Le monde en pièces

Entre Eugène Ionesco et Albert Camus le traitement philosophique de la peste diffère singulièrement, l’un nous renvoie à une allégorie politique contre toute forme de totalitarisme Il nous faut selon Albert, Camus prendre conscience de la noirceur possible de notre cœur, tandis que pour Eugène Ionesco, le sentiment religieux l’emporte, il confie d’ailleurs en commentant sa pièce de théâtre « Jeux de massacre[6] », avoir toujours eu depuis son enfance un sentiment apocalyptique de l’histoire. Pour Eugène Ionesco, « nous vivons une époque apocalyptique.  Nous vivons tout le temps une époque apocalyptique, à chaque moment de l’histoire c’est l’apocalypse, mais c’est plus ou moins évident, […] tout le monde joue avec le danger apocalyptique. Les hommes sont hantés par cette fin, qui doit venir et qu’ils ont l’air de vouloir précipiter[7] ». La métaphysique de Camus, elle est aux antipodes, elle est celle de l’athée, il refuse l’enfermement et décide de combattre l’idée que tout est fini même si « l’ordre du monde est réglé par la mort », puis d’ajouter dans la bouche du docteur Rieux « peut-être vaut-il mieux pour Dieu qu’on ne croît pas en lui et qu’on lutte de toutes ses forces contre la mort, sans lever les yeux vers ce ciel où il se tait ».

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Auteur Eric LEMAITRE 

Nous sommes le 14 avril 2020, comme de nombreux concitoyens, le jour de Pâques, nous n’avons pas eu ce privilège de célébrer cette fête en famille, de nous rassembler avec nos parents qui avancent dans l’âge. Nous avons été comme privés de ces liens traditionnels qui rassemblent les familles autour d’un repas qui commémore une tradition ancienne celui de vivre des moments de convivialité. Nous avons été comme « confisqués » de vivre cette dimension des retrouvailles, empoignés à demeurer « exilé » dans nos logements, loin des nôtres. Pourtant notre époque moderne atténue l’éloignement, la distance, nous possédons des moyens numériques pour nous relier au reste du monde, et prendre des nouvelles des uns et des autres. Si nous ne sommes pas reliés à nos proches, nous restons finalement comme connectés ! Cependant au fil des jours, des semaines, nous prenons conscience que ce confinement nous fait en fin de compte, découvrir l’artifice, des objets qui marquent la digitalisation de ce monde, que rien ne saurait en soi remplacer ou se substituer à la dimension de l’autre. L’être humain aujourd’hui assigné à résidence reste pour toujours, un être grégaire qui a besoin de vie tactile, d’embrasser la vie, qui exprime au plus profond de lui-même l’attente d’une présence aux autres, de vivre par-dessus tout, dans la collectivité, celle qui brasse nos congénères, nos semblables. Si hélas nous ne regardons plus au ciel et sommes déreliés du cercle amical, nous avons en revanche la compagnie de nos écrans qui nous sauvent de « l’isolement ».

Pourtant chaque journée qui passe devant nos écrans, est une journée finalement anxiogène. Le monde cathodique vient charrier son lot d’informations mortifères, nous sommes rivés aux mauvaises nouvelles du soir qui viennent ajouter à l’inquiétude quotidienne. Même ceux qui semblent être les plus protégés parmi nous ne se sentent plus nécessairement à l’abri. Au cours de la journée du 13 avril, je prenais soin d’appeler mon père que ses petits-enfants appellent affectueusement Papé.

Je doute que notre Papé se croie lui âgé, mais son âge déjà « avancé » l’expose sans doute encore davantage à la violence de ce virus qui ne semble pas épargner nos aînés. Ces jours derniers, mon Père me confiait qu’il se sentait privilégié de bénéficier d’une maison aux larges pièces, d’un vaste jardin, de pouvoir vivre au grand air dans une campagne éloignée de l’urbanité et de ses dangers. Mais au fil des jours qui passent, lui qui dans les premiers jours comme beaucoup d’entre nous, ne ressentaient pas les effets immédiats de la pandémie au plan psychologique, me semble aujourd’hui plus éprouvé, plus inquiet. Hier mon Père que nous appelons affectueusement Sosthène[1], « celui dont la force est préservée », m’annonçait que plusieurs familles de mon village natal avaient été, elles-mêmes directement ou indirectement atteintes par le mal du siècle. Mon propre frère après avoir joint le Papé, m’annonçait que dans une maison de retraite, dans une commune proche de notre village, plusieurs personnes âgées ont été quasiment décimées. Nous avons ce sentiment étrange que personne en soi n’est en réalité à l’abri même exilé, même s’il a le sentiment d’avoir mis suffisamment de barrières autour de lui pour endiguer la férocité du virus. Ce mal se diffuse dans le monde à une allure effrayante, n’épargnant ni les riches, ni les pauvres, ni New York, ni ce village de huit cents âmes où mon Papa réside.

C’est la soudaineté de ce mal qui fait irruption au sein de toutes les nations du monde et dans l’histoire de notre humanité, qui semble surprendre bon nombre d’entre nous. Pourtant personne dans nos médias n’ose qualifier cette pandémie, de fléau, le terme est trop connoté, trop religieux, et encore moins de peste qui nous renvoie à la mémoire du moyen-âge dont à tort beaucoup relèguent son histoire à l’obscurantisme. Pour revenir à ce fléau l’un des plus marquants de l’histoire de notre humanité, la peste envahit l’Europe dès 1347 !  La bactérie Yersinia pestis[2] est arrivée par les routes de la soie, dans des navires de commerce en provenance de la péninsule de Crimée sur les rives de la mer Noire, accosta, puis assiégea finalement la ville de Gênes pour se répandre en véritable fléau, « conquérant » comme une faucheuse, une grande partie de l’Europe, y compris l’Angleterre insulaire.  La peste bubonique extermina beaucoup plus que la moitié de l’Europe, en moins de cinq ans. Le « fléau de Dieu » effraya les peuples de toutes les nations européennes, qui virent dans cette pandémie la main du diable, des juifs ou des lépreux. Les juifs par milliers avaient été les victimes de massacres, de pogrom. Ces populations dans l’ignorance la plus absolue, dans leur folie comme de nos jours[3], ignorèrent sans doute cette culture de l’hygiène qui caractérise le peuple Juif et cette connaissance des consignes données dans les différents chapitres du livre du lévitique.

