il n’y a eu autant de corrélations entre différents phénomènes qui par leur conjugaison peuvent entraîner des maux irréversibles pour une grande partie de notre humanité.

Ainsi des pans entiers de notre environnement se délitent, s’étiolent, disparaissent, tous les instruments qui examinent la terre, la mesurent, convergent avec le même diagnostic, la planète s’est embrasée. Les catastrophes même les plus apocalyptiques ne sont plus inenvisageables. Pourtant les cassandres ne sont pas ou peu écoutées, souvent raillées, taxées de radicales, d’extrémistes. L’homme est devenu le premier prédateur des espèces et de la nature depuis la chute, depuis le jardin d’Eden ou il en a été chassé.

Plutôt que de se ressaisir, l’homme continue de se projeter dans les rêves les plus fous ou les folies les plus insensées. Parmi ces rêves, celles notamment d’artificialiser la nature, de la régénérer via les nanotechnologies, d’inventer de nouveaux artefacts ou artifices pour suppléer les limites physiques ou les facultés psychiques du genre humain.

Plus que Jamais, les démons qui sommeillaient dans le cœur de l’homme se réveillent et lui donnent un regain de désir de jouvence, cette volonté de faire disparaitre à tout prix la mort comme s’il fallait imaginer que le Diable dans le Jardin d’Eden n’avait pas tout à fait tort :

« Genèse 3.4 « Alors le serpent dit à la femme: Vous ne mourrez point; mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et que vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal »

Il faut pour ces nouveaux docteurs Folamour, oublier le corps ou vanter sa plasticité, inverser les rapports au vivant, vaincre les contingences d’un réel qui condamnent l’espèce humaine

Parmi

les projets délirants de ces nouveaux savants fous:

celui de

  • rapprocher le vivant et la technique,
  • de fusionner cerveau et machine,
  • celui d’implémenter le cerveau humain, le reprogrammer afin d’augmenter ses facultés cognitives.

Ce fameux docteur Folamour qui est en l’occurrence une pure fiction aspirait à sauver l’humanité.

Avec la société Google se rejoue la scène du savant fou en répliquant la scène déjà jouée, il s’agit pour une des sociétés du numérique l’une des quatre de ce fameux GAFA (Google, Apple, Face Book, Amazon) de sauver l’humanité de sa mortalité promise et d’augmenter la performance cognitive de l’homme.

Dans des contextes de mutation climatique, technologique et d’un monde consumériste qui domine nos manières d’agir et de vivre, l’encyclique « Laudato Si’ » du Pape François expose les convictions portées par l’église catholique.

Face à une modernité hors sol, ce monde n’est plus ancré dans un rapport au réel, ce monde post moderne aspire à des rêves déconnectés de tout rapport aux dogmes de la religion, à une dématérialisation des biens, une désincarnation des relations. La modernité veut ainsi s’ouvrir de nouvelles perspectives en étant dans le déni du réel comme si la modernité voulait aujourd’hui s’arracher de ses limites, de son univers incarné.

Que nous soyons catholiques ou non, la dernière encyclique du Pape François mérite d’être lue, tant son contenu est profondément réfléchi, interpelle à l’urgence d’une réflexion de tous relativement à l’évolution des techno sciences, à l’ensemble des mutations scientifiques et technologiques dont les répercussions se font déjà ressentir dans notre quotidien.

L’encyclique évoque les relations, les interactions de plus en plus prégnantes entres les technologies et nos modes de vie. La lettre du Pape François pointe l’émergence de techno structures deshumanisantes, la conviction que les connexions entre les êtres humains et les technologies se font plus pesantes que jamais, « tout est lié dans le monde ». La lettre écrite par le Pape François est ainsi une analyse critique du nouveau paradigme imposé par le monde des technosciences et au-delà « des formes de pouvoir qui dérivent de la technologie ».

Bien que l’encyclique ne fasse pas du Transhumanisme le cœur de son sujet, nous avons noté qu’implicitement cette lettre en faisait indirectement référence, c’est pourquoi nous souhaitions l’évoquer dans cette chronique.

Nous souhaitons ici informer,

avertir, pour anticiper les orientations qui se dessinent d’ores et déjà.

Au fond il s’agit de lancer une démarche d’alerte, d’éveil des consciences, de saisir qu’y compris dans le quotidien, les objets qui nous entourent peuvent être aussi des environnements qui constituent autant de marqueurs d’une époque qui peu à peu en raison de leur emploi addictif, nous habitue à de nouvelles servitudes, comme si ces objets étaient des nécessités quasi vitales.

Ces objets de « la modernité numérique » nous lient demain aux projets d’une société virtuelle et deshumanisante qui ne fait plus de l’homme dans sa dimension ontologique, un être incarné dont il conviendrait de prendre soin, un être d’abord de relations et non une matière connectée à d’autres matières.

Je crois en effet qu’indiscutablement nous sommes comme conditionnés par les objets et des techniques qui nous sont devenus si familiers. A travers ces objets nous avons fini par nous habituer à leurs contacts, à devenir leurs sujets et demain totalement asservis, assujettis sans que nous ayons la volonté de nous en défaire, de nous affranchir.

