Le gender : un dévoiement de la passion pour l’égalité

Notre monde est traversé par des crises plurielles. En l’espace de trois décennies, nous avons connu les mutations les plus importantes jamais vécues dans l’histoire de l’humanité. Nous assistons à une forme de déchristianisation programmée de la société, la volonté insidieuse d’effacer, de gommer toutes les traces de l’éthique judéo-chrétienne dont notre société a été imprégnée depuis deux mille ans.  Nous changeons de paradigmes, les valeurs sociales fondées sur la famille sont remises brutalement en cause, de nouvelles idéologies participent de ce changement radical. C’est cette idéologie que nous souhaitons ici mettre au grand jour à travers le concept « gender », car l’idéologie « gender » entend bien se débarrasser de toute référence judéo-chrétienne en combattant ses valeurs, en prônant la norme sociale et l’évolution des mœurs comme le nouveau modèle social à promouvoir.

Notre monde est traversé par des crises plurielles. En l’espace de trois décennies, nous avons connu les mutations les plus importantes jamais vécues dans l’histoire de l’humanité. Nous assistons à une forme de déchristianisation programmée de la société, la volonté insidieuse d’effacer, de gommer toutes les traces de l’éthique judéo-chrétienne dont notre société a été imprégnée depuis deux mille ans.  Nous changeons de paradigmes, les valeurs sociales fondées sur la famille sont remises brutalement en cause, de nouvelles idéologies participent de ce changement radical. C’est cette idéologie que nous souhaitons ici mettre au grand jour à travers le concept « gender », car l’idéologie « gender » entend bien se débarrasser de toute référence judéo-chrétienne en combattant ses valeurs, en prônant la norme sociale et l’évolution des mœurs comme le nouveau modèle social à promouvoir.

Les études du Genre

Le pédopsychiatre Vincent Rouyer rappelle que « les gender studies avaient pour but plutôt louable au départ de démontrer que la domination de l’homme sur la femme était de nature culturelle et acquise. De fait, il a existé et il existe encore des cultures et des sociétés matriarcales. (D’après certains anthropologues, c’était le cas des premières sociétés préhistoriques qui d’ailleurs auraient été caractérisées par leur grande violence.) Nonobstant, les auteurs de ces études sur le genre se sont crus obligés pour ce faire de nier la différence homme femme. Je ne reviendrai pas sur les arguments scientifiques qui viennent contredire ces hypothèses et qui sont admirablement développés dans le reportage du norvégien Harald Eia»

Je cite à nouveau Vincent Rouyer : « Ce qui me semble par contre complètement pervers, c’est l’idée d’articuler systématiquement la différence avec un rapport hiérarchique (en tout cas en ce qui concerne la différence des sexes) ; d’où l’origine de cette théorie du genre. Pour dénoncer le lien dominant/dominé, on supprime tout simplement la différence. »

L’autre point, selon Vincent Rouyer, « c’est l’impression que l’on cherche à détruire un ordre qui s’est créé autour des valeurs fortes héritées tant du christianisme que de la philosophie gréco-latine pour ce qu’elle a de meilleur, à savoir le respect de la vie humaine et son caractère inaliénable, tout en maintenant le fait que l’homme n’est pas lui-même sa propre mesure. Ces valeurs tant qu’elles étaient liées les unes aux autres ont permis à l’humanité de progresser car elles étaient fortement cohérentes, même si elles portaient un idéal sublime et difficile à atteindre. Ce qui caractérise notre société moderne, c’est justement la perte des idéaux et de la cohérence. On s’appuie sur certaines valeurs chrétiennes, non pour exalter les autres mais pour les combattre. Ainsi nous parle-t-on sans cesse d’amour et de sincérité au mépris de la vérité. L’amour n’en sort pas grandi, bien au contraire. J’ai du mal à percevoir un ordre nouveau dans tout cela tant la déconnection du réel est flagrante. Si un ordre nouveau sort de ce chaos, il ne pourra être que totalitaire. »

Une idéologie revêtant les habits de la science…

Ainsi une nouvelle idéologie  est de nature à faire basculer l’ensemble de notre société en le produisant sur de nouvelles normes susceptibles de déstructurer ses fondements millénaires.

Citons en outre l’intellectuel juif Shmuel Trigano : « L’inscription dans la Loi, dans l’univers des symboles, de la normalité d’une famille reposant sur le couple homosexuel représente […] un enjeu qui engage la façon de comprendre l’humain. C’est une manipulation anthropologique. C’est d’abord sur ce plan fondamental que la question se pose, bien avant les plans moral, philosophique ou religieux. »

Un ordre ancien fondé sur une société sexuée, la complémentarité, l’altérité homme et femme inspirée des valeurs judéo-chrétiennes et prenant sa source dans le livre de la Genèse, est susceptible de rentrer en collision avec un nouveau modèle sociétal, une forme d’ordre nouveau, celle du genre, la société dessexualités. Société des sexualités se fondant sur la loi du « genre », masculin ou féminin, libérée en quelque sorte du sexe biologique, dans le cadre d’une disparition des « hommes » et des « femmes »

Cette nouvelle norme sociale conteste la différence complémentaire. Si elle revendique l’égalité homme/femme, sa posture est l’égalitarisme : ni homme, ni femme… ni père, ni mère.

Selon le concept gender, les études sur le genre postulent en effet que « l’homme et la femme n’ont pas de dynamisme naturel qui les pousserait l’un vers l’autre » : seuls les conditionnements ou les déterminants sociaux rendraient compte de cette inclination. Par ailleurs, les tenants des études Gender aiment citer Simone de Beauvoir: « Une femme ne nait pas femme, elle le devient ». Ces mêmes études contestent la reconnaissance de la différence réelle et tangible d’une femme en regard de l’homme.

Pour Simone de Beauvoir, l’absence de « destin anatomique » relève en effet d’un postulat que l’on voudrait asséner comme une vérité fondée sur la seule construction de la dimension sociale niant ainsi l’aspect naturel (anthropologique).

Or  l’identité masculine comme féminine, l’identité de la femme comme celle de l’homme sont aussi des corolaires de leur sexe biologique. Cela ne les réduit pas pour autant à des rôles à jouer dans la société mais les invite à vivre en complémentarité en regard de leurs identités sexuées et différenciées.

C’est une erreur de penser aux seuls destins imposés par les éducateurs. S’il est vrai que les apprentissages dans les repères naissent aussi de déterminants sociaux, ils peuvent aussi et fondamentalement constituer des repères justes relevant de la transmission de valeurs au-delà de la norme sociale, construisant ainsi l’homme et la femme à des fins de rencontres épanouissantes, complémentaires, fécondes et fertiles.

Il est vrai que les détracteurs de la manifestation du 13 janvier contre le « mariage pour tous » répondront que l’identité n’est pas une qualité innée, statique, qu’elle est la résultante de l’interaction dynamique avec un environnement qui conditionne le devenir de l’être. Je connais ces références et, comme socio-économiste, je ne les conteste d’ailleurs pas. (J’adhère aux thèses de Bourdieu et ses travaux sur l’habitus.) Dans la théorie du genre, ce que je conteste, c’est de façonner idéologiquement la société à d’autres apprentissages, de lui fabriquer à son insu d’autres repères.

Mais au moins qu’il nous soit donné la liberté de poursuivre la transmission de ces « convictions repères » qui sont la reconnaissance de la différence réelle et tangible d’une femme en regard de l’homme !

Les études du Genre voudraient nous faire dire que les caractères sont interchangeables entre hommes et femmes, que les marqueurs identitaires des sexes sont à relativiser. Pourquoi le contesterions-nous ?

Pourtant la différence entre un homme et une femme nous semblent significatifs sur le plan de leurs comportements, de leurs émotions, de leurs sensibilités. Il serait manifestement peu honnête de le nier… sauf si l’expérience du couple homme-femme ne relevait pas du vécu.  Que dire de l’expérience de la maternité que nul homme n’a intrinsèquement vécu dans sa chair et qui façonne le caractère unique de la femme-mère ?

Prenons également l’exemple de la dimension symbolique de « l’épaule » qui peut faire sens dans la vie des couples homme et femme, notamment dans sa dimension de protection et de capacité à affronter le danger, d’entreprendre sans doute. Je ne dénie pas cette aptitude chez la femme notamment mère qui, évidemment est aussi sur cette posture de protectrice et sait incontestablement entreprendre pour l’enfant. Je parle ici de la capacité de l’homme à être pour sa femme dans une représentation qui soit rassurante, dans une aptitude à savoir affronter, à savoir faire face. L’homme n’est pas supérieur à la femme, ils sont simplement et intrinsèquement complémentaires, côte à côte. Au-delà de la simple attirance des corps, la femme recherche dans l’homme ce qui lui manque et vice et versa pour l’homme.

La théorie du Genre me donne le sentiment d’un modèle social qui veut se substituer à un modèle ancien, d’une pensée nihiliste « façon nietzschéenne »… volonté de programmer un reset, de reformater la mémoire collective, de reconstruire l’organisation, la pensée sociale et sociétale en quelque sorte.