À propos du Covid.19[4], les sachants s’empressent de nous rassurer, ce n’est pas la peste ! Bien que tout s’y apparente en réalité [même si son origine et son génome différent] à la fois par son ampleur et les symptômes pulmonaires manifestés par les personnes atteintes par la pandémie virale.

Dans cette nouvelle chronique, mon journal de bord en quelque sorte, j’ai voulu fouiller l’histoire des pandémies, ce que la littérature nous apprend, ce qu’elle peut nous enseigner sur la façon dont nous pourrions vivre ces instants d’exil ! « Exil » un mot que j’emprunte à Albert Camus. J’imagine volontiers en ces temps de confinement que beaucoup de mes lecteurs se sont empressés dans leurs logements claquemurés à redécouvrir son œuvre, et notamment cette fiction « la peste », la chronique d’un fléau qui contamina toute la ville d’Oran.

Albert Camus n’est d’ailleurs pas le seul à avoir traité ce sujet, à avoir abordé l’épidémie. La littérature est abondante et en effet plusieurs écrivains ont vu dans la peste des motifs d’inspiration pour décrire les effets dévastateurs de la pandémie parmi ceux qui ont traversé l’épreuve, victimes ou survivants.

Dans le Décaméron, Boccace le Florentin décrit un épisode des ravages de la maladie infectieuse, il dépeint les dommages effrayants de la peste noire qui a atteint Florence au milieu de quatorzième siècle et l’impact de l’épidémie sur toute la vie sociale de la cité. Il brosse le portrait d’une ville frappée par la pandémie et s’attarde sur les contrastes d’une population insouciante, vivant en huis clos en quelque sorte, hors du monde continuant à vaquer à sa frivolité, son insouciance, à vivre comme si de rien n’était, comme si la mort n’avait pas d’emprise sur eux, si la vie irrémédiablement n’était pas éphémère, alors que toute la cité est décimée par une peste violente qui emporte avec elle une grande partie de la population de Florence. Comme l’écrit un journaliste de Marianne, à propos de cette œuvre de Boccace le Florentin, « Le huis clos est un confinement volontaire où l’air de la campagne et l’art de la conversation les protègent des assauts pestilentiels occultes, morbides et mortels »[5].

Plusieurs fresques du moyen-âge évoquent également la terreur éprouvée par la population européenne, et cette terreur illustrée bien souvent par une forme d’hydre s’emparant d’une faux comme pour frapper l’imaginaire et interpeller les populations déjà angoissées par les méfaits du mal. Dans l’œuvre de l’écrivain florentin, Boccace décrit des personnages qui entendent échapper à la réalité, s’en extirpent, ils se racontent des histoires divertissantes, comme pour évacuer le mal, surtout pour refouler la mort. Ce qui est drôle ou cocasse finalement, c’est que rien ne semble avoir changé, nos écrans cathodiques se chargeant aujourd’hui de nous divertir après avoir paradoxalement su créer toutes les conditions de l’anxiété. En réalité, tout est en effet conduit pour nous distraire de soi, comme l’envie de nous détourner du ciel. La mort n’est pas le cadet de nos soucis, à l’inverse pour Eugène Ionesco qu’un de mes amis également blogueur s’est empressé de me faire découvrir, la mort dans l’œuvre du dramaturge est en revanche omniprésente, envahissante, c’est une mort de masse à laquelle les populations sont confrontées, l’épidémie se diffuse partout. A New York avec l’image de cette vaste nécropole érigée à la hâte où l’on entasse les cercueils des sans-abris, des laissés pour compte, l’homme découvre brutalement, brusquement son insignifiance et sans doute si l’on veut bien y réfléchir l’arrogance d’avoir ignoré sa vulnérabilité, l’arrogance de mépriser la dimension de la finitude et de ceux qui croient au ciel. Ionesco décrit toute une cité qui passe ainsi de la vie à la mort, de l’existence au trépas. La mort dans ce récit est inévitable, inéluctable, l’impasse est impossible et aucun enclavement ne résiste à la faucheuse. Eugène Ionesco s’est intéressé aux implications métaphysiques de la pandémie, à l’aspect apocalyptique de l’événement. À l’inverse Albert Camus ne croit pas au ciel et l’écrivain a fait de cet événement la peste, une dimension qui touche à la résistance morale contre l’ennemi qui fait irruption dans la vie d’une cité. Pour Albert Camus, il nous faut finalement combattre la peste brune, le Nazisme, ou tout autre totalitarisme. La peste est en effet une métaphore contre la tyrannie, « la peste brune » susceptible de conditionner les esprits. Il faut donc selon l’auteur la combattre en lui résistant.

La peste est le mal politique, le mal absolu, « la peste c’est nous » ! Entre Eugène Ionesco et Albert Camus le traitement philosophique de la peste diffère singulièrement, l’un nous renvoie à une allégorie politique contre toute forme de totalitarisme Il nous faut selon Albert, Camus prendre conscience de la noirceur possible de notre cœur, tandis que pour Eugène Ionesco, le sentiment religieux l’emporte, il confie d’ailleurs en commentant sa pièce de théâtre « Jeux de massacre[6] », avoir toujours eu depuis son enfance un sentiment apocalyptique de l’histoire. Pour Eugène Ionesco, « nous vivons une époque apocalyptique.  Nous vivons tout le temps une époque apocalyptique, à chaque moment de l’histoire c’est l’apocalypse, mais c’est plus ou moins évident, […] tout le monde joue avec le danger apocalyptique. Les hommes sont hantés par cette fin, qui doit venir et qu’ils ont l’air de vouloir précipiter[7] ». La métaphysique de Camus est aux antipodes de celle traitée par Eugène Ionesco dans sa pièce de théâtre, sa métaphysique est celle de l’athée, il refuse l’enfermement et décide de combattre l’idée que tout est fini même si « l’ordre du monde est réglé par la mort », puis d’ajouter dans la bouche du docteur Rieux « peut-être vaut-il mieux pour Dieu qu’on ne croît pas en lui et qu’on lutte de toutes ses forces contre la mort, sans lever les yeux vers ce ciel où il se tait ».