Ces objets qui incarnent notre modernité, nous emprisonnent et nous rendent dépendants ! Je crois en effet que nous sommes arrivés au point d’être fascinés, que le pouvoir de séduction de ces objets, naturellement ces objets sont comme des leurres et tromperont bon nombre d’entre nous. Qui en effet n’a pas tel ou tel objet numérique (portable, ordinateur, appareil photo) chez lui et ne soit pas tenté par les dernières évolutions technologiques, le confort apporté par ces nouveaux environnements de notre consommation.

L’une des dérives de ce pouvoir technologique étant ce besoin irrésistible, implacable d’accroitre sa puissance de divertissement, de savoir, de contrôle, d’augmenter sa capacité de servitude sur le monde, de faire également reculer les limites biologiques de l’homme qui l’ont enfermé jusque-là dans une forme de vulnérabilité, de fragilité qu’incarne la mortalité.

Ainsi l’encyclique résume les nouveaux enjeux terrifiants d’une « science sans conscience », les enjeux sont illustrés par ce propos extrait de la lettre écrite par le Pape François :

« …Nous ne pouvons pas ignorer que l’énergie nucléaire, la biotechnologie, l’informatique, la connaissance de notre propre ADN et d’autres capacités que nous avons acquises, nous donnent un terrible pouvoir. Mieux, elles donnent à ceux qui ont la connaissance, et surtout le pouvoir économique d’en faire usage, une emprise impressionnante sur l’ensemble de l’humanité et sur le monde entier. Jamais l’humanité n’a eu autant de pouvoir sur elle-même et rien ne garantit qu’elle s’en servira toujours bien, surtout si l’on considère la manière dont elle est en train de l’utiliser ». 

C’est le mot emprise qui est saisissant comme l’expression d’une possession d’un nouveau territoire qui s’offre désormais à l’homme, la conquête n’est plus géographique, la conquête s’inscrit désormais dans le champ de l’esprit, il appartient à l’homme de dépasser tout à la fois ses limites mais aussi de transcender les frontières qui l’ont jusqu’alors enserré. La technologie est le recours, comme une forme de pouvoir qui s’offre à l’homme désormais pour dépasser la finitude de l’existence humaine, l’infirmité biologique de l’homme.

La technologie est sur le point de revêtir une fonction idéologique et cette fonction idéologique est portée par le Transhumanisme,

…..un mouvement culturel très actif pour prôner le dépassement de l’homme emmuré dans sa finitude et d’abord sa mortalité.

Il faut ainsi pour ce mouvement permettre à l’homme d’échapper à sa souffrance comme le rappellent Geneviève Ferone et Jean-Didier Vincent dans leur remarquable livre, Voyage en Transhumanie, en citant Freud le Père de la Psychologie moderne qui mettait en évidence les sources des tourments qui pèsent sur la condition humaine « La puissance écrasante de la nature, la caducité de notre propre corps, et l’insuffisance des mesures destinées à régler les rapports des hommes entre eux que ce soit au sein de la famille, de l’état ou de la société ».

Le Transhumanisme est ainsi cette idéologie méconnue de beaucoup qui fondée sur une nouvelle matrice, celle d’une toute-puissance prométhéenne, une puissance sans limites, de nouvelles facultés démiurgiques données à l’homme, dont les pouvoirs étendus ne se donnent aucune frontière pour renverser les représentations ontologiques qui ont été jusqu’alors les nôtres.

L’un des thèmes, débattus par l’idéologie transhumaniste touche notamment à l’allongement infini de la durée de la vie, l’émergence d’une nouvelle post humanité, la fusion hybride des hommes et des machines.

Dans le monde c’est la société Google qui est porteur de cette idéologie transhumaniste et comme nous l’avons précédemment écrit, ces idéologues rêvent d’une humanité enfin débarrassée de ses dogmes, de ses vérités qui l’enfermaient jusqu’alors dans un réel construit autour de la finitude, la fragilité, la vulnérabilité.

Nous comprenons alors que cette société qui se dessine à travers Google, nous projette dans une société mutante, une véritable révolution, un changement de paradigme. Dans cette société transhumaniste il s’agit ni plus moins que de proposer un homme immortel, mais également un homme augmenté. Le rêve du Transhumanisme c’est un homme qui ne meurt pas. L’homme décidant de cesser d’être une créature mortelle et maudite en quelque sorte depuis le jardin d’Eden et décidant de prendre son destin en main « Devenir lui-même Dieu ».

Citant à nouveau, les auteurs du livre « Bienvenue en Transhumanie » le monde est entré dans de fortes turbulences, de toute l’histoire technologique nous prenons conscience aujourd’hui que l’humanité détient une puissance technologique inégalée, que les « forçages technologiques » organisées nous permettent de reculer les limites qui ne sont pas éloignées des projections les plus futuristes de la science-fiction.

Dans ces contextes d’idéologie transhumaniste la fameuse Silicon Valley est devenue mégalomaniaque, démiurgique. C’est dans le cœur même de la Silicon Valley que se construit une nouvelle idéologie dont la matrice est la négation de Dieu « Dieu n’existe pas, Dieu c’est nous, augmentés par les nano-bio-technologies ». Le Dieu qui est annoncé est « l’homme 2.0 » selon l’expression même des nouveaux idéologues et sorciers de San Fransisco. L’homme 2.0, ce sera l’homme hybride avec l’intelligence artificielle, l’homme rendu immortel grâce aux nano-bio-technologies.