Le genre se veut finalement libre de référence biologique : « l’homme et la femme dans leur différence sexuée peuvent s’incliner aussi bien vers le masculin que vers le féminin ».

Est ainsi contestée cette irréductible dissymétrie qui est fertile, féconde entre un homme et une femme et qui existe pourtant bel et bien. Nonobstant, elle est la condition d’un échange nécessaire, parce que complémentaire, chez deux être ontologiquement semblables mais aussi différents.

La théorie du genre qui prône l’affranchissement de toute attache, pense l’exception pour faire passer un nouveau modèle sociétal, une nouvelle norme sociale fondée finalement sur une société qui aurait pour miroir l’image d’un masque travesti qui change de genre selon la nuit ou le jour. Les repères étaient jadis religieux, judéo-chrétiens notamment, fondés sur l’altérité des sexes qui est une réalité biologique. Aujourd’hui force est de reconnaître l’émergence d’une pensée déstructurant le socle sociétal bâti sur la cellule familiale, d’une idéologie déviante qui renverse les tabous, détricote ce que des millénaires ont construit dans la mémoire collective.

La théorie du genre devient la nouvelle norme sociale posant un nouveau curseur, celle de l’éthique de l’ouverture et de la tolérance.

Un nouveau modèle sociétal face à l’ordre ancien…

Nous sommes en effet passés d’une société fondée sur la différence des sexes à la dimension asexuée de la société, une forme de revendication narcissique, consumériste, portée par une idéologie qui entend devenir aujourd’hui la pensée dominante… et qui progresse par capillarité de façon à atteindre l’ensemble des couches de la société. Les études du genre sont une option philosophique et ne relèvent nullement d’un caractère scientifique. Elles  n’ont pour seule vocation que de renverser un mode de pensée transmis par la religion judéo-chrétienne et cherchent même à stigmatiser ceux qui pensent différemment. Ainsi relevons l’affichage récent de réquisitoires et l’incitation à la dénonciation des élus se positionnant contre le « mariage pour tous ».

Je vois dans le Gender une idéologie qui se veut indiscutable, et demain persécutrice, culpabilisante pour ceux qui choisiront d’offrir à leur fille une dinette, plutôt qu’un jeu de mécano.

Bien entendu, les tenants du Gender formeront nos enfants. Dans leurs discours militants, ils évoqueront de nouvelles normalités. En revanche, ceux qui enseigneront la différenciation à leurs enfants seront accusés de souffrir de phobie honteuse et de pathologie religieuse.

Les adeptes du Gender proscriront les jeux de mécano à tout garçon et leur prescriront plutôt la dinette. Je vois là l’émergence d’une pensée totalitaire, organisée d’une certaine manière, une stratégie déployée visant, après l’égalité homme femme, la recherche à tout crin de l’égalitarisme à toutes les échelles de la société. Je crois ne pas avoir tort, car il s’agit bien d’une stratégie sociale, politique qui accompagne fort bien le projet de loi du « mariage pour tous ». L’égalité du « mariage pour tous », c’est l’égalitarisme des identités.

Je suis ainsi et résolument opposé à cette idéologie car « Non ! Un homme n’est pas une femme comme une autre », « Non, une femme n’est pas un homme comme un autre ! »

« Quand Les mots ne sont plus que ce que l’on décide qu’ils doivent être, on n’est plus dans le domaine du sens, mais de la confusion. » Bertrand Vergely

Pour conclure et faire suite à un article écrit par mon ami Alain LEDAIN citant Georges ORWELL, auteur du fameux livre 1984…

Ce livre, à l’aune de la théorie du genre, mériterait une nouvelle lecture que j’invite finalement à redécouvrir. Dans ce  roman fiction, Georges ORWELL prophétisait la ruine de l’homme par la « confiscation de la pensée et la prolifération de la technocratie ». Georges ORWELL nous révèle ainsi une société hors du temps qui pourrait finalement être la nôtre, plongée dans une ‘hypnose sociale’ où la perversion du langage prédomine… La NOVLANGUE…

Le genre qui nie ou désavoue l’identité sexuelle est une NOVLANGUE. Pour définir ce mot curieux, Georges ORWELL le définit à travers l’un de ses personnage de fiction  « Ne voyez-vous pas que le véritable but du Novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? A la fin nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. »…

Voici pourquoi il est urgent de réveiller auprès de tous cette prise de conscience d’une société qui demain imposera le LA de sa pensée, la norme sociale qui aujourd’hui est sur le point de faire disparaitre les mots ‘Père’ et ‘Mère’ du code civil, évacue la référence à l’homme et la femme reliée à leur origine sexuelle…

Aujourd’hui, cette nouvelle norme, qui sera enseignée dès la classe de première, n’apparaît probablement pas significative. Nonobstant la perversité de cette pensée qui a pris l’habillage d’études, l’idéologie renferme la réalité d’un changement de paradigme radical qui lentement pénètre la société  en l’ankylosant, en l’engourdissant, en l’endormant.

Cette idéologie est exactement comme le serpent dans l’œuf (référence au magnifique film de Bergman). La scène se joue à Berlin. Une forme d’oppression peu à peu nauséabonde envahit la ville, une ville qui peu à peu étouffe. La liberté se resserre. Une ombre menaçante et agressive s’impose peu à peu sur la ville. Le Nazisme se dévoile.  Le Gender, nouvelle norme sociale, se substituera à la dimension de la valeur, celle du Livre, des Ecritures qui nous révèlent la pensée de Dieu et nous disent que la femme et l’homme créés côte à côte sont complémentaires. Cette idéologie introduira inévitablement une pensée totalitaire.

La novlangue caractérise bel et bien notre société. Bertrand Vergely, philosophe et théologien français, ancien élève de l’École normale supérieure de Saint-Cloud, déclare que  « bidouiller une famille grâce à un montage juridico-médical et appeler cela famille n’est pas raisonnable. Les mots ont du sens quand ils renvoient à une réalité. Quand ils ne sont plus que ce que l’on décide qu’ils doivent être, on n’est plus dans le domaine du sens, mais de la confusion. Le règne de la confusion, sa dictature et avec elle la confusion des esprits et des comportements, n’est-ce pas ce dont nous souffrons déjà et qui risque de nous engloutir ? Est-il besoin d’en rajouter ? »

Eric LEMAITRE

« Gender Egalité » et « Création Différences » : Deux visions qui s’opposent

Cette volonté d’atteindre l’égalité à tout prix peut être source en réalité de souffrances et de disharmonie. Ainsi, dans cette revendication du mariage pour tous, pourquoi dénier le droit à tout enfant d’avoir une figure maternelle et paternelle ? Or, c’est justement ce que l’idéologie GENDER entend déconstruire pour annihiler ce droit.  En m’inspirant de René Girard, on peut dire que l’on parvient au totalitarisme lorsque le désir d’égalité poussé à son paroxysme parvient à anéantir le désir de différence.

Je crains que, dans l’identité des genres portée par une idéologie égalitaire, ce n’est ni plus moins que l’être sexué qui soit aboli. L’abolition de l’être dans sa dimension biologique le sera par la force de la loi. Le mouvement Gender est un mouvement idéologique qui porte en lui, disons-le, les germes d’un despotisme  qui finira par codifier, légiférer, décréter. Donnons-nous rendez-vous sur un horizon de temps court pour l’observer, et non quelques décennies pour apprécier les changements qui interviendront au sein de la civilisation.

Un article d’Eric LEMAITRE

« Les solutions totalitaires peuvent fort bien survivre à la chute des régimes totalitaires, sous la forme de tentations fortes qui surgiront chaque fois qu’il semblera impossible de soulager la misère politique, sociale et économique d’une manière qui soit digne de l’homme. »
Hannah Arendt, Le système totalitaire, 1951.

Une forme d’obsession, de prérogatives  exacerbées traversent le monde depuis l’origine des temps et touchant à la dimension de l’égalité. Cette revendication teintée d’équité peut également renvoyer à  une forme de justice dévoyée et paradoxalement de pensée totalitaire.

A partir de la citation du texte d’Hannah Arendt reproduite plus haut, je souhaitais une nouvelle fois aborder les idéologies issues des « gender studies » dans cette perspective, évoquer la tentation forte qui est d’imposer une conception de la civilisation.

Par simplification de langage, le idéologies issues des « gender studies » seront désignées, dans ce qui suit, par le terme « idéologie Gender ».

La philosophe allemande Hannah Arendt définit l’idéologie comme la « logique d’une idée » ; elle enseigne qu’à partir d’un postulat (par extension, je ferai référence aux prémices du Gender « Une femme ne nait pas femme, mais elle le devient »), le totalitarisme se fera toujours fort de donner un sens aux événements et de re-codifier de nouvelles règles pour penser la société dans cette nouvelle dimension de l’égalité pour tous.