Sur le même thème, « la peste » nous avons là deux approches singulièrement différentes entre deux auteurs l’un refusant l’abandon, il entre en lutte, refuse la résignation morale et aspire même à la résilience. Pour Albert Camus, son personnage le fameux docteur Rieux, pied à pied, s’oppose avec courage à la maladie, tandis que chez Eugène Ionesco, les personnages sont foudroyés, s’effondrent, cueillis par la mort, ont à peine le temps de méditer sur leur sort sauf pour certains d’exprimer vraiment l’essentiel, l’amour. Dans l’œuvre de Camus, un dialogue de l’action est entamé, invitant à la réflexion. Il n’y a d’ailleurs pas de héros chez Ionesco, aucun personnage ne survit, tandis que Rieux le résistant, lui tient bon et la ville finit par renaître comme l’Europe médiévale, finit par connaître un épilogue plus heureux faisant émerger la renaissance d’une nouvelle civilisation. Pourtant chez Ionesco, certains personnages qui tombent comme des mouches sont habités par la dimension relationnelle, l’amour, l’amitié. La peur même de la mort n’a pas entamé, le désir d’aimer.

En lisant les œuvres des deux auteurs, je suis frappé par quelques similitudes qui me font penser à la ville de Laodicée et à cette lettre qui lui est adressée dans le livre de l’Apocalypse, une ville indolente, tiède, ni froide, ni bouillante et qui fut comme interpelée avant que le grand jour ne surgisse, ne fasse irruption. Eugène Ionesco nous parle d’une ville, d’une place dans le prologue de la pièce de théâtre, les gens « vont faire les commissions, on aperçoit le marché avec du monde achetant et vendant ». Peu avant Eugène Ionesco précise que les gens n’ont ni l’air geai, ni triste.  Camus lui nous décrit la scène d’une ville surnommée la radieuse en langue arabe, une grande cité magrébine, une ville portuaire proche de la méditerranée où chacun s’affaire, commerce, s’enrichit. Puis dans la pièce de Eugène Ionesco, un personnage énigmatique, mystérieux entre en scène, un moine noir, très haut de taille avec cagoule qui traversera toutes les scènes du livre silencieusement. Dans son roman « La peste », Camus fera entrer en scène un rat, le rat pestiférenciel qui portera en lui la contamination de toute une ville, tandis que le moine noir s’apparente à la grande faucheuse.

Ce qui m’a profondément passionné à la lecture de ces textes, c’est leur résonnance, leur modernité par rapport à notre époque et les scènes de vie qui se jouent dans la trame de ces récits qui relatent la tragédie qui fait une irruption soudaine dans la vie d’une cité. Albert Camus exprime dans son œuvre l’étouffement, la pesanteur de l’atmosphère qui se répand au fil de ces dix mois où est imposé la mise en quarantaine de la ville.  L’impression d’abstraction est vécue au début de l’épidémie, ce terme souvent employé dans le récit, une « abstraction » qui nous détourne de l’humain qui résulté d’une épidémie quasi invisible tant qu’elle ne nous concerne pas immédiatement. Nous avons dans le prologue de la pièce de Eugène Ionesco, une scène avec des ménagères déjà soucieuses et au début de l’épidémie dans le déni « Seulement les singes attrapent cette maladie » […] « mais heureusement nous avons des chiens et des chats » et après les ménagères des hommes interviennent et expriment un discours plus politique et s’emploie à discourir sur les solutions sanitaires !

Ce qui m’a fait sourire entre autres, c’est le propos de ce premier homme qui apparait dans la pièce « Nous sommes tous des idiots, hélas nous sommes gouvernés par des imbéciles […] un deuxième intervient [..] il faudra trouver un remède à cela, ce remède est introuvable […] il y avait pourtant une solution, pas très agréable. Mais c’était la seule ! » Un dialogue qui nous montre que la nature humaine ne change pas en réalité, que la nature de ces propos nous les avons entendus, nous renvoie à ces débats interminables et qui tournent en rond, des débats futiles et qui illustrent encore une fois la comédie humaine.

Le roman de Camus, la pièce de théâtre de Eugène Ionesco ont quelque chose finalement d’intemporel, d’universel, l’humain est au cœur de leurs réflexions, montrant finalement la profondeur ou la superficialité des discours, la lâcheté et l’héroïsme, la vulnérabilité et l’insouciance, l’éveil comme la noirceur des cœurs. Le travail d’écriture des deux auteurs nous décrit finalement la rapidité de l’effondrement, comme si nos mondes ont été fondés non sur le roc, mais sur le sable. La crise pandémique nous révèle en soi que nous sommes amarrés à rien de solide.  Prosaïquement nous nageons dans un monde liquide sans attaches, déraciné. Avec le confinement nous allons vers un monde en pièces, morcelé, dissocié, certes virtuellement nous restons connectés, mais nous sommes comme apeurés « chacun doit accepter de vivre le jour et seul en face du ciel [8]». Avec le prolongement du confinement, le déferlement du virus dans l’ensemble de notre monde, et sa propagation quasi exponentielle, interviennent des sentiments mitigés, Albert Camus fait dire à l’un de ses personnages « On sait trop bien, qu’on ne peut avoir confiance en son voisin qu’il est capable de nous donner la peste à votre insu, de profiter de votre abandon pour vous infecter », l’actualité du covid nous rapporte des attitudes similaires, la suspicion des personnes mal intentionnés, transformant leur entourage en pestiférés dangereux. Le voisin devient alors le suspect, le coupable éventuel. Dans la pièce de Ionesco « Jeux de massacre », tandis que l’épidémie infectieuse est seule responsable des ravages meurtriers, l’un des personnages à propos de la mort d’un enfant victime lui aussi de la peste, interpelle « Qui a pu faire ça ? »  Un autre personnage entre en scène, le quatrième homme interjette et d’un ton affirmatif, assure « Je sais qui c’est. Je les ai confiés ce matin à ma belle-mère. Elle en voulait toujours à ces enfants. Parce qu’elle me déteste. Il y a longtemps depuis toujours. »[9]. Le monde dans son affolement irrationnel recherchera des coupables, forcément hier les juifs, les lépreux, aujourd’hui les chrétiens de Mulhouse.