Mais comme le souligne l’auteur de l’excellent article « Que cache la Nébuleuse transhumaniste ? » Mathieu Dejean « Ces mystérieux apprentis sorciers qui conjuguent au futur le conditionnel des romans de science-fiction sont philosophes, ingénieurs et biologistes, ils partagent un même diagnostic : le progrès exponentiel des sciences et des techniques, et la convergence technologique des NBIC, ces derniers mettent le présent sous la pression du futur. » Les plus extrémistes de cette mouvance culturelle du Transhumanisme, annoncent l’avènement de la “singularité”, c’est-à-dire le point de rupture qui verra l’humanité basculer et les intelligences artificielles prendre en charge elles-mêmes l’innovation, le développement des améliorations touchant la santé, la technologie, la vie sociale, la surveillance.

Dans ces contextes transhumanistes et croyance sans limites dans le progrès, Google déploie des algorithmes complexes, s’emploie à développer, à améliorer l’ensemble des processus techniques touchant l’intelligence artificielle faible. L’intelligence artificielle faible se définit comme une suite d’opérations élémentaires qui permettent de résoudre un problème, un calcul. Sur la base de ces algorithmes, le processeur ainsi programmé est capable d’effectuer des opérations avec une grande vitesse, de stocker et manipuler des volumes considérables de données, l’intelligence artificielle devient ainsi un incroyable auxiliaire aux capacités de calcul illimités qui contraste forcément avec les capacités limitées, définissant aujourd’hui les capacités cognitives de l’être humain.

La programmation à partir de ces algorithmes permet ainsi à l’homme de plus avoir recours à des tâches en mobilisant ses propres ressources cognitives, les tâches qu’il accomplissait peuvent être désormais exécutées par des systèmes de plus en sophistiqués, de plus en plus performants.

Ainsi poser un diagnostic sur un cancer pourra être valablement fait à terme par une machine de par ses capacités à terme à contrôler l’ensemble du génome humain. Dans le monde des Jeux d’échecs nous savons que la puissance des processeurs d’aujourd’hui et la sophistication des programmes, que ce ne sont une dizaine de coups d’avance que calculent les meilleurs ordinateurs en quelques minutes mais plus d’une vingtaine dans un horizon temps extrêmement court, et qu’il impossible à l’homme le plus surdoué de vaincre les capacités techniques d’une super structure qui stocke en mémoire des milliards de combinaisons possibles et les évalue à une vitesse prodigieuse…

Un robot commandé à distance ou non pourrait également intervenir sur des opérations chirurgicales (c’est de l’intelligence artificielle faible), demain le projet de la voiture google qui nous pilote sans que nous ayons besoin d’intervenir n’est plus un projet inimaginable….

Le rêve de Google est de doter l’homme de nouvelles capacités, de suppléer à ses insuffisances, de rapprocher l’homme de la machine, de les fusionner. Comme l’écrivent les auteurs de « Bienvenue en Transhumanie », « le temps est venu pour l’apprenti sorcier) de devenir sorcier (nous faisons référence à la société Google. Pour cela il lui faudra s’affranchir de règles de bon sens élémentaires, cultiver l’art du déni, faire vœu de bricolage et à défaut posséder toutes les clés de la connaissance, tordre le cou aux considérations éthiques »… J’ajoute s’asseoir sur l’encyclique, sur la Bible et ses avertissements répétés concernant la tentation de l’homme de devenir lui-même Dieu.

Ainsi le sorcier ou la nouvelle bête en rapprochant l’homme et la machine, en les connectant, aspire à intégrer au corps et au cerveau humain des éléments d’intelligence artificielle, comme une mémoire étendue ou un « moteur de recherche » intégré, par exemple. Plus besoin finalement de faire l’effort de mémoriser, Wilkipédia auxiliaire de notre cerveau, serait inséré sous forme d’une puce discrète pour augmenter nos performances et épater nos amis qui eux-mêmes rivaliseront de leurs connaissances artificielles. L’avènement du surhomme est à nos portes !

Mais le projet de Google n’est pas l’intelligence artificielle faible ou la création de supports augmentant « la connaissance du bien et du mal » mais bien l’intelligence artificielle forte, la machine dotée d’un libre arbitre, « de conscience…. ? ».

Dans cette chronique je fais appel à un ami Philosophe, Chrétien lui-même engagé dans ce combat contre les idéologies ambiantes, contre les formes de régression engagées, de déconstruction de l’homme tel qu’il est.

Alors j’ai posé cette question à cet Ami que j’appellerai Philippe Nicodème et je l’ai sollicité sur cette dimension transhumaniste touchant l’intelligence artificielle, ce qu’il pensait de cette distinction entre « Intelligence artificielle Faible et intelligence Forte »

Je reprends les propos de Philippe qui nous partage sa lecture sur la distinction entre intelligence artificielle et forte « Une réserve de fond sur la distinction « intelligence artificielle faible » et « intelligence artificielle forte ». La première est un état de fait et elle existe depuis longtemps ; elle est infiniment plus puissance que la puissance de calcul d’un cerveau biologique humain ; la seconde (intelligence artificielle forte) est un POSTULAT. Rien ne dit ni ne montre qu’un machine puisse accéder à la conscience.

Je renvoie pour cela à la distinction que fait Pascal sur les trois ordres incommensurables (matière / intelligence / amour) : avec de la matière, on ne fait pas de l’intelligence, pas une once ; avec toute l’intelligence du monde, on ne peut pas faire un peu d’amour, pas une once non plus. Bergson aussi, dans l’énergie spirituelle, montre la dissymétrie matière pensée en disant que, s’il y a un lien entre cérébral et mental, depuis la cartographie du premier, on ne peut redessiner les pensées mentales.