Le projet divin associé à la création n’est pas l’uniformité

Cette volonté d’atteindre l’égalité à tout prix peut être source en réalité de souffrances et de disharmonie. Ainsi, dans cette revendication du mariage pour tous, pourquoi dénier le droit à tout enfant d’avoir une figure maternelle et paternelle ? Or, c’est justement ce que l’idéologie GENDER entend déconstruire pour annihiler ce droit.  En m’inspirant de René Girard, on peut dire que l’on parvient au totalitarisme lorsque le désir d’égalité poussé à son paroxysme parvient à anéantir le désir de différence.

Je crains que, dans l’identité des genres portée par une idéologie égalitaire, ce n’est ni plus moins que l’être sexué qui soit aboli. L’abolition de l’être dans sa dimension biologique le sera par la force de la loi. Le mouvement Gender est un mouvement idéologique qui porte en lui, disons-le, les germes d’un despotisme  qui finira par codifier, légiférer, décréter. Donnons-nous rendez-vous sur un horizon de temps court pour l’observer, et non quelques décennies pour apprécier les changements qui interviendront au sein de la civilisation.

Force est ainsi d’observer qu’en Allemagne, des lois liberticides ont été promulguées. Ainsi, « une mère de douze enfants a été condamnée à 43 jours d’incarcération pour avoir refusé d’inscrire trois de ses enfants dans le programme d’éducation sexuelle dans une école primaire locale. »

http://www.christianophobie.fr/breves/allemagne-une-mere-de-famille-nombreuse-chretienne-condamne-a-de-la-prison-ferme-pour-avoir-refuse-les-cours-deducation-sexuelle

Or, à travers l’idéologie Gender, c’est l’être en réalité qui régressera, et je crains qu’il ne s’agisse pas d’une renaissance mais bien d’un déclin absurde du fait d’une transgression des lois divines.

Si une renaissance aberrante de l’homme est ainsi en cours (promesse du Gender), cette renaissance connaitra un effet accélérateur par la biotechnique, susceptible de faire émerger l’individu à multiples identités sexuelles du fait des modifications génétiques qui sont devenues aujourd’hui possibles, altérant, déconstruisant l’origine même de l’identité.

La pensée moderniste et les chantres de la renaissance de l’être dans l’apologie du genre, louent paradoxalement le multiculturalisme, la diversité, tout en appelant à l’égalité. En réalité, c’est l’uniformisation humaine qui se dessine, une nouvelle civilisation du genre qui se construit subrepticement.

D’une certaine manière nous assistons par couches superposées à une forme subtile de processus de sédimentation, à la lente édification des briques de Babel… Nous assistons finalement à un projet de dé- création du projet divin qui fut de créer l’homme et la femme à la fois dans leurs différences et leurs complémentarités.

Pour insuffler l’idéologie du Genre, il me paraît évident qu’au delà de la loi qui décrétera et codifiera les changements sociaux devant intervenir, il faudra bien entendu s’adosser sur l’action publicitaire et faire du Gender Marketing pour modifier les balanciers et les codes sociaux, objets de nos représentations actuelles. Je tiens ici à souligner que, bien entendu, je ne valide nullement la marchandisation du corps féminin que je trouve abject et parfaitement dégradant pour l’image même de la femme.

L’idéologie du Genre finira par s’adosser aux fantasmes d’un marketing totalitaire (eh oui, j’y reviens au mot totalitaire) qui surfera sur les vagues de nouvelles représentations à insuffler à l’ensemble du corps social.

En imposant de nouveaux codes et de nouvelles lectures de la société, le marketing Gender s’est déjà engagé à travers la marchandisation des corps.  Après la femme objet, voici l’homme devenu objet, l’homme androgyne, juste retour du balancier mais forcément dépravant une certaine image de l’être humain en abaissant l’homme à une dimension purement consumériste et narcissique. Narcisse, dans la mythologie grecque, est ainsi fasciné par l’image qu’il renvoie de lui-même, il se désire lui-même, il est tout à la fois le propre sujet de son amour, « l’amant » et « l’objet aimé ». Le marketing Gender est ainsi la promotion d’une forme d’idolâtrie de soi à l’envers d’une relation de deux amants s’attirant dans leurs différences sexuelles.

Force est de reconnaitre que le genre, déstructuration de la civilisation, est une construction philosophique à l’opposé de l’enseignement que nous puisons dans les Ecritures…

En effet, dès la genèse, Dieu sépare les éléments (les eaux/ la terre, la lumière/ la nuit). Dieu crée l’altérité et la diversité, la différence et la complémentarité, en tirant de la cote d’Adam son vis-à-vis à la fois différent et complémentaire, la femme.

Mais l’homme, dans sa séparation comme dans son éloignement avec le Créateur, déconstruit pour uniformiser peu à peu dans le déni définitif de Dieu. L’humanité est viscéralement entrainée sur le principe de l’égalité que le Serpent a soufflé dans les oreilles dès les débuts de la Genèse (ce texte de Genèse ici est particulièrement interpellant).

Le genre est fondamentalement contraire au projet divin qui n’est justement pas l’uniformité. Dieu veut la différence, la diversité et non la monotonie des éléments, l’écologie et l’harmonie, l’interaction des éléments et non l’imbrication qui ne conduiraient à aucune fécondité, aucune fertilité, aucune créativité…

Babel est finalement un univers d’égalités. A son propos, le théologien Steiner partage une intuition intéressante : « Les différences de langue peuvent être interprétées comme une rébellion contre les contraintes de l’universalité non différenciée, une lutte de la diversité contre l’universalité. » Je trouve l’approche particulièrement profonde et nous renvoie aux textes de l’Apocalypse (je fais également référence à la lecture du livre de Philippe PLET Babel ou le culte du bonheur : la modernité décryptée par l’Apocalypse)…

« Vous serez comme des dieux » – Genèse 3.5

Rappelons que le Serpent, tel que le rapporte le livre de la Genèse, voulait l’égalité et le suggérait à Adam et sa Femme Eve dans son programme de déconstruction : « Vous serez comme des dieux… »

« Vous serez comme des dieux » nous renvoie inévitablement au mythe de Prométhée, la folle tentation de l’homme de se mesurer à Dieu, la recherche de l’équivalence, une course effrénée vers l’égalité, un déchainement vers la ressemblance.

Il y a, dans cette poursuite de l’équivalence, une forme de mimétisme exacerbé, une façon de considérer l’altérité comme insupportable, comme injuste. René Girard, penseur et philosophe chrétien, met en évidence une vision conflictuelle de l’imitation qui conduit à voir la différence comme discriminante et profondément injuste.

L’idéologie du genre, adossée à une vision dénaturant la réalité anthropologique de l’humanité, se veut en quelque sorte légitime et réparatrice de cette injustice.

Le programme « gender » fonde en quelque sorte une nouvelle religion, celle de la relativisation qui est une réécriture de l’histoire de l’humanité en imposant et décrétant une vision dénaturant la sexualité homme et femme en la transformant en genre. Le genre remplace le sexe, nous assistons ici à un processus d’évolution sémantique, une NOVLANGUE.

Cette idéologie, selon ses penseurs, se fonde sur une théorie (« études ») qui ne saurait être, bien entendu, contestée, une forme de Ministère de la vérité dans laquelle la science est abusivement sollicitée et que rapporte prophétiquement Georges Orwell, auteur de ce concept de NOVLANGUE.

Le « Vous serez comme des dieux » est ainsi une volonté de dénaturer l’ordre, la dimension écologique de la nature, la réalité des écosystèmes rapportée dans le livre de Job : « La connaissance ultime de la Création, son origine et son point de départ, appartient à Dieu. » (Job 38-39)

Le programme « gender » est, d’une certaine façon, la volonté de transgresser, d’annihiler la différence avec Dieu. L‘idéologie vise ni plus ni moins la déconstruction des rôles de l’homme et de la femme, la modification de l’ordre même de la nature. Ce programme de déconstruction  a débuté dès les origines de l’humanité, dès lors que l’égalité avec Dieu a été insufflée.

Je trouve matière à réfléchir dans les textes de l’apôtre Paul qui ont fait couler beaucoup d’encre. Il est assez étrange de faire ce constat : dès que l’apôtre parle de la femme, beaucoup entendent réfuter l’apôtre sur ce point, lui contestant d’avoir été inspiré.

Aujourd’hui, vu les contextes et en regard des épitres écrits par l’apôtre, je pense que nous ferions peut-être bien de réfléchir à nouveau, non sur une codification à imposer à nos églises, mais sur nos rapports « Homme et Femme ».

Les contributeurs

Le livre comme ce site n’auraient jamais vu le jour sans ces multiples échanges et rencontres avec des amis qui ont largement contribué à façonner et donner à ce blogue toute cette dimension réflexive, qu’ils en soient ici vivement remerciés… Ces rencontres furent riches et leurs apports ont permis de faire émerger ce projet au service de la vérité, une vérité que le prologue de Jean l’évangéliste décrit comme le Verbe qui s’est fait chair… 

Gérald PECH
Charles Eric DE SAINT-GERMAIN
Bérengère SERIES
Alain LEDAIN
Etienne OMNES
Jérôme SAINTON
André EGGEN
Eddy MARIE-COUSTE
Laurent DEVIE
Claude et Edmond BOUCTON, mes très chers amis veilleurs de Reims
Nicolas BOURGOIN et Renaud MISEREY

 

De la fragilité

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Nous remercions Alain LEDAIN pour cette contribution d’une grande profondeur et d’une immense richesse et qui traite de la fragilité

« Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort. » (2 Co 12, 10)

Dans ces contextes de changement de paradigme, abordé le thème de la fragilité, est-ce bien inspiré ? Ne devions-nous pas nous attendre à aborder celui de « La puissance » ?