Après la solidarité des assiégés, le monde est en miettes, chacun pensant d’abord à sa survie « La maladie avait forcé les habitants, à une solidarité d’assiégés, mais brisait en même temps, les associations traditionnelles et renvoyait les individus à la solitude ». Nous applaudissons aujourd’hui l’infirmière courageuse qui avec la peur au ventre se rend au chevet de ses malades, mais combien de temps dureront nos applaudissements, à nos balcons, fenêtres et portes. Bientôt nous risquerons bien à nouveau de fermer les écoutilles et de considérer ces blouses blanches comme de potentielles pesteuses. Combien de temps durera la solidarité des assiégés ? Ce qui me renvoie à l’épisode des « Je suis Charlie » où nous faisions l’éloge des policiers, les gens les embrassaient dans la rue, leur offraient des bouquets de fleurs, quelques années plus tard, les mêmes leur jetèrent des pavés à la figure. Ainsi va le monde, comme l’écrit si bien un ami philosophe !

Pourtant dans les scènes de confinement relatées au fil des pages dans la pièce de Eugène Ionesco, nous avons là des personnages qui enfin possèdent une identité ou plutôt un prénom comme l’exposé de l’intime au milieu de l’intime, ils se nomment Jean et Pierre, ils ont bravé les interdits, rejoignent celles qu’ils aiment Jeanne et Lucienne. Le fait d’être ensemble atténue leur peur, tempère leurs frayeurs. Les couples s’interrogent, questionnent les motifs de cette pandémie qui est venue faucher leurs voisins de palier. Ils tentent de sonder les origines, les causes, les raisons qui conduisent à cette épidémie mortelle « C’est peut-être une punition ? » disent tour à tour Jeanne et Lucienne, elles témoignent et avouent respectivement leurs craintes, leurs peurs, éprouvent des gestes de tendresse et vont à l’essentiel, l’amour de l’autre. Puis le mal finit par les ronger, Jeanne et Pierre éprouvent le mal qui les gagne. Pierre est rongé de l’intérieur, Jeanne est tenaillée par la douleur, les mots de leurs aimants les consolent, mais la peur les gagne également. Jeanne et Pierre finissent par trépasser, emportés par le mal.

Dans ce monde occidental, nous avons refoulé la mort, nous lui avons interdit l’accès à notre vie, tandis qu’au moyen-âge la mort a été apprivoisée, elle était familière et peut-être cette dernière nous pressait de donner du sens à la vie. La mort en occident éveille a contrario des sentiments de rejet, de répulsion et pourtant malgré ce processus de refoulement, elle s’invite dans le quotidien. Le directeur général de la santé s’invite chaque dans la lucarne cathodique et égrène jour après jour le nombre de victimes causé par le Covid19.  Après une longue censure sociale de la mort, la mort est devenue le sujet dont on parle, dont on ne peut pas faire l’impasse, même le confinement ne nous met pas à l’abri, en sécurité. Nous sommes invités sans doute à regarder au ciel au-delà de notre condition de claquemuré. Le 5 Avril, le grand rabbin monsieur Haïm Korsia citait le texte de Esaïe chapitre 26.20 « Va, mon peuple, entre dans ta chambre, et ferme la porte-derrière toi ; cache-toi pour quelques instants, jusqu’à ce que la colère soit passée. Car voici, l’Éternel sort de sa demeure, pour punir les crimes des habitants de la terre ; Et la terre mettra le sang à nu, elle ne couvrira plus les meurtres. ». Les textes des évangiles nous invitent parfois à entrer dans notre chambre, non pour nous lamenter, mais pour vivre un moment à part. Ce moment à part n’est pas la résignation, ni le sentiment d’abandon, mais pour nous, nous tous, le devoir de réorienter notre vie, la prise de conscience que nos congénères ne sont pas les seuls fautifs, que nous avons à prendre notre part, celle de notre propre responsabilité. Le monde en pièces ne saura être reconstruit sans la repentance de chacun, sans le mea culpa de tous, sans la prise de conscience qu’une part d’ombre en nous est à dénoncer. Le monde occidental s’est longtemps appuyé sur la raison, s’est construit sur le principe de séquençage, de séparation rationnelle des tâches, de découpage et de segmentation des populations pour les catégoriser : « diviser les difficultés que j’examinerais [10]» (Descartes), « la division du travail est le produit d’un penchant naturel à tous les hommes qui les porte à trafiquer, à faire des trocs et des échanges d’une chose pour une autre » (Adam Smith), « divise et règne » (Machiavel). Le résultat en fut finalement une déconstruction de notre monde, nous avons souhaité la performance et nous voici acculé à prendre en compte notre fragilité, nous avons aspiré à dominer et voici que les pouvoirs sont sur le point de vaciller et de s’effondrer, nous avons pensé que seule la raison peut sauver le monde et nous balbutions aujourd’hui dans nos incertitudes et nos doutes.