Autrement dit, l’hétérogénéité radicale matière-esprit ne permet pas d’espérer qu’un jour, contrairement à ce que prétendent les sorciers transhumanistes, des ordinateurs, capables d’automatismes hallucinants (comme la google) car ces transhumanistes rêvent en pensant que l’on aura un jour de l’intelligence artificielle forte. Je ne dis pas qu’on n’y arrivera jamais ; ce que je veux dire, c’est que, comme pour le vivant, il faut déjà de la vie pour répéter du vivant; de même pour la pensée, il faudra déjà de la pensée consciente pour espérer l’augmenter. Mais de la matière seule, on ne pourra pas générer un souffle de pensée consciente : ça, c’est dans l’imagination des scientifiques qui devrait faire un peu plus de métaphysique plutôt que de rêver comme des gamins à une immortalité qui n’aurait aucun sens…. » 

Malgré les réserves formulées par le Philosophe, il n’est pourtant pas contestable que nous sommes « en route pour la démesure » avec cette volonté de redresser, de corriger notre sortie du Jardin de l’Eden, comme s’il fallait retrouver le chemin de l’éternité mais dans cette course folle vers un progrès sans conscience, n’est-ce pas la figure de la Bête qui se dessine subrepticement …. ! L’homme prométhéen devenu son propre Dieu. « Saurons-nous entendre ces signaux qui nous alertent sur les formes extravagantes du « progrès » ? » Propos du sociologue Yves Darcourt Lézat.

Pour conclure notre analyse sur cette dimension d’une nouvelle ère que franchit notre humanité en ouvrant de nouvelles perspectives pour refondre l’homme à travers l’idéologie Transhumaniste, nous insisterons sur trois points, points qui ont été partagés avec Charles-Eric de Saint Germain, Professeur de Philosophie et auteur de nombreux livres :

Le premier point concernant l’approche de cette idéologie est la focalisation de cette dernière sur l’augmentation de la puissance de calcul, la performance cognitive de l’homme (l’homme amélioré, l’homme augmenté), mais qui ne dit rien (ou pas grand chose) de la dimension spirituelle, de l’émotion, et du sens de la vie. Au fond l’homme augmenté reste profondément vide, que lui donnera-t-on comme supplément d’âme ?

« C’est le signe d’une utopie scientiste qui participe de l’idéologie scientiste, laquelle privilégie le mesurable et l’objectivable sur la qualitatif et l’interrogation sur le sens de la vie » comme l’écrit Charles Eric de Saint Germain. L’âme de l’homme qui le définit comme vivant se dérobe finalement, La vie est totalement occultée, comme broyée par la machine dont il pourrait être à terme qu’un simple auxiliaire. Ainsi le besoin de possession est sans nul doute une maladie incurable de l’âme, un cancer qui ronge le bonheur d’être au contact d’un jardin, le toucher, le contact qui restitue, une impression, une sensation, une émotion. Cet homme augmenté est loin des émotions et ces émotions qui tiennent justement à sa fragilité, ses limites, sa vulnérabilité.

L’avènement de l’homme augmenté :

  • n’était-il pas dans le jardin d’Eden avec le premier acte de transgression (consommer le fruit de la connaissance du bien et du mal) ?
  • n’était-il pas caressé dans les rêves du Philosophe Nietzche, l’avénement du surhomme, son avènement n’était-il pas implicitement contenu dans l’idéologie Nazie… ?

Mais un tel événement ne doit-il pas nous amener à craindre des risques sur le plan social: « L’amélioration artificielle de l’homme ne risquerait-elle pas de devenir une norme imposée directement ou indirectement par les employeurs, l’école ou le gouvernement. » Ne saurions nous pas alors confronté à un nouvel ordre social aux caractéristiques eugénistes « une société de la performance de forme eugéniste » ? Comme l’écrit également Florina KUNCKLER.

Le deuxième point est celui de l’émergence de la norme susceptible de réguler les formes de dopages techniques, les fonctions attribuées pour améliorer les performances humaines ? Serons-nous dotés des mêmes pouvoirs ? Quelle gouvernance décidera de la gestion de ces mutants ?

Cette société transhumaniste régulera-t-elle la gestion de la performance et comment ? Quels seront ces critères de répartition ?

L’autre danger souligné par Charles-Eric de Saint Germain « est celui qui tient à l’uniformisation de la société selon des normes de perfection génétique qui, d’une part, sont relatives à une époque donnée et qui, d’autre part, aboutissent à nier le fait que la diversité (et non l’uniformité) est source de complémentarité, de richesse et de progrès ».

Ici, sous couvert de progrès, il s’agira d’ »uniformiser » les gens en les soumettant à des normes d’amélioration, mais cela va aboutir dans les faits à une régression, et non à un véritable progrès, qui ira dans le sens d’une mécanisation et d’une perte de sens confinant à l’absurde.