Pourtant dans notre propos, il ne s’agit pas ici de faire l’apologie de la fragilité… comme il ne s’agit pas non plus de la nier.

L’homme est par essence fragile, il est à tout instant confronté à cette réalité qui se caractérise par, le handicap, la maladie et la mort. Ses fragilités peuvent être physiques certes, mais aussi relationnelles, sociales, psychologiques ou spirituelles.

Pour reprendre l’accroche d’un colloque, nous sommes « Tous fragiles, tous humains » même si nous ne sommes pas tous « visiblement fragiles » car atteints dans notre corps ou notre intelligence.

Plus ! A la condition humaine sont aussi attachées la faiblesse, l’incomplétude et la finitude. D’ailleurs, dans ce qui suit et pour simplifier, nous inclurons ce vocable – faiblesse, incomplétude et finitude – dans le terme « fragilité ».

Mais qu’entend-t-on par ces derniers mots ? L’incomplétude renvoie à nos manques, la finitude à nos limites : nous vivons dans un espace et un temps donnés ; nous ne sommes pas complètement maîtres de notre vie.
L’apôtre Jacques parle de l’homme comme d’une « vapeur qui paraît pour un peu de temps et qui disparaît ensuite. » (Jc. 4 : 14) Aussi, nous exhorte-t-il à ne pas être présomptueux dans nos projets et quant à notre devenir : « Si Dieu le veut, nous vivrons, et nous ferons ceci ou cela. » (Jc. 4 : 15)

Sur un registre identique et touchant à notre fragilité, le Roi Salomon écrivait : « Ne te vante pas de ce que tu feras demain, car tu ne sais pas même ce qui arrivera aujourd’hui. » (Pr. 27 : 1) Quant à cette autre figure Biblique, Moïse, il priait : « Enseigne-nous à bien compter nos jours, afin que nous appliquions notre cœur à la sagesse. » (Ps. 90 : 12) Lui aussi nous rappelle que nous ne sommes pas immortels. Sénèque écrira beaucoup plus tard (entre 49 et 55) : « Vous vivez comme si vous deviez toujours vivre ; jamais vous ne pensez à votre fragilité. Vous ne remarquez pas combien de temps est déjà passé, vous le perdez comme s’il venait d’une source pleine et abondante […] » (De la brièveté de la vie.)

Quel tableau ! Devons-nous pour autant en être déprimés ?

Tout dépend de notre regard. Notre but est ici précisément de changer la perspective déprimante que nous pourrions en avoir.

Un autre point de vue est possible. Sa mise en perspective peut amener la paix et le repos de Dieu dans nos vies et dans celle de notre société… si nous les voulons bien et si nous acceptons d’être réconciliés avec notre condition humaine et les limités à accepter non comme une forme de servitude pesante mais comme une aspiration à la dépasser en nous rapprochant de notre créateur et en épousant la nature divine au travers de Jésus-Christ.

Remarquable : En Jésus-Christ, Dieu s’est rendu fragile et vulnérable

Il est étrange de noter que l’homme tout au long de son histoire ait aspiré à dépasser ses propres limites, ait souhaité transcender sa finitude, ait aspiré à embrasser la toute-puissance que lui confère la technique comme élément support de sa propre transformation. Inversement Dieu fait exactement le chemin inverse, puisque Dieu embrasse la condition humaine, se fait Roi serviteur, revêt la condition de l’homme.

Les écritures nous enseignent que Christ de condition divine s’est fait pleinement homme. Ainsi Dieu a rêvé l’incarnation et l’homme dans un processus contraire engage le cheminement contraire, celui du déni de sa finitude pour rêver à épouser une condition divine afin d’être si possible immortel. L’homme démiurge menant l’introspection de son ADN et décidant de modifier, de combiner, d’associer une autre nature afin de réparer son imperfection d’homme mortel.

Dans un contexte de post humanisme, la fragilité et la vulnérabilité ont une résonnance contraire avec les idéologies de dépassement portés par une époque bercée par le monde de la toute-puissance. Les mots fragilité et vulnérabilité sont de la sorte en opposition avec l’air du temps qui glorifie l’énergie et la vitalité, la croissance et la performance, les vainqueurs et les bien-portants. Une époque anxiogène et bien fatigante pour ceux qui ne s’estiment pas à la hauteur.

Et pourtant, c’est dans la fragilité et la vulnérabilité que le (Dieu) Tout-Puissant s’est pleinement révélé en Jésus-Christ.

Il a pleinement assumé la condition humaine étant un vrai homme – absolument homme et absolument Dieu –. Dans son humanité, il s’est d’abord présenté comme un petit enfant (dans un état de faiblesse humaine) né dans une crèche (dans la faiblesse sociale), puis il s’est montré capable de pleurer (Jn 11 : 35), de souffrir et de mourir sur une Croix.

« Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus Christ lequel […] s’est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes ; et ayant paru comme un simple homme, il s’est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix. » (Selon Ph. 2 : 5-8)

Dans Mt. 25, Jésus s’identifie aux personnes en situation de manque ou grande fragilité : les assoiffés, les affamés, les étrangers, les malades, les prisonniers.

Vanterons-nous pour autant la fragilité et la vulnérabilité ?… Non, ce serait tomber dans un piège.

En fait, la fragilité nous confronte à un double risque : La complaisance dans la fragilité et la négation de la fragilité.

La complaisance dans la fragilité

La fragilité n’est pas une fin en soi. Nous verrons qu’elle est un chemin où Dieu nous rencontre. Il ne s’agit pas de s’y complaire ; comme il ne s’agit pas non plus de la dramatiser ou de s’y enfermer.

Elle ne doit pas mener à une posture victimaire (à se cacher derrière le masque de la victime) ou à y trouver son identité. Elle ne peut être un alibi pour ne plus avancer ou ne pas se remettre en cause[1]. « Tu ne peux pas vivre sur ta blessure, tu n’es pas ta blessure, ton identité n’est pas dans ta blessure, mais elle se trouve dans le Christ. »[2]

Ceci étant posé, il faut manifester beaucoup de tact et de délicatesse pour rencontrer et aider les personnes qui ont vécu des circonstances si éprouvantes qu’elles n’arrivent plus à se livrer.

D’une manière ou d’une autre, nous ne pouvons pas nous plaire dans la souffrance car Dieu n’aime pas la souffrance. Alors que la vie peut mettre à genou, Il veut l’homme libre et debout. Pour s’en convaincre, il suffit de lire les Evangiles. Combien de personnes courbées Jésus n’a-t-il pas redressées lors de son ministère terrestre ! Mais avant toute guérison, Jésus pouvait poser une question : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » (Mc 10 : 51), « Veux-tu être guéri ? » (Jn 5 : 6)

La négation de la fragilité

La fragilité ne doit pas être refusée ou niée, au risque de céder à la tentation de la toute-puissance. Nous allons y revenir plus loin.

« Vous serez comme Dieu » (Gn. 3 : 5) propose le serpent qui suggère à Adam et Eve de renoncer à leur humanité en franchissant la limite posée par Dieu. Voulant s’échapper de leur condition humaine, voulant tout sans aucune limite, ils ont chuté et ils ont introduit la mort et la peur de manquer.

Dans le même esprit, lors de la tentation de Jésus, le Diable dira : « Je te donnerai toute cette puissance, et la gloire de ces royaumes ; car elle m’a été donnée, et je la donne à qui je veux. » (Luc 4 : 6a)

La fragilité et les limites sont normales. Nous n’avons pas à en avoir honte. Les limites sont une chance de don, de partage, de réciprocité et de complémentarité.

En ce sens, la relation homme-femme est très significative. Parce que je suis un homme (mâle), je suis « handicapé » du féminin. La différence sexuelle prouve que je n’ai pas tout, que je ne suis pas auto-suffisant : je ne peux pas faire advenir la vie à moi tout seul ![3] Il me faut accepter le manque, la limite qui suscite le désir de l’Autre (le féminin) et la vie.

Nous devons aussi accepter la fragilité et la vulnérabilité pour comprendre celles d’autrui. Toute personne doit être entourée, protégée.