Ce monde divisé, taillé en pièces, ce monde aujourd’hui dissocié nous invite aujourd’hui à tout sauf la division, il nous presse à faire « reliance », à nous relier aux autres, au-delà de nos différences, à bâtir un monde commun fondé sur des actes d’amour sans refouler l’idée de notre finitude. Ce temps étrange que nous vivons ; nous invite à prendre en compte notre fragilité et à résister à la tentation de renoncer à notre liberté, à combattre l’idée d’abdiquer notre liberté, à la raison d’une machine qui réfléchirait nos actes et nos gestes à notre place. La tentation que je pressens au plus profond de moi, est que finalement nous lui cédions, que nous cédions aux promesses et aux charmes d’une technologie dont la seule prétention serait de nous sauver de l’ancien monde. Au fond le roman de Albert Camus, nous renvoie à une relecture toujours dystopique, il nous convie à la résistance d’une autre forme de totalitarisme à laquelle nous avons été obligés ! Ce totalitarisme salutaire, nous l’avons accepté, mais nous ne devons pas nous résigner à l’abandon de notre liberté. N’abandonnons pas notre liberté à la seule raison autosuffisante, cette raison qui ne devrait en aucun cas nous susurrer que c’est seulement en elle qu’il nous faudrait investir.  Il nous appartient désormais de résister à la tentation de l’isolement, il importe après ce confinement forcé de créer ou de recréer des liens, de faire communauté avec les autres, sans les abandonner, sans les exclure, sans les rejeter. Notre hyper individualisme est né de nos divisions respectives, c’est aujourd’hui le temps de nous ressourcer dans la dimension de la rencontre avec notre prochain et de retourner à la dimension d’un ciel d’où nous viendra en réalité le secours.

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[1] Prénom donné par mon frère Hervé quelques années auparavant en s’inspirant de la lecture de Jean d’Ormesson, écrivain apprécié par la famille. Sosthène duc de Vaudreuil dans cette fameuse œuvre de Jean d’Ormesson est le vieux patriarche de la Famille du Plessis.

[2] L’autre nom donné à la Peste, la bactérie fut découverte en 1894 par Alexandre Yersin, un bactériologiste franco-suisse travaillant pour l’Institut Pasteur, durant l’épidémie de peste à Hong Kong,

[3] La folie de la victimisation demeure une caractéristique de notre époque, rien n’a réellement changé. L’église évangélique de Mulhouse a vécu les pires accusations, accompagnées d’ignobles menaces de mort. Les temps ne changent pas ! Les hommes du XXIe siècle sont pareils à ceux qui peuplaient le moyen-âge. La méchanceté gagne les peuples qui cherchent des boucs émissaires à leurs souffrances.

[4] La pandémie de la peste noire, a été propagée par la bactérie Yersinia pestis qui avait sévi en Asie, au Moyen-Orient, au Maghreb et en Europe. Elle se déclare pour la première fois en 1334 dans la province de Hubei en Chine. De 1347 à 1352, la peste noire fait 25 millions de victimes en Europe, ce qui correspond environ à la moitié de la population européenne à l’époque et 25 millions de morts dans le reste du monde, notamment en Chine, en Inde, en Égypte, en Perse et en Syrie. La peste noire est principalement transmise par les poux, les piqûres de puces et les rats. Le génome du SARS-CoV-2 a été lui rapidement séquencé par les chercheurs chinois. Il s’agit d’une molécule d’ARN d’environ 30 000 bases contenant 15 gènes, dont le gène S qui code pour une protéine située à la surface de l’enveloppe virale (à titre de comparaison, notre génome est sous forme d’une double hélice d’ADN d’une taille d’environ 3 milliards de bases et il contient près de 30 000 gènes).

[5] La citation est extraite de : https://www.marianne.net/debattons/les-mediologues/de-la-grande-peste-de-1348-au-covid-19-de-2020-chaque-epoque-son-huis-clos

[6] Jeux de massacre est une pièce de théâtre d’Eugène Ionesco inspirée du Journal de l’Année de la Peste de Daniel Defoe, la pièce s’est d’abord appelée L’Épidémie. La pièce de théâtre est éditée par les éditions Folio Théâtre.

[7] Extrait de la préface p30 Jeux de massacre Éditions Folio Théâtre.

[8] Extrait de la Peste page 73. Document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi

[9] Extrait p56 Jeux de massacre Éditions Folio Théâtre.

[10] Descartes, discours de la méthode. Deuxième partie

De la fragilité

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Nous remercions Alain LEDAIN pour cette contribution d’une grande profondeur et d’une immense richesse et qui traite de la fragilité

« Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort. » (2 Co 12, 10)

Dans ces contextes de changement de paradigme, abordé le thème de la fragilité, est-ce bien inspiré ? Ne devions-nous pas nous attendre à aborder celui de « La puissance » ?

Pourtant dans notre propos, il ne s’agit pas ici de faire l’apologie de la fragilité… comme il ne s’agit pas non plus de la nier.

L’homme est par essence fragile, il est à tout instant confronté à cette réalité qui se caractérise par, le handicap, la maladie et la mort. Ses fragilités peuvent être physiques certes, mais aussi relationnelles, sociales, psychologiques ou spirituelles.

Pour reprendre l’accroche d’un colloque, nous sommes « Tous fragiles, tous humains » même si nous ne sommes pas tous « visiblement fragiles » car atteints dans notre corps ou notre intelligence.

Plus ! A la condition humaine sont aussi attachées la faiblesse, l’incomplétude et la finitude. D’ailleurs, dans ce qui suit et pour simplifier, nous inclurons ce vocable – faiblesse, incomplétude et finitude – dans le terme « fragilité ».

Mais qu’entend-t-on par ces derniers mots ? L’incomplétude renvoie à nos manques, la finitude à nos limites : nous vivons dans un espace et un temps donnés ; nous ne sommes pas complètement maîtres de notre vie.
L’apôtre Jacques parle de l’homme comme d’une « vapeur qui paraît pour un peu de temps et qui disparaît ensuite. » (Jc. 4 : 14) Aussi, nous exhorte-t-il à ne pas être présomptueux dans nos projets et quant à notre devenir : « Si Dieu le veut, nous vivrons, et nous ferons ceci ou cela. » (Jc. 4 : 15)

Sur un registre identique et touchant à notre fragilité, le Roi Salomon écrivait : « Ne te vante pas de ce que tu feras demain, car tu ne sais pas même ce qui arrivera aujourd’hui. » (Pr. 27 : 1) Quant à cette autre figure Biblique, Moïse, il priait : « Enseigne-nous à bien compter nos jours, afin que nous appliquions notre cœur à la sagesse. » (Ps. 90 : 12) Lui aussi nous rappelle que nous ne sommes pas immortels. Sénèque écrira beaucoup plus tard (entre 49 et 55) : « Vous vivez comme si vous deviez toujours vivre ; jamais vous ne pensez à votre fragilité. Vous ne remarquez pas combien de temps est déjà passé, vous le perdez comme s’il venait d’une source pleine et abondante […] » (De la brièveté de la vie.)