Comment ne pas songer dans ces nouveaux décors façonnés par le Transhumanisme à ce film qui nous projette dans un futur « Bienvenue à Gattaca ». « Bienvenenue à Gattaca » est un film de science-fiction qui n’utilise pas les codes du genre avec comme arrière-plan les effets spéciaux et des objets extravagants. Le film met plutôt l’accent sur une cité scientifique, un centre d’études et de recherches spatiales pour des jeunes gens au patrimoine génétique quasi parfait ! L’univers architectural de la cité scientifique ou évolue des hommes surfaits se caractérise par des lignes droites, des courbes parfaites, épurées, des décors comme l’escalier de forme hélicoïdale qui rappelle la structure de l’ADN. La cité scientifique et futuriste évolue dans un univers sans couleurs, sans réels contrastes, ou le déterminisme génétique triomphe, concevant des humains biologiquement sans défauts. Le centre de recherches est peuplé d’hommes et de femmes désincarnés, déshumanisés anonymes, comme mécanisés, surveillés, contrôlés. Des êtres surdoués aux capacités cognitives exceptionnelles, conçues par la génétique moderne, mais les visages sont énigmatiques, sans âmes, placides ils se croisent sans se rencontrer sans échanger, ils sont identiques, ils sont indifférents.

Des citoyens dociles, comme pilotés par la servitude d’un système qui les transforme en subordonnés, en disciplinés totalement soumis à des taches bien ordonnées pour garantir la cohésion sociale de l’ensemble.

Le film a vocation à éveiller la conscience, ce film n’a peut-être rien d’utopique, il est aisé de comprendre que la trame d’un monde docile et indifférenciée, une société qui va vers l’uniformisation est une projection transposable à une réalité qui se dessine subrepticement, où tout ce que l’on voit est incontestablement transposable, des ambiances architecturales jusqu’aux idéologies qui portent intrinsèquement les dangers et les limites de la génétique moderne, du Transhumanisme.

Le Transhumanisme en mécanisant l’homme réduit sa part de lui-même l’atrophie de son identité qui est sa chair. Dans ces contextes de Transhumanisme, la chair serait potentiellement aliénée, comme anéantie. Or ce qui fait la beauté chez l’homme, c’est bien :

  • cette vulnérabilité qui le caractérise,
  • cette capacité relationnelle qu’il doit déployer pour survivre,
  • cette émotion pour coloriser la vie,
  • ces contacts, pour créer du sens à ses engagements
  • ces limites qui lui font dessiner le réel afin de comprendre qu’en tout il est un être mortel.

3) Enfin, et c’est le dernier point que nous traitons nous retrouvons dans ce projet transhumaniste qui est au cœur de toutes les idéologies totalitaires : la création d’un homme nouveau ou d’un surhomme. Par contraste, le christianisme affirme que seul Dieu peut faire un homme « réellement nouveau ». En voulant soi-même se faire Dieu, l’homme va au contraire y perdre son humanité, au sens moral du terme.

Or l’évangile nous propose …

  • non la figure d’un homme augmenté mais celui d’un homme régénéré,
  • non connecté à la matière, mais relié à l’esprit de Dieu.

L’homme selon l’évangile de Christ n’est pas amélioré, mais il est transformé par la grâce, par l’amour, par la relation avec son créateur, renouant ainsi le contact dans une dimension verticale, nourrie par la diversité, la différence et la complémentarité éloigné de toute idée d’uniformiser et de robotiser l’homme.

Note : NBIC est le label qui désigne aux Etats-Unis les nanotechnologies, les biotechnologies, les technologies de l’informatique et les sciences cognitives)

La révolution génétique ou le nouvel Eugénisme

Dans le contexte d’un monde social envahi par un consumérisme progressiste, ces idéologies d’hier, que l’on croyait en définitive à jamais éteintes, ressurgissent sous la forme d’un être bestial, revêtu d’un masque d’agneau ! C’est ainsi qu’avec les avancées des techniques de procréation médicalement assistée, et la possibilité de déceler sur l’embryon ou le fœtus, les anomalies génétiques, est évoqué le « retour de l’eugénisme », un eugénisme plus angélique, plus doux forcément !

Un texte de Eric LEMAITRE

avec les contributions de Jérôme SAINTON Docteur en Médecine et Claude BOUCTON

La révolution

génétique

ou le nouvel Eugénisme

 

L’Eugénisme, l’idéologie transhumaniste

auréolée aujourd’hui d’humanisme

L’eugénisme qui fut jadis une théorie scientifique visant à intervenir sur le patrimoine génétique de l’espèce humaine, engendra hier la pire monstruosité que connut l’humanité, avec la montée de l’idéologie Nazie. Pourtant l’idéologie eugéniste refait bel et bien surface, cette hydre que l’on croyait définitivement éteinte, s’est enveloppée d’un nouvel habit plus convenable, d’une apparence séante.

Ainsi les idéologies barbares combattues hier, continuent d’avancer dans les esprits de manière plus subtile, ce que certains ont qualifié de « monstre doux », nouveau spectre qui avance, masqué, auréolé d’humanisme, mais au demeurant terrifiant.

Ce monstre doux que décrivait Alexis d’Alexis de Tocqueville « un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. Il est absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance; il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages; que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre? ».

Dans le contexte d’un monde social envahi par un consumérisme progressiste, ces idéologies d’hier, que l’on croyait en définitive à jamais éteintes, ressurgissent sous la forme d’un être bestial, revêtu d’un masque d’agneau ! C’est ainsi qu’avec les avancées des techniques de procréation médicalement assistée, et la possibilité de déceler sur l’embryon ou le fœtus, les anomalies génétiques, est évoqué le « retour de l’eugénisme », un eugénisme plus angélique, plus acceptable forcément !