En ce qui concerne le chrétien, même s’il peut tout par Celui qui le fortifie (Ph. 4 : 13), même s’il est plus que vainqueur par Celui qui l’a aimé (Rm 8 : 37), il n’en reste pas moins soumis aux périls, à la peine, à la faim, à la soif, au froid et au dénuement. (2 Co. 11 : 23-27)

Au plan social, « la dimension humaine d’une société se mesure à la manière dont elle traite la fragilité de ses membres »[4] et « Anesthésier la fragilité, c’est tuer l’humanité. »[5]

Au plan ‘spirituel’, « La religion pure et sans tache, devant Dieu notre Père, consiste [entre autre] à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions… » (Jc 1 : 27a), c’est-à-dire à apporter une aide aux plus fragiles.

Pourquoi ne pas céder à la tentation de la toute-puissance

Parce que la fragilité est attachée à la vie, à son côté imprévisible, non maîtrisable, l’homme recherche le risque zéro, quitte à brader sa liberté. Peut-être une explication à « la rage sécuritaire[6] » de ces dernières années.

Le risque zéro, c’est oublier que la vie est faite d’incertitude, de contingence[7] et d’accidentalité et que la surprotection fragilise[8]. Il est impossible de tout maîtriser. Tout contrôler, tout prévoir, tout anticiper, c’est s’interdire l’émergence du radicalement nouveau, c’est réduire l’humain à l’état de robot, de machine, d’objet. Parfois, il faut savoir lâcher prise.

Le principe de précaution ne s’applique pas dans tous les domaines de la vie… Pour nous, chrétiens, dans les tempêtes de la vie, nous nous souvenons de cette parole de Jésus : « N’ayez pas peur ! » (Mc 6 : 50)

La sécurité n’est pas la première fonction d’un état. Sa première fonction est de protéger les plus faibles ; ce qui a pour conséquence la sûreté comme attribut de la liberté, le combat contre la loi de la jungle, c’est-à-dire la loi du plus fort, celle de l’animal.

Le refus des limites…

… amène l’homme à la démesure sans aucun rapport avec la « vie abondante ».

Voilà qui explique le gigantisme, l’aspiration à toujours plus grand, plus haut – la plus haute tour du monde, la tour Burj Dubaï inaugurée le 4 janvier 2010, mesure 828 mètres de haut et a coûté 1,5 milliards de dollars[9] –, plus loin, plus vite et la tyrannie du « toujours plus ».

Il faut intégrer la notion de limites, sortir de certaines pensées et en tirer toutes les conséquences ; par exemple, arrêter de vivre selon le modèle mercantile et consumériste supposant les ressources de la terre pratiquement infinies, quasi-inépuisables et sans fin renouvelables[10].

Nos besoins réels sont limités, nos appétits illimités. Ces derniers doivent être limités par notre volonté et avec l’aide de Dieu au risque de créer un désordre personnel et social.

La puissance, elle, nous confronte au risque de la « toute-puissance ».

La caractéristique centrale des enfants est celle de la toute-puissance : « Je veux ici et maintenant ! Exécution immédiate, cela presse et ça n’est pas négociable. Ne me parlez pas de condition pour la satisfaction complète et totale de mon besoin ! Tout l’univers doit chercher à le satisfaire. » « Je suis la Loi, je fais la pluie et le beau temps. »

Dans la première enfance, la toute-puissance infantile est à son apogée et tous sont sommés de se soumettre à cette toute-puissance. C’est ainsi que le bébé crie éperdument lorsqu’il a faim et seule la tétée peut le satisfaire. Il pleurera jusqu’à satisfaction ou, si la satisfaction ne vient pas, il pleurera jusqu’à épuisement complet. La mère ne pourra qu’obtempérer[11].

L’époque de la toute-puissance infantile est celle de l’égocentrisme total et de l’intolérance à la frustration.

Lorsque l’enfant va grandir, la toute-puissance devra céder la place à la réalité et aux contraintes inhérentes à celle-ci. Chez l’enfant, cette acceptation ne sera ni immédiate, ni naturelle. Il oscillera entre le déni d’une certaine réalité et la prise de conscience de son impuissance[12].

Devenir adulte, c’est faire le deuil de la toute-puissance infantile, de l’immortalité et d’un monde dont on avait cru être le centre. C’est un travail d’humanisation qui ne se fait pas facilement et sans peine.

L’adulte a appris qu’il est limité[13], qu’il partage avec les autres la même condition humaine ; alors que les enfants se croient éternels et seuls au monde. Pour eux, l’Autre n’existe pas.

L’adulte accepte le manque et ne revendique pas sans cesse une totale satisfaction et un comblement parfait de ses besoins. L’adulte immature, lui, peut se transformer en bébé hurleur, sans oreille pour entendre et sans bouche pour exprimer une requête. Il est prêt, non à demander à autrui, mais à prendre de force ou à manipuler, c’est-à-dire à faire des autres des objets de satisfaction[14]. De plus, il refuse le principe de réalité qui inclut la nécessité de compter avec le temps.

La toute-puissance : Au plan spirituel…

  1. La toute-puissance de Dieu n’a rien de commun avec la toute-puissance infantile. Dieu risque par amour : il laisse libre de l’aimer ou de le rejeter. En fait, la toute-puissance de Dieu est indissociable de ses autres attributs : Son amour, Sa bonté, Sa pureté, Sa sainteté…
  2. Être dans la volonté de toute-puissance, c’est souhaiter que tous se plient à nos ordres et exécutent nos quatre volontés ; y compris Dieu qui est sommé de répondre « maintenant au nom de Jésus !». Or, tous ne nous obéissent pas et certains nous résistent. Il y en a même qui ne nous aiment pas !

Personnellement, il nous faut accepter de sortir de la volonté de toute-puissance et laisser Dieu nous dire : « ma grâce te suffit[15] ». Il faut bien l’admettre : Le renoncement à ce que nous croyons être légitime n’est pas facile.

  1. La foi véritable nous garde dans le concret de l’existence. Elle est ancrée, non dans les désirs et l’imagination, mais dans la réalité objective qu’elle ne fuit pas. Elle nous fait devenir homme – humain au plein sens du mot – et le rester « avec » et « pour les autres » en Jésus.
    (Cette dernière phrase est inspirée de Dietrich Bonhoeffer.)
  2. Lorsque l’on aide son prochain, il faut renoncer à user de la toute-puissance qui domine, contrôle et maintient la personne aidée dans la dépendance et l’infantilisme. Autrement dit : Il faut éviter de se croire maître par rapport au disciple, fort par rapport au faible et bien-portant par rapport au malade.[16]

Humilité est le maître mot. « Que celui qui croit être debout prenne garde de tomber ! » (1 Co. 10 : 12)

Jean Vanier, fondateur des Communautés de l’Arche[17], nous invite à se souvenir que « La relation d’aide à un pauvre, un handicapé, un marginal est en réalité la relation d’un pauvre avec un autre pauvre car nous portons tous en nous une fragilité, une pauvreté. »

Plus : Nul homme n’est le sauveur de son prochain. Nul amour, si ardent soit-il, n’est assez puissant pour guérir certains maux. La consolation apaise les souffrances mais certaines guérisons n’appartiennent qu’à Dieu. Notre amour, si fort soit-il, n’est pas tout-puissant !

  1. Même appelés à la plénitude de l’Esprit, nous restons dans l’incomplétude. Il ne s’agit pas d’être plein de soi, dans l’arrogance, le mépris, la suffisance et l’orgueil, fussent-ils ‘spirituels’ ! Aucun chrétien n’est le Corps du Christ à lui tout seul : « 14 […] le corps [du Christ] n’est pas un seul membre, mais il est formé de plusieurs membres. […] 20 Maintenant donc il y a plusieurs membres, et un seul corps. 21 L’œil ne peut pas dire à la main : Je n’ai pas besoin de toi ; ni la tête dire aux pieds : Je n’ai pas besoin de vous.» (1 Co. 12)
  2. Lors de son ministère terrestre, Jésus agissait par la puissance du Saint-Esprit (Luc 4 : 14), mais, dans une complète dépendance du Père, il a toujours renoncé à la toute-puissance.

Ainsi, lors de son arrestation, il dira à l’un de ses disciples[18] : « 53 Penses-tu que je ne puisse pas invoquer mon Père, qui me donnerait à l’instant plus de douze légions d’anges ? » (Mt. 26)

Avant cela, alors que des samaritains refusèrent que l’on prépare pour Jésus un logement, « 54 les disciples Jacques et Jean […] dirent : Seigneur, veux-tu que nous commandions que le feu descende du ciel et les consume ? 55 Jésus se tourna vers eux, et les réprimanda, disant : Vous ne savez de quel esprit vous êtes animés. » (Luc 9)

A noter : dans le livre de l’Apocalypse, Jésus est souvent identifié à « l’agneau qui a été immolé »[19]. L’agneau ne symbolise pas la toute-puissance mais la douceur et la pureté.

La toute-puissance : Au plan social…

Commençons par un fait : Alors que le suicide représente 5% des décès dans la population générale, il représente 14% des décès chez les médecins. Comme l’analyse fort bien le théologien Jean-Marie Gueullette, les médecins dépriment car « tout le monde attend d’eux des prouesses, voire l’impossible. » On les croyait tout-puissants, ils ne le sont pas !