Quel tableau ! Devons-nous pour autant en être déprimés ?

Tout dépend de notre regard. Notre but est ici précisément de changer la perspective déprimante que nous pourrions en avoir.

Un autre point de vue est possible. Sa mise en perspective peut amener la paix et le repos de Dieu dans nos vies et dans celle de notre société… si nous les voulons bien et si nous acceptons d’être réconciliés avec notre condition humaine et les limités à accepter non comme une forme de servitude pesante mais comme une aspiration à la dépasser en nous rapprochant de notre créateur et en épousant la nature divine au travers de Jésus-Christ.

Remarquable : En Jésus-Christ, Dieu s’est rendu fragile et vulnérable

Il est étrange de noter que l’homme tout au long de son histoire ait aspiré à dépasser ses propres limites, ait souhaité transcender sa finitude, ait aspiré à embrasser la toute-puissance que lui confère la technique comme élément support de sa propre transformation. Inversement Dieu fait exactement le chemin inverse, puisque Dieu embrasse la condition humaine, se fait Roi serviteur, revêt la condition de l’homme.

Les écritures nous enseignent que Christ de condition divine s’est fait pleinement homme. Ainsi Dieu a rêvé l’incarnation et l’homme dans un processus contraire engage le cheminement contraire, celui du déni de sa finitude pour rêver à épouser une condition divine afin d’être si possible immortel. L’homme démiurge menant l’introspection de son ADN et décidant de modifier, de combiner, d’associer une autre nature afin de réparer son imperfection d’homme mortel.

Dans un contexte de post humanisme, la fragilité et la vulnérabilité ont une résonnance contraire avec les idéologies de dépassement portés par une époque bercée par le monde de la toute-puissance. Les mots fragilité et vulnérabilité sont de la sorte en opposition avec l’air du temps qui glorifie l’énergie et la vitalité, la croissance et la performance, les vainqueurs et les bien-portants. Une époque anxiogène et bien fatigante pour ceux qui ne s’estiment pas à la hauteur.

Et pourtant, c’est dans la fragilité et la vulnérabilité que le (Dieu) Tout-Puissant s’est pleinement révélé en Jésus-Christ.

Il a pleinement assumé la condition humaine étant un vrai homme – absolument homme et absolument Dieu –. Dans son humanité, il s’est d’abord présenté comme un petit enfant (dans un état de faiblesse humaine) né dans une crèche (dans la faiblesse sociale), puis il s’est montré capable de pleurer (Jn 11 : 35), de souffrir et de mourir sur une Croix.

« Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus Christ lequel […] s’est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes ; et ayant paru comme un simple homme, il s’est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix. » (Selon Ph. 2 : 5-8)

Dans Mt. 25, Jésus s’identifie aux personnes en situation de manque ou grande fragilité : les assoiffés, les affamés, les étrangers, les malades, les prisonniers.

Vanterons-nous pour autant la fragilité et la vulnérabilité ?… Non, ce serait tomber dans un piège.

En fait, la fragilité nous confronte à un double risque : La complaisance dans la fragilité et la négation de la fragilité.

La complaisance dans la fragilité

La fragilité n’est pas une fin en soi. Nous verrons qu’elle est un chemin où Dieu nous rencontre. Il ne s’agit pas de s’y complaire ; comme il ne s’agit pas non plus de la dramatiser ou de s’y enfermer.

Elle ne doit pas mener à une posture victimaire (à se cacher derrière le masque de la victime) ou à y trouver son identité. Elle ne peut être un alibi pour ne plus avancer ou ne pas se remettre en cause[1]. « Tu ne peux pas vivre sur ta blessure, tu n’es pas ta blessure, ton identité n’est pas dans ta blessure, mais elle se trouve dans le Christ. »[2]

Ceci étant posé, il faut manifester beaucoup de tact et de délicatesse pour rencontrer et aider les personnes qui ont vécu des circonstances si éprouvantes qu’elles n’arrivent plus à se livrer.

D’une manière ou d’une autre, nous ne pouvons pas nous plaire dans la souffrance car Dieu n’aime pas la souffrance. Alors que la vie peut mettre à genou, Il veut l’homme libre et debout. Pour s’en convaincre, il suffit de lire les Evangiles. Combien de personnes courbées Jésus n’a-t-il pas redressées lors de son ministère terrestre ! Mais avant toute guérison, Jésus pouvait poser une question : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » (Mc 10 : 51), « Veux-tu être guéri ? » (Jn 5 : 6)

La négation de la fragilité

La fragilité ne doit pas être refusée ou niée, au risque de céder à la tentation de la toute-puissance. Nous allons y revenir plus loin.

« Vous serez comme Dieu » (Gn. 3 : 5) propose le serpent qui suggère à Adam et Eve de renoncer à leur humanité en franchissant la limite posée par Dieu. Voulant s’échapper de leur condition humaine, voulant tout sans aucune limite, ils ont chuté et ils ont introduit la mort et la peur de manquer.

Dans le même esprit, lors de la tentation de Jésus, le Diable dira : « Je te donnerai toute cette puissance, et la gloire de ces royaumes ; car elle m’a été donnée, et je la donne à qui je veux. » (Luc 4 : 6a)

La fragilité et les limites sont normales. Nous n’avons pas à en avoir honte. Les limites sont une chance de don, de partage, de réciprocité et de complémentarité.

En ce sens, la relation homme-femme est très significative. Parce que je suis un homme (mâle), je suis « handicapé » du féminin. La différence sexuelle prouve que je n’ai pas tout, que je ne suis pas auto-suffisant : je ne peux pas faire advenir la vie à moi tout seul ![3] Il me faut accepter le manque, la limite qui suscite le désir de l’Autre (le féminin) et la vie.