Si les pro GPA et PMA se défendent en dénonçant un pur fantasme, se moquant de l’accusation de pratiques qui ne s’éloignent pas des idéologies eugénistes, il importe que ces derniers reconnaissent que l’apparition et l’évolution de techniques de plus en plus sophistiquées, conduisent nécessairement à développer les pratiques eugéniques. Après les infanticides connus au cours de l’histoire, ou ceux qui épisodiquement sont relatés dans les actualités, l’interruption de grossesses ou le fœticide sélectif ont été largement prescrits après l’épisode de la tragédie de la Seconde Guerre mondiale. Le fœticide sélectif s’est imposé dans les esprits avec les nouvelles capacités techniques de diagnostic génétique (analyse chromosomique), ou morphologique (échographie), sur le fœtus. Enfin, comme le rapporte le biologiste Jacques Testart[1] « la conjonction de la fécondation hors du corps (1978) et de l’examen de l’ADN embryonnaire (1990) a permis de développer le diagnostic préimplantatoire (DPI) sur les embryons issus de la fécondation in vitro (FIV) depuis les années 1990 ».

Subrepticement, l’idée d’une sélection des êtres humains dès leur naissance, gagne les esprits. Lorsque l’expression de société eugéniste est utilisée, l’usage de ces mots suscite une opposition vive, targuant souvent ceux qui utilisent ces termes, de communiquer une pure invention, dénigrant le progrès ou s’opposant à toute forme d’égalité. Pourtant nous sommes bel et bien arrivés à une conception eugéniste de la société, lorsque notamment le dépistage est proposé aux femmes enceintes, pour détecter d’éventuelles anomalies, et proposer ainsi aux mères, l’interruption de leur grossesse. A ce jour, il importe de porter à la connaissance de chacun, que tous les fœtus trisomiques ont quasiment fait l’objet d’une interruption de grossesse. Ainsi au cours de ces dernières décennies, le dépistage de la trisomie 21 a connu un essor indéniable, avec un taux de couverture croissant de femmes enceintes demandant un diagnostic prénatal, ce qui a eu pour résultat, une très importante augmentation du nombre d’amniocentèses, une procédure médicale invasive utilisée lors du diagnostic prénatal.

Sur un plan sociologique, toutes les dernières enquêtes d’opinion révèlent que les femmes sondées reconnaissent qu’elles choisiraient d’éliminer un fœtus ayant été diagnostiqué comme trisomique. Or avec l’avènement d’une société orientée vers la performance, l’image de soi, c’est un monde profondément consumériste qui aspire dès lors à un bien-être idéalisé, et à un enfant idéal indemne de toute anomalie génétique.

La fragilité d’un enfant différent des autres, constituerait pour beaucoup, et dès lors, dans l’imaginaire social, une charge insurmontable pour les parents. Cette idée d’accueillir, puis d’accompagner, un enfant avec un handicap, devient, hélas et bien souvent, une idée intolérable. Cela en dit long sur les mutations sociales mortifères que nous vivons aujourd’hui dans ces contextes idéologiques, où les tenants d’un darwinisme social, ne rencontreraient plus à terme d’opposition. Dans un futur proche nous pourrions ainsi accepter « la sélection des plus aptes ».

Implicitement, avec les progrès de la techno science, les avancées techniques conduiront certainement à un déplacement de la dimension de l’accueil et du don de l’enfant, vers une notion de désir d’enfant et d’un désir choisissant ce que devra être cet enfant, répondant ainsi parfaitement aux normes et conventions sociales. Cette dimension que nous décrivons est bien souvent objectée, or l’empreinte consumériste progresse dans les mentalités au fur et à mesure que les conceptions matérialistes de la vie avancent, de fait l’idée de choisir un embryon sain peut conduire demain au choix d’un embryon ne présentant certes aucune anomalie mais dont le désir est aussi qu’il soit doté de caractères répondant aux désirs des parents si l’offre médicale le permet. Rappelons qu’en France la loi bioéthique encadre rigoureusement à ce jour les pratiques génétiques, le diagnostic préimplantatoire est ainsi autorisé quand l’un des parents peut transmettre une maladie génétique grave. Nonobstant rien interdit d’imaginer,  un futur plus laxiste moins préventif et passant par-dessus les lois morales.

L’eugénisme dans l’histoire

Le mot Eugénisme, est inévitablement associé à l’idéologie Nazie, qui fut à son paroxysme, l’expression d’une idéologie foncièrement anti humaine. Pourtant, l’eugénisme, qui signifie littéralement, bien naître, s’est défini au fil du temps, à la fois comme une méthode et comme une pratique visant à surpasser le patrimoine génétique initial de l’espèce humaine. La pensée eugéniste est pourtant très ancienne, il faut remonter à plusieurs millénaires, à l’époque où Pharaon entendait organiser le meurtre des enfants hébreux mâles, afin d’éviter que les Hébreux ne deviennent trop nombreux[2]. La Grèce Antique fut le témoin de l’élimination des enfants faibles, qui ne pouvaient que constituer une charge pour la société. A Sparte, ancienne ville du Péloponnèse, les anciens examinaient les aptitudes de l’enfant nouveau-né, et s’ils estimaient que l’enfant fût trop faible, vulnérable, ils le faisaient jeter dans un gouffre appelé « les Aphotètes ». Un enfant chétif, selon la conception et l’idéologie répandue à Sparte, ne devait pas à cette époque, être une charge pour la cité.