La toute-puissance peut s’exprimer par la domination, le pouvoir (politique, spirituel…), la puissance recherchée pour elle-même, l’argent, le sexe, le sentiment d’être le maître du monde ou du moins, l’un d’entre eux.

« Le pouvoir absolu corrompt absolument. » (Lord Acton)

Rappelons l’expérience vécue par Nebucadnetsar (Dn. 4) Ce roi fut comparé à un arbre vu jusqu’aux extrémités de la terre, dont la cime s’élevait jusqu’aux cieux et dont tout être vivant tirait sa nourriture. Il finit par se dire : « N’est-ce pas ici Babylone la grande, que j’ai bâtie, comme résidence royale, par la puissance de ma force et pour la gloire de ma magnificence ? » (Dn. 4 :  30) Il apprit à ses dépens que le Très Haut domine sur le règne des hommes et qu’il le donne à qui il lui plaît.

Il y a obligation pour chaque être humain de renoncer à la toute-puissance. Ce renoncement à la toute-puissance est fondateur des sociétés humaines. Il réclame toute notre vigilance de citoyen et d’être humain. Seul Dieu dispose de la puissance éternelle, de la toute-puissance et aucun homme ne peut se permettre de rivaliser[20].

Renoncer à la toute-puissance amène à savoir comment poser, s’imposer et imposer des limites : c’est la notion d’interdit, ce qui est parlé (dit) entre (inter) nous et qui nous permet de vivre ensemble[21].

Il n’est pas inutile d’émettre ici une critique sur la technique qui entrouvre des possibles vertigineux, fascine et se présente comme la seule possibilité de progrès et de développement pour toute société. A travers elle, l’homme idolâtre sa force, sa puissance.

C’est ainsi qu’en Occident, nous tentons, par elle, d’asservir et de dominer la nature, la vie (par les manipulations génétiques de l’embryon) et la mort (par l’euthanasie).

Pourtant, il convient de se poser ces questions : Tout ce qui est possible doit-il être entrepris ? Tout ce qui est permis est-il bon ? Je ne le crois pas. On revient à la question des limites, de l’autolimitation.

La technique fascine autant qu’elle effraie : L’histoire a démontré que les sciences et le progrès technique étaient compatibles avec la barbarie. Toute puissance, qu’elle qu’en soit sa nature, suppose une sagesse qui la contrôle, un discernement quant à ses dangers et un amour profond pour l’humain et le prochain[22].

Doit-on pour autant renoncer aux sciences et techniques ? Evidemment non car elles ont contribué à l’amélioration des conditions de vie et montré la grandeur de Dieu à travers sa création. Ceci étant, elles ne doivent pas être laissées à elles-mêmes mais orientés selon des principes éthiques. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme… » (François Rabelais)

Ayant renoncé à la toute-puissance, une bonne perspective quant à la fragilité et à la pauvreté

Les pauvres des béatitudes[23] sont ceux qui se savent en manque. Et ils sont heureux car c’est le manque qui les met en route, qui les met en mouvement vers l’eau.

Esaïe 55 : « 1 Vous tous qui avez soif, venez aux eaux, Même celui qui n’a pas d’argent ! Venez, achetez et mangez, Venez, achetez du vin et du lait, sans argent, sans rien payer ! »

Ap. 21 : 6b : « A celui qui a soif je donnerai de la source de l’eau de la vie, gratuitement. »

A l’inverse :

Ap. 3 : « 17 Parce que tu dis : Je suis riche, je me suis enrichi, et je n’ai besoin de rien, et parce que tu ne sais pas que tu es malheureux, misérable, pauvre, aveugle et nu, 18 je te conseille d’acheter de moi de l’or éprouvé par le feu, afin que tu deviennes riche, et des vêtements blancs, afin que tu sois vêtu et que la honte de ta nudité ne paraisse pas, et un collyre pour oindre tes yeux, afin que tu voies. » (Extrait de la lettre à l’ange de Laodicée)

Luc 6 : « 24 Mais, malheur à vous les riches25 Malheur à vous qui êtes rassasiés… »

La soif est un signe de vie[24]. Quand on se pense en situation de complétude ou de plénitude, il n’y a pas de place pour l’inattendu, il n’y a pas de place pour Dieu.

Aujourd’hui, le manque n’est plus supporté ou mal comblé. Nous devenons avides et encombrons nos vies d’objets, d’images, de sons, de bruit, de nourritures, de boissons au point d’en être parfois dépendants, accros, « addicted ». Nous vivons alors dans l’excès de tout, dans le « toujours plus », dans le trop.

De plus, nos manques doivent être immédiatement satisfaits.

Nous n’apprenons plus à réorienter nos manques et donc nos désirs, nous n’apprenons plus le renoncement, nous n’apprenons plus à faire le deuil de nos pertes. Nous ne voulons plus avoir soif, nous ne voulons plus avoir faim, nous voulons être comblés voire « gâtés pourris »… ce qui nous mène parfois à l’amertume et la morosité. Nous ressemblons alors à ces enfants qui boudent parce qu’ils n’ont pas obtenu satisfaction.

Un changement de perspective est impératif car « Malheur à vous qui êtes rassasiés… » « Quand le manque manque  à quelqu’un, il ne se sent pas très bien[25]. »

Le manque transcendé peut nous amener plus loin et à être autrement. Il est source de vie.

Lors de son ministère terrestre, Jésus a côtoyé les pécheurs, les malades, les blessés de la vie, les pauvres, les enfants, les exclus car c’est auprès d’eux qu’il pouvait déployer son amour et sa puissance.

La fragilité est le lieu privilégié par lequel Dieu offre à l’homme son intervention. C’est par les échardes dans notre chair, dans les fragilités et les faiblesses de notre humanité, que Dieu manifeste sa puissance (2 Co. 12 : 9).

C’est ainsi que contrairement à toute logique humaine, la plus grande fécondité va naître là où il y avait stérilité. C’est ce que nous observons dans le Premier Testament notamment avec Abraham – père d’une multitude – et Sarah, ou avec Anne la mère du prophète Samuel. Dans le Nouveau Testament, Elisabeth, qui était stérile, va donner naissance au plus grand prophète qu’une femme ait porté : Jean-Baptiste (Luc 1 : 7 et Mt 11 : 11).

« Bienheureux les fêlés car ils laisseront passés la lumière. » (Michel Audiard[26])

Dieu n’aime pas nos fragilités en tant que telle. Ce qu’il aime, c’est notre attitude de pauvreté (pour reprendre la première béatitude), c’est-à-dire notre attitude de disponibilité, de dépendance vis-à-vis de lui. Alors seulement, l’être fragile que nous sommes peut devenir fécond et porter du fruit.

Pour qu’il y ait une place pour l’action de Dieu dans notre vie, il faut de la disponibilité devant l’inattendu ; ce qui suppose confiance en Dieu et espérance.

Comme il serait dommage de vivre ce que nous observons par ailleurs : l’exigence de garanties extravagantes auprès des hommes politiques et des compagnies assurances pour porter nos vies sans trembler.

Confiant en Dieu et en Ses ressources, affrontons la vie et notre condition humaine. Tolérons l’aléatoire. Ne comptons pas que tout ira bien mais grandissons toujours enracinés dans l’espérance et sachant prendre des risques. « Ce ne sont pas les risques qu’il faut supprimer – cela on ne le peut pas, les risques sont consubstantiels à la vie dans le temps –, m’ais c’est l’espérance qu’il faut retrouver. » (Chantal DELSOL)

Osons, soyons audacieux.

Et dans un monde de performance et de compétitivité dans lequel bon nombre d’hommes et de femmes sont courbés, inquiets, fatigués, sommés de se conformer au monde des « objets » virtuels, sommés de n’être qu’un individu monétisé et de réussir le bonheur consumériste dans cet âge d’or du monde numérique. N’oublions pas cette réalité, nous sommes humains… juste humain ! Et c’est immense !

Retenons cette « nouvelle équation mathématique » pour résoudre la problématique existentielle, une note mathématique finalement chargée d’espérance : Que nos relations soient « l’alliance de nos faiblesses, la multiplication de nos projets, la soustraction de nos problèmes et la somme de nos promesses » Cette équation-là est supérieure à tous les algorithmes qui déconstruisent l’homme, une équation qui renverse les projets démiurgiques de la toute-puissance.

[1] A notre époque, il y a une dérive compassionnelle qui fait de la victime une figure de l’innocence. Un seul a été victime et sans faute : le Christ. D’ailleurs, « il était blessé pour nos péchés, Brisé pour nos iniquités ; Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, Et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. » (Es. 53 : 5)

[2] Carlos PAYAN

[3] Même si, significativement, il existe un fantasme de parthénogenèse : « Elle a fait un bébé toute seule » chante Jean-Jacques Goldman

[4] Bernard Ugeux, Directeur de l’institut de Science et de Théologie des Religions de Toulouse

[5] Gontran Lejeune. En complément : « Une société est forte de la place qu’elle donne aux plus fragiles. Les personnes ayant un handicap humanisent la société, elles invitent à la relation. » (Association Simon de Cyrène)

[6] Titre d’un libre de Christian Charrière-Bournazel, ancien bâtonnier du barreau de Paris.