Nous devons aussi accepter la fragilité et la vulnérabilité pour comprendre celles d’autrui. Toute personne doit être entourée, protégée.

En ce qui concerne le chrétien, même s’il peut tout par Celui qui le fortifie (Ph. 4 : 13), même s’il est plus que vainqueur par Celui qui l’a aimé (Rm 8 : 37), il n’en reste pas moins soumis aux périls, à la peine, à la faim, à la soif, au froid et au dénuement. (2 Co. 11 : 23-27)

Au plan social, « la dimension humaine d’une société se mesure à la manière dont elle traite la fragilité de ses membres »[4] et « Anesthésier la fragilité, c’est tuer l’humanité. »[5]

Au plan ‘spirituel’, « La religion pure et sans tache, devant Dieu notre Père, consiste [entre autre] à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions… » (Jc 1 : 27a), c’est-à-dire à apporter une aide aux plus fragiles.

Pourquoi ne pas céder à la tentation de la toute-puissance

Parce que la fragilité est attachée à la vie, à son côté imprévisible, non maîtrisable, l’homme recherche le risque zéro, quitte à brader sa liberté. Peut-être une explication à « la rage sécuritaire[6] » de ces dernières années.

Le risque zéro, c’est oublier que la vie est faite d’incertitude, de contingence[7] et d’accidentalité et que la surprotection fragilise[8]. Il est impossible de tout maîtriser. Tout contrôler, tout prévoir, tout anticiper, c’est s’interdire l’émergence du radicalement nouveau, c’est réduire l’humain à l’état de robot, de machine, d’objet. Parfois, il faut savoir lâcher prise.

Le principe de précaution ne s’applique pas dans tous les domaines de la vie… Pour nous, chrétiens, dans les tempêtes de la vie, nous nous souvenons de cette parole de Jésus : « N’ayez pas peur ! » (Mc 6 : 50)

La sécurité n’est pas la première fonction d’un état. Sa première fonction est de protéger les plus faibles ; ce qui a pour conséquence la sûreté comme attribut de la liberté, le combat contre la loi de la jungle, c’est-à-dire la loi du plus fort, celle de l’animal.

Le refus des limites…

… amène l’homme à la démesure sans aucun rapport avec la « vie abondante ».

Voilà qui explique le gigantisme, l’aspiration à toujours plus grand, plus haut – la plus haute tour du monde, la tour Burj Dubaï inaugurée le 4 janvier 2010, mesure 828 mètres de haut et a coûté 1,5 milliards de dollars[9] –, plus loin, plus vite et la tyrannie du « toujours plus ».

Il faut intégrer la notion de limites, sortir de certaines pensées et en tirer toutes les conséquences ; par exemple, arrêter de vivre selon le modèle mercantile et consumériste supposant les ressources de la terre pratiquement infinies, quasi-inépuisables et sans fin renouvelables[10].

Nos besoins réels sont limités, nos appétits illimités. Ces derniers doivent être limités par notre volonté et avec l’aide de Dieu au risque de créer un désordre personnel et social.

La puissance, elle, nous confronte au risque de la « toute-puissance ».

La caractéristique centrale des enfants est celle de la toute-puissance : « Je veux ici et maintenant ! Exécution immédiate, cela presse et ça n’est pas négociable. Ne me parlez pas de condition pour la satisfaction complète et totale de mon besoin ! Tout l’univers doit chercher à le satisfaire. » « Je suis la Loi, je fais la pluie et le beau temps. »

Dans la première enfance, la toute-puissance infantile est à son apogée et tous sont sommés de se soumettre à cette toute-puissance. C’est ainsi que le bébé crie éperdument lorsqu’il a faim et seule la tétée peut le satisfaire. Il pleurera jusqu’à satisfaction ou, si la satisfaction ne vient pas, il pleurera jusqu’à épuisement complet. La mère ne pourra qu’obtempérer[11].

L’époque de la toute-puissance infantile est celle de l’égocentrisme total et de l’intolérance à la frustration.

Lorsque l’enfant va grandir, la toute-puissance devra céder la place à la réalité et aux contraintes inhérentes à celle-ci. Chez l’enfant, cette acceptation ne sera ni immédiate, ni naturelle. Il oscillera entre le déni d’une certaine réalité et la prise de conscience de son impuissance[12].

Devenir adulte, c’est faire le deuil de la toute-puissance infantile, de l’immortalité et d’un monde dont on avait cru être le centre. C’est un travail d’humanisation qui ne se fait pas facilement et sans peine.

L’adulte a appris qu’il est limité[13], qu’il partage avec les autres la même condition humaine ; alors que les enfants se croient éternels et seuls au monde. Pour eux, l’Autre n’existe pas.

L’adulte accepte le manque et ne revendique pas sans cesse une totale satisfaction et un comblement parfait de ses besoins. L’adulte immature, lui, peut se transformer en bébé hurleur, sans oreille pour entendre et sans bouche pour exprimer une requête. Il est prêt, non à demander à autrui, mais à prendre de force ou à manipuler, c’est-à-dire à faire des autres des objets de satisfaction[14]. De plus, il refuse le principe de réalité qui inclut la nécessité de compter avec le temps.

La toute-puissance : Au plan spirituel…

  1. La toute-puissance de Dieu n’a rien de commun avec la toute-puissance infantile. Dieu risque par amour : il laisse libre de l’aimer ou de le rejeter. En fait, la toute-puissance de Dieu est indissociable de ses autres attributs : Son amour, Sa bonté, Sa pureté, Sa sainteté…
  2. Être dans la volonté de toute-puissance, c’est souhaiter que tous se plient à nos ordres et exécutent nos quatre volontés ; y compris Dieu qui est sommé de répondre « maintenant au nom de Jésus !». Or, tous ne nous obéissent pas et certains nous résistent. Il y en a même qui ne nous aiment pas !