Il n’est pas contestable que le christianisme a combattu au sein de la société, une forme de rejet du plus fragile, et que de fait, l’Évangile constituât une forme de rempart à toute tentative de rejet du plus faible. Mais au cours du XIXe siècle, l’idée de laisser faire une sélection naturelle au sein de la société, gagna les esprits. Albert Spencer, sociologue et philosophe anglais, défendit en effet une forme de philosophie évolutionniste, il fut très tôt identifié comme l’un des principaux défenseurs de la théorie de l’évolution au XIXe siècle, avec Charles Darwin. Sociologue, Spencer conçut la société comme un ensemble, une organisation qui sélectionne naturellement les plus aptes, il est par ailleurs l’auteur même de cette expression « Sélection des plus aptes ».

L’eugénisme est une approche idéologique, qui fut développée par Francis Galton, un cousin de Charles Darwin. L’un et l’autre, ont tenu des thèses, qui en leur temps ont bousculé les conceptions, qui étaient jusqu’à présent, associées au monde du vivant.  Charles Darwin entendait donner une explication théorique de l’hérédité des caractères acquis par les espèces, et concluait à l’évolution naturelle des espèces. Francis Galton anthropologue, pionnier de la biométrie, et brillant statisticien, souligne le rôle primordial et prédictif des facteurs héréditaires, jouant un rôle corrélatif dans la détermination des différences individuelles. Francis Galton promouvait les concepts de race inférieure et supérieure, même s’il fallait recontextualiser les positions idéologiques de l’anthropologue, il convient cependant de souligner que Galton fera valoir l’hérédité des qualités intellectuelles et des qualités physiques, ceci lui donnant à penser, selon Dominique Aubert-Marson[3] Biologiste et chercheur, « que l’appartenance à une « race douée » (nature) joue un rôle majeur, l’environnement (nurture) jouant un rôle mineur… »

Etrange destin de deux hommes et de même parenté, Charles DARWIN et Francis Galton dont les idéologies furent finalement assez proches, l’un défendant la sélection naturelle, et l’autre la sélection sociale.

Relativement à l’analyse sociale, Galton eut recours à la courbe de Gauss pour classer les individus et repérer non pas « l’homme moyen », mais « l’homme génial », puisque c’est ce dernier qui évolue vers l’être parfait, la visée nécessaire de sa politique eugéniste. Nous comprenons mieux, comment une telle thèse mortifère a ainsi influencé des conceptions idéologiques dévastatrices, et marqué indélébilement le XXème d’une noirceur à la fois ineffaçable, et d’une odeur nauséabonde.

Le génie génétique

au service du nouvel eugénisme

Dans la période contemporaine, les progrès du génie génétique et le développement des techniques de procréation médicalement assistée, ont ouvert de nouvelles perspectives et possibilités médicales.  Avec le transhumanisme, s’ouvrent littéralement de nouveaux enjeux.

En effet, les transhumanistes accréditent l’idée, que le génome humain n’est finalement que le reflet d’une forme de programmation. Certes le génome est immensément complexe, mais la technoscience s’est employée à le décoder, à le manipuler, à le décrypter. Reprogrammer l’humain, ne relève plus, dès lors, d’une idée insolite ou biscornue. Concevoir des programmes génétiques, tels ces tests de programmation génétique du cerveau, sont, bel et bien, des tentatives menées dans les laboratoires du vivant. C’est dans ce contexte que les ingénieurs biologiques du Massachusetts Institute of Technology, ont en effet, créé un langage de programmation, qui leur permet d’appréhender, puis, de concevoir rapidement des circuits complexes ; l’ADN codé donnant ainsi de nouvelles fonctions pour les cellules vivantes. Que ne laisserait entrevoir de telles recherches, visant demain à doper artificiellement des hommes, voir les corriger, même avec des visées humanistes ! Si l’on commence ainsi, à réparer les dysfonctionnements du cerveau et guérir les anomalies, n’adviendra-t-il pas le temps de rechercher à idéaliser l’être humain, et anticiper le temps de l’homme augmenté et « performé », un nouveau type d’humain, un sur homme amélioré par le génie génétique.

Mais comme le souligne à nouveau Jacques Testart « c’est surtout la préoccupation de qualité du produit-enfant qui anime désormais la fabrique de l’humain. Outre les méthodes sélectives (choix d’un tiers géniteur, sélection d’un embryon), l’Aide Médicale à la Procréation vise à proposer l’amélioration de l’embryon, et des praticiens s’emballent de projets eugéniques quand la technologie prétend disposer d’outils efficaces et précis pour modifier le génome ».

De la sorte, le projet de conquête absurde et qui touche au génome humain ne semble plus avoir de limites, subséquemment la fécondation de bébés issus de plusieurs parents[4], pour obtenir un bébé « génétiquement parfait » n’est plus si improbable, le premier bébé, résultat d’une manipulation du génome de trois parents, est né au Mexique, l’enfant est en effet né de la manipulation de l’ADN de trois parents. Il s’agissait de transférer des matériaux génétiques du noyau pour éviter que la mère ne transmette à son enfant des gènes défectueux responsables du syndrome de Leigh « de transmission maternelle », une maladie neurologique progressive caractérisée par des lésions neuropathologiques.