[7] Possibilité qu’une chose arrive ou n’arrive pas, éventualité.

[8] On en est même arrivé au concept de « guerre zéro mort » ! C’est un concept absurde même si la mort de soldats émeut à juste titre.

[9] A Dubaï, l’immense tour se conjugue avec une dette publique abyssale : plus de 100 milliards de dollars !

[10] Les richesses à partager ont des limites. « Ce qui est en cause, c’est la logique même de notre fonctionnement économique, dont le dynamisme repose sur l’expansion indéfinie des revenus et de la consommation. » (Cardinal Vingt-trois)

[11] Inspiré et partiellement repris de la page : http://incesteabusetviolence.blogspot.com/2011/01/la-toute-puissance-infantile.html

[12] Inspiré et partiellement repris de la page : http://pierresultan.blogs.nouvelobs.com/tag/toute-puissance%20infantile

Eduquer – du latin educere – signifie conduire hors de soi pour introduire à la réalité.

[13] Il a reconnu sa finitude ontologique.

[14] Inspiré et partiellement repris de la page : http://larevuereformee.net/articlerr/n225/les-racines-de-la-violence

[15] 2 Co. 12 : 9

[16] Inspiré et partiellement repris de la page : http://www.missionvieetfamille.com/index.php/la-relation-daide/desirer-aider

[17] L’Arche travaille étroitement avec des personnes ayant une déficience intellectuelle afin que chaque personne puisse découvrir et exercer pleinement son rôle dans la société.

[18] Celui ayant emporté par l’épée l’oreille d’un serviteur du souverain sacrificateur

[19] Entre autres : Ap. 5 : 6, 12 / Ap. 13 : 8

[20] Illustration : Hérode (Act. 12 : « 21 A un jour fixé, Hérode, revêtu de ses habits royaux, et assis sur son trône, les harangua publiquement. 22 Le peuple s’écria : Voix d’un dieu, et non d’un homme ! 23 Au même instant, un ange du Seigneur le frappa, parce qu’il n’avait pas donné gloire à Dieu. Et il expira, rongé des vers. »)

[21] Les deux derniers paragraphes sont inspirés et partiellement repris de la page : http://www.irenees.net/fr/fiches/analyse/fiche-analyse-73.html

[22] La puissance de Dieu est inséparable de ses autres attributs : notamment sa sagesse et son amour.

[23] Mt. 5 : 3 : « Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux ! »

[24] Être le sel de la terre, c’est donner soif, c’est susciter le désir et donc la vie.

[25] Jacques Lacan

[26] Dialoguiste, scénariste et réalisateur français de cinéma, également écrivain et chroniqueur de presse.

La révolution bioéthique

Dans la destruction du réel, dernier livre de Bertrand Vergely , le philosophe dénonce les trois dernières folies majeures de l’homme fait Dieu, folies qu’il assimile à trois névroses :

La névrose à l’égard de la manière de naître qui se traduit par les nouvelles parentalités, et touche à la dimension d’une fécondation artificielle faisant rencontrer le désir et la technique.
La névrose à l’égard de la dimension relationnelle qui se traduit par l’apparition demain d’un robot affectif, nouveau substitut du rapport à l’autre et impacte la dimension de l’identité
Et la névrose à l’égard du réel qui se traduit par l’avènement d’un monde virtuel engendrant le corps déconnecté de tout ancrage à la réalité.
Tous ces changements ont un même dénominateur, la déconstruction ontologique, ce que les philosophes appellent l’être. Cette destruction de l’être, était hélas prévisible, déjà prédite dans le livre de la Genèse, depuis le Jardin d’Eden, depuis la prétention de l’homme à devenir l’égal de Dieu et cette tentative d’effacer son image en nous.

Cette destruction de l’entièreté associée à notre humanité résulte de la prétention à nier notre finitude, la prétention de nous orienter vers une forme d’autosuffisance singulière.

Ainsi comme l’écrit Bertrand Vergely « L’homme-Dieu est fort tant qu’il n’est pas démasqué. Comme tous les pervers, il n’aime guère que sa perversion soit nommée ».

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Les névroses contemporaines

Dans la destruction du réel, dernier livre de Bertrand Vergely , le philosophe dénonce les trois dernières folies majeures de l’homme fait Dieu, folies qu’il assimile à trois névroses :

  • la névrose à l’égard du réel avec l’avènement d’un monde virtuel engendrant le corps déconnecté de tout ancrage à la réalité.
  • La névrose à l’égard de la dimension relationnelle  nous connectant au monde sans être relié à la table de son prochain
  • La névrose à l’égard de la manière de naître qui se traduit par les nouvelles parentalités, et touche à la dimension d’une fécondation artificielle faisant rencontrer le désir et la technique.

Tous ces changements ont un même dénominateur, la déconstruction ontologique, ce que les philosophes appellent l’être. Cette destruction de l’être, était hélas prévisible, déjà prédite dans le livre de la Genèse, depuis le Jardin d’Eden, depuis la prétention de l’homme à devenir l’égal de Dieu et cette tentative d’effacer son image en nous.

Cette destruction de l’entièreté associée à notre humanité résulte de la prétention à nier notre finitude, la prétention de nous orienter vers une forme d’autosuffisance singulière.

Ainsi comme l’écrit Bertrand Vergely « L’homme-Dieu est fort tant qu’il n’est pas démasqué. Comme tous les pervers, il n’aime guère que sa perversion soit nommée ».

Pour prolonger la réflexion du Philosophe Bertrand Vergely et revenir à ces dimensions du désiré et de l’identité, ces deux thématiques sont en effet importantes, car elles convoquent des dimensions à la fois anthropologiques et métaphysiques …

Aussi chaque dimension autour des notions de désir et d’identité devrait être appréhendée, dans toute leur amplitude.

Cette question autour de ces thèmes du désir et de l’identité nous renvoie ainsi à celle formulée par Edgar Morin sur la complexité de l’individu que l’on tente de segmenter, de catégoriser sans relier les parties de l’identité humaine entre elles. Il faut ainsi penser la complexité humaine dans son identité biologique, subjective, sociale, culturelle et spirituelle. Dans un monde virtuel qui tente de déconnecter, de déraciner le corps du réel, et on oublie alors que l’être, l’identité humaine est aussi inscrite dans la dimension biologique. L’ancrage de l’être humain dans toutes ces composantes, biologique culture, social spirituel sont un principe d’unité et de diversification de l’espèce humaine. Toutes ces dimensions s’intriquent et forment l’identité mais une identité qui n’est pas déconnectée de sa nature également biologique. Or prétendre dissocier ces dimensions, c’est en quelque sorte aliéner ce qui fait l’homme dans son entièreté

Pourtant je ne vais pas me livrer à une explication de textes, mais plutôt vous partager les résonances de ces mots. Les réflexions qui sont les miennes autour du mot désiré et de l’identité « être soi ».

Or avec la fécondation in vitro, la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui, la question posée « Suffit-il d’être désiré pour être aimé et être soi » nous renvoie à nous interroger sur les enjeux de demain face à un changement de paradigme celle de la manière de naître.

Sommes-nous en fait, en train de basculer dans une nouvelle ère de la modernité, celle du transhumanisme ? Un transhumanisme parfois déconnecté qui n’a pas pris toute la mesure de la dimension ontologique de l’homme, en effet notre identité demeure entre autres, enracinée dans le biologique :

Mais qu’est-ce que nous dit cette technique qui gomme la paternité ou la maternité, interfère dans la manière de naître, ouvrant désormais la possibilité de faire jaillir la vie hors de la vie ?

Quelles incidences auront de fait un système technicien qui efface le Père ou la Mère sur la construction de l’être, de son identité, de soi pour reprendre cette question autour de l’identité et du désiré ?

Mais avant d’aller plus loin sur les enjeux et répondre aux éléments déclinés dans cet avant-propos, reprenons la dimension du désiré et celle de l’identité…

La dimension du désiré.

Le mot « désiré » en soi a des résonances forcément multiformes et qui s’applique à la dimension même de l’objet. Le désir se définit en philosophie comme ce qui « nous porte vers une réalité que l’on se représente comme une source possible de satisfaction ».

Il est ainsi étrange que dans notre monde, d’être les témoins d’un glissement sémantique, nous ne parlons plus ainsi de don, d’accueil de l’enfant mais de désir d’enfant. Ainsi nous sommes passés de l’accueil de l’enfant au « désiré ». Nous prenons de fait conscience d’un déplacement, de la part de signifiant dans les mots, allant de l’accueil inconditionnel au désir d’enfant, du don à la satisfaction d’un besoin.

Nous entrons de fait de plain-pied dans un monde de réification, d’envie non nécessairement altruiste, avec en arrière-plan la rupture du lien générationnel.

Avec la dimension du désiré, nous enfonçons enfin dans un monde qui rêve l’aboutissement d’un homme désincarné de son réel, auto construit qui se suffit à lui-même, qui n’a plus besoin de l’autre, qui évacue le relationnel, car le monde technique et numérique répondrait à l’ensemble de ses besoins. A partir du moment où l’enfant n’est plus reçu mais construit (construit par la rencontre entre le désir et la technique), cette construction augure d’un monde où, en dernière analyse, l’homme ne dépend plus que de lui-même : un homme auto-construit qui se suffit à lui-même. Perspective révélatrice d’une profonde solitude et de futures souffrances.

Mais au fond qu’est-ce que cette société qui veut la performance, qui aspire à un désiré, une norme et non à la dimension relationnelle qui touche à l’enfant accueilli tel qu’il est, né depuis des millénaires d’une relation homme et femme et non fécondé par une techno science augurant bien, et inévitablement dépeint par Aldous Huxley, un monde transhumaniste.

Avec la GPA nous passons bien d’une dimension de verticalité, c’est-à-dire celle du lien générationnel, à celle d’une dimension (plus) horizontale, la gestation pour autrui, ce n’est plus la gestation pour l’enfant, mais bien la gestation pour autrui et il y a là avec cette dimension du désiré, une dimension clientéliste qui forcément m’interroge et doit tous nous questionner.

En passant du lien générationnel, à une dimension plus horizontale, il y a de facto une rupture avec une histoire, un passé, une filiation, un héritage. Nous entrons de fait, de plain-pied dans l’horizontalité. L’horizontalité qui avec la GPA s’appuie nécessairement sur les avancées de la science pour faire émerger la vie.  

Au fond la question est aussi la suivante, le désir et aimer suffisent-ils pour combler toutes les dimensions qui toucheront ce qui fait que j’existe ?

La dimension de l’identité

En réfléchissant à la question de l’identité orientée sur le devenir de l’enfant, il semble sans doute important de postuler que l’identité proprement dite se façonne autour d’un environnement multiforme qui ne saurait être seulement réduit à la seule dimension sociale, culturelle, affective, la construction de l’identité de l’enfant est également inséparable de conditions qui touchent à la dimension de la vie prénatale mais également au fait qu’il reçoit un capital épigénétique qui imprime en lui une mémoire parentale. Ce capital épigénétique qui se construit en regard de l’impact de notre environnement et que nous transmettrons potentiellement à notre descendance.

  •   La vie prénatale participe de la construction de l’enfant

Des chercheurs ont en effet en premier lieu postulé que la mémoire parentale et prénatale s’imprime en effet durablement dans l’enfant à naître.  Un enfant sera en effet marqué à la fois par son héritage génétique mais également par le lien utérin qui l’unit très tôt à sa mère, et un enfant à naître peut ressentir négativement les impacts d’une dissociation, d’une rupture, un enfant sera comme touché dans son inconscient par les effets d’une séparation.

Ainsi l’étape de la fécondation et la naissance sont loin d’être une parenthèse sociale, un événement abstrait dans la vie de la mère et de l’enfant à naître du fait même des échanges utérins existant entre l’enfant et sa mère.

Plusieurs chercheurs ont mis à jour, le fait suivant : le fœtus à naître est un être à la sensorialité très développée ce qui va fonder des échanges d’une grande intensité avec la mère, il y aura dès lors comme une empreinte indélébile. Nous savons également aujourd’hui à quel chaos peut mener et aboutir une grossesse qui n’a pas été investie psychiquement par la mère qui s’inscrit dans le déni de la grossesse. Dans le cas de la GPA, la personne qui porte l’enfant ne s’investit pas dans la grossesse d’un enfant qui n’est pas le sien, elle s’inscrit, cette personne dans une prestation de service et une prestation technique.

La « Gestation Par Autrui » conduit de fait à une forme de rupture du lien, et cela touche aussi et au-delà à des questions profondes autour de la vie.

A ce propos une psycho thérapeute écrivait « N’est-il pas tragique de volontairement gommer les attaches de filiations biologiques maternelles et/ou paternelles comme repères majeurs dans la vie d’un enfant, de lui dire implicitement : » Tu oublies tes origines, ce n’est pas si important, tout se passe bien de cette façon aussi » ? Il se fait que non. Ce n’est pas ainsi que les choses se passent » fin de citation.

Ainsi notre identité d’homme et de femme demeure également enracinée dans le biologique et il me semble que l’existence d’une hérédité épigénétique transgénérationnelle est totalement démontrée. L’épigénétique s’exprime au travers de couches d’informations induites par l’environnement au sens large (une mémoire parentale  transmise soit par le Père, soit par la Mère) ; certaines marques épigénétiques pourraient même passer à la descendance.

Les incidences d’un système technicien qui efface la paternité ou la maternité

sur la construction de l’identité

En regard d’une techno science qui rend possible la fécondation sans relation sexuée, que signifiera demain le fait de grandir sans Père  ?

Nous sommes d’ores et déjà les témoins de mutations sociales importantes, les témoins d’un effacement du Père, sous l’influence de la redistribution sociologique des rôles interchangeables des hommes et des femmes au sein d’une civilisation qui réinvente l’humanité, nous assistons ainsi à un mouvement inéluctable «vers une société sans père» dans laquelle la figure paternelle s’efface et l’autorité se délité de tout contenu.. Or gommer le Père c’est aliéner une part de l’essence même de notre humanité, c’est la vider de toute substance spirituelle, c’est proclamer l’immanence sans transcendance.  

Puis avec l’émergence des avancées et des techniques médicales, les progrès de la médecine conduisent à un « jaillissement de la vie qui ne se fait plus dans la vie », et à une sortie demain, du vivant hors du vivant, finalement à l’accomplissement d’une dénaturation de la manière de naître, nous entrons dans un post humanisme annonciateur d’une vision mortifère et de destruction, d’une part de notre humanité, dépouillée de l’amour inconditionnel.

Soulignant la dimension mortifère sur cette dénaturation de la manière de naître, le docteur Benoît Bayle écrivait ainsi en 2004 : « La révolution “conceptionnelle” repose sur une incontestable réification de l’embryon humain. Celui-ci devient objet de surproduction, et par conséquent de destruction de masse, objet de contrôle qualitatif et bientôt peut-être, prothèse thérapeutique. Cette surproduction et cette surconsommation embryonnaire sont l’objet d’un refoulement massif. Leur étude mérite pourtant d’être entreprise, par-delà les enjeux idéologiques qu’elle soulève… La révolution procréatique repose sur une véritable logique de surproduction, de sélection et de destruction des embryons humains ».

De fait dans ces contextes de vision mortifère de la vie, nous apprenons bien que la matrice maternelle et paternelle est indissociable au devenir même de l’enfant, l’enfant à naître peut de fait, ressentir négativement la rupture et être marqué dans sa mémoire prénatale des effets mêmes de cette désunion en quelque sorte.

S’il faut entendre le désir parental, et en effet il faut en effet entendre la souffrance des adultes. Cependant la question de la souffrance de l’enfant doit aussi être entendue. Or nous aurions tendance à oublier que ce qui est en cause, ce n’est pas tant le désir individuel que le bien des enfants. Il s’agit de fait de prendre la mesure de toutes les conséquences des désirs d’adultes qui peuvent amener plus tard de la souffrance dans le cœur des enfants puis l’inscrire durablement dans leurs mémoires.

Gommer, effacer, faire l’impasse, Ignorer les dissociations dans ce rapport utérin peut conduire ainsi à de profonds ravages en appréhendant pas toutes les conséquences d’une dénaturation de la vie du fait du pouvoir de la technique, d’un système technicien prométhéen qui jouerait avec le feu, en aliénant une part de la dimension ontologique d’un être humain, c’est-à-dire son âme, sa dimension spirituelle.  

En outre le besoin bien réel de connaître ses origines donne tort à tous ceux qui nient l’importance des caractéristiques biologiques de l’homme, en y voyant seulement des déterminismes et stéréotypes dont il faudrait se libérer.

Pour illustrer et conclure ce premier propos et conclure sur cette question, je citerai ce médecin pédiatre Janusz Korczak qui s’est engagé toute sa vie pour les droits de l’enfant « Plus le niveau spirituel de l’éducateur est pauvre, plus sa morale est incolore, plus grand sera le nombre des injonctions qu’il imposera aux enfants, non par souci de leur bien, mais pour sa propre tranquillité, et son propre confort égoïste ».

Il est intéressant de noter que Korczak s’était au cours de la seconde guerre mondiale totalement investi dans son travail de pédiatre auprès des enfants d’un orphelinat et qu’il ait volontairement renoncé à sa vie pour ses convictions, cela nous parle pour la grandeur de l’homme. Mais cela est secondaire, en regarde de la force de son message résumé dans cette citation si profonde.
Remerciements de l’auteur : « j’aimerais remercier mes amis Claude et Edmond Boucton, mon Ami le Docteur Jérôme Sainton, sans qui ce texte n’aurait pu être produit avec cette dimension réflexive et cette richesse notamment sur des références à la fois philosophiques et anthropologiques ».