La Grande-Bretagne était devenue le premier pays au monde à autoriser la conception d’enfants « à trois parents ». La technique imaginée par Doug Turnbull, de l’université de Newcastle, au Royaume-Uni, et dénommée « transfert pronucléaire » (PNT), consiste à prélever le noyau de l’ovule de la mère contenant des mitochondries défaillantes. L’ovocyte est ensuite fécondé avec le sperme du père, puis le noyau de l’œuf est transféré dans l’ovule énucléé de la donneuse.

Or pour le professeur Royère, le directeur procréation, génétique et embryologie humaine à l’Agence de la biomédecine en France, « Le risque est que la manipulation induise chez l’embryon de nouvelles pathologies ou anomalies, alors qu’on cherchait au contraire à obtenir un bébé sain ».

Les avancées sournoises du transhumanisme

Les avancées du transhumanisme sont sournoises, subtiles comme nous l’écrivions précédemment, le nouvel eugénisme, empreinte un nouveau langage, teinté d’humanisme et de progressisme, et qui dans l’air du temps, passe beaucoup mieux, nous faisant ainsi passer pour des ringards, des conservateurs surannés, ne comprenant rien à l’avènement du progrès.

Or ce nouvel Eugénisme revêtu, des habits du transhumanisme, progresse du fait, à la fois de notre désertion, de l’abandon des valeurs morales, et de la défection de l’éthique, que l’on nous défend de promouvoir, sans être taxé de défenseur de l’inégalité.

Ainsi, qu’est-ce qu’aujourd’hui le Conseil Consultatif National d’Éthique, sinon des hommes et des femmes, dont la plupart ne sont plus habités par la dimension du spirituel, qui apporte la raison à la conscience, « la conscience, à la science ».

Jérôme Sainton Docteur en Médecine évoquait dans un mémoire de fin d’étude en Bioéthique, l’Éthique de la mise en œuvre[5] et non du fond, la bioéthique a dans ce nouveau contexte sociétal pour fonction de compenser la réalité, de mettre des mots sur des pratiques, afin de nous convaincre que c’est bien l’homme qui fixe les règles. Elle a donc in fine pour objectif de familiariser, « d’habituer les gens aux développements technologiques pour les amener à désirer bientôt ce dont ils ont peur aujourd’hui. […] Le Comité National d’Éthique est d’abord un comité de bienveillance de l’essor technoscientifique. Certaines technologies seraient très mal acceptées aujourd’hui, mais si, dans quinze ou vingt ans, elles sont bien acceptées, ce sera en partie grâce aux comités d’éthique, qui auront dit : “il faut développer la recherche, il faut faire attention, il faut attendre un peu, il faut un moratoire…” toutes sortes de propositions qui n’ont rien à voir avec un interdit et qui permettent de s’accoutumer à l’idée. » (J Testart, en collaboration avec Christian Godin, Au bazar du vivant : biologie, médecine et bioéthique sous la coupe libérale, Seuil (points virgule), Paris, 2001, p.132-133). Ainsi la bioéthique a pour finalité d’adapter l’homme au système technicien : c’est elle qui assure la transition entre les anciennes et les nouvelles valeurs.

Le monde, habité par des désirs prométhéens, installe ainsi, et au fil de son histoire, une technicité qui réduira l’humain au rang de machines, puisque notre génome en est réduit à n’être qu’un logiciel programmable à souhait. En écrivant ces lignes, résonne en moi ces mots de l’écologie humaine, « Prendre soin de l’homme, de tout l’homme » qui est l’antithèse de l’homme modifié ou augmenté, l’antithèse d’un transhumanisme qui aliène la dimension ontologique de l’homme, l’essence même d’une finitude qui ne trouve sa grandeur qu’en son créateur.

[1] Jacques Testart Biologiste français qui a permis la naissance du premier bébé éprouvette en France en 1982.

[2] Le récit est rapporté dans le livre d’Exode chapitre 1.

[3] Dominique Aubert-Marson Maître de conférences, Laboratoire de biologie du développement et de la différenciation neuromusculaire, Université Paris Descartes

[4]http://www.rtl.be/info/magazine/science-nature/un-bebe-issu-de-trois-parents-biologiques-differents-voit-le-jour-grace-a-une-methode-controversee-854463.aspx

[5] Nous reprenons ici l’intégralité du texte de Jérôme Sainton, extrait de son mémoire de Bioéthique, Jérôme Sainton est Docteur en médecine.

« Le transhumanisme n’est qu’un eugénisme relooké »

Revue de presse, extrait du blog Usbek & Rica

« Le transhumanisme est un eugénisme mou, consensuel  et démocratique. Dans l’inconscient collectif, le terme « eugénisme » renvoie sans cesse – par méconnaissance historique – aux nazis. C’est une erreur : il s’agit d’une logique de sélection pour  « l’augmentation » de l’espèce et c’est l’essence même du transhumanisme, qui n’est qu’un eugénisme relooké. Je dis « mou », « consensuel » et « démocratique » car c’est sans violence apparente et ça se passe avec notre consentement, et même à notre demande.  En 1974 sont apparues les premières banques de sperme : les CECOS (Centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain, Ndlr). On y parla bientôt « d’appariement de couples reproducteurs », une formule qui aurait dû nous alerter. »

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