Personnellement, il nous faut accepter de sortir de la volonté de toute-puissance et laisser Dieu nous dire : « ma grâce te suffit[15] ». Il faut bien l’admettre : Le renoncement à ce que nous croyons être légitime n’est pas facile.

  1. La foi véritable nous garde dans le concret de l’existence. Elle est ancrée, non dans les désirs et l’imagination, mais dans la réalité objective qu’elle ne fuit pas. Elle nous fait devenir homme – humain au plein sens du mot – et le rester « avec » et « pour les autres » en Jésus.
    (Cette dernière phrase est inspirée de Dietrich Bonhoeffer.)
  2. Lorsque l’on aide son prochain, il faut renoncer à user de la toute-puissance qui domine, contrôle et maintient la personne aidée dans la dépendance et l’infantilisme. Autrement dit : Il faut éviter de se croire maître par rapport au disciple, fort par rapport au faible et bien-portant par rapport au malade.[16]

Humilité est le maître mot. « Que celui qui croit être debout prenne garde de tomber ! » (1 Co. 10 : 12)

Jean Vanier, fondateur des Communautés de l’Arche[17], nous invite à se souvenir que « La relation d’aide à un pauvre, un handicapé, un marginal est en réalité la relation d’un pauvre avec un autre pauvre car nous portons tous en nous une fragilité, une pauvreté. »

Plus : Nul homme n’est le sauveur de son prochain. Nul amour, si ardent soit-il, n’est assez puissant pour guérir certains maux. La consolation apaise les souffrances mais certaines guérisons n’appartiennent qu’à Dieu. Notre amour, si fort soit-il, n’est pas tout-puissant !

  1. Même appelés à la plénitude de l’Esprit, nous restons dans l’incomplétude. Il ne s’agit pas d’être plein de soi, dans l’arrogance, le mépris, la suffisance et l’orgueil, fussent-ils ‘spirituels’ ! Aucun chrétien n’est le Corps du Christ à lui tout seul : « 14 […] le corps [du Christ] n’est pas un seul membre, mais il est formé de plusieurs membres. […] 20 Maintenant donc il y a plusieurs membres, et un seul corps. 21 L’œil ne peut pas dire à la main : Je n’ai pas besoin de toi ; ni la tête dire aux pieds : Je n’ai pas besoin de vous.» (1 Co. 12)
  2. Lors de son ministère terrestre, Jésus agissait par la puissance du Saint-Esprit (Luc 4 : 14), mais, dans une complète dépendance du Père, il a toujours renoncé à la toute-puissance.

Ainsi, lors de son arrestation, il dira à l’un de ses disciples[18] : « 53 Penses-tu que je ne puisse pas invoquer mon Père, qui me donnerait à l’instant plus de douze légions d’anges ? » (Mt. 26)

Avant cela, alors que des samaritains refusèrent que l’on prépare pour Jésus un logement, « 54 les disciples Jacques et Jean […] dirent : Seigneur, veux-tu que nous commandions que le feu descende du ciel et les consume ? 55 Jésus se tourna vers eux, et les réprimanda, disant : Vous ne savez de quel esprit vous êtes animés. » (Luc 9)

A noter : dans le livre de l’Apocalypse, Jésus est souvent identifié à « l’agneau qui a été immolé »[19]. L’agneau ne symbolise pas la toute-puissance mais la douceur et la pureté.

La toute-puissance : Au plan social…

Commençons par un fait : Alors que le suicide représente 5% des décès dans la population générale, il représente 14% des décès chez les médecins. Comme l’analyse fort bien le théologien Jean-Marie Gueullette, les médecins dépriment car « tout le monde attend d’eux des prouesses, voire l’impossible. » On les croyait tout-puissants, ils ne le sont pas !

La toute-puissance peut s’exprimer par la domination, le pouvoir (politique, spirituel…), la puissance recherchée pour elle-même, l’argent, le sexe, le sentiment d’être le maître du monde ou du moins, l’un d’entre eux.

« Le pouvoir absolu corrompt absolument. » (Lord Acton)

Rappelons l’expérience vécue par Nebucadnetsar (Dn. 4) Ce roi fut comparé à un arbre vu jusqu’aux extrémités de la terre, dont la cime s’élevait jusqu’aux cieux et dont tout être vivant tirait sa nourriture. Il finit par se dire : « N’est-ce pas ici Babylone la grande, que j’ai bâtie, comme résidence royale, par la puissance de ma force et pour la gloire de ma magnificence ? » (Dn. 4 :  30) Il apprit à ses dépens que le Très Haut domine sur le règne des hommes et qu’il le donne à qui il lui plaît.

Il y a obligation pour chaque être humain de renoncer à la toute-puissance. Ce renoncement à la toute-puissance est fondateur des sociétés humaines. Il réclame toute notre vigilance de citoyen et d’être humain. Seul Dieu dispose de la puissance éternelle, de la toute-puissance et aucun homme ne peut se permettre de rivaliser[20].

Renoncer à la toute-puissance amène à savoir comment poser, s’imposer et imposer des limites : c’est la notion d’interdit, ce qui est parlé (dit) entre (inter) nous et qui nous permet de vivre ensemble[21].

Il n’est pas inutile d’émettre ici une critique sur la technique qui entrouvre des possibles vertigineux, fascine et se présente comme la seule possibilité de progrès et de développement pour toute société. A travers elle, l’homme idolâtre sa force, sa puissance.

C’est ainsi qu’en Occident, nous tentons, par elle, d’asservir et de dominer la nature, la vie (par les manipulations génétiques de l’embryon) et la mort (par l’euthanasie).

Pourtant, il convient de se poser ces questions : Tout ce qui est possible doit-il être entrepris ? Tout ce qui est permis est-il bon ? Je ne le crois pas. On revient à la question des limites, de l’autolimitation.

La technique fascine autant qu’elle effraie : L’histoire a démontré que les sciences et le progrès technique étaient compatibles avec la barbarie. Toute puissance, qu’elle qu’en soit sa nature, suppose une sagesse qui la contrôle, un discernement quant à ses dangers et un amour profond pour l’humain et le prochain[22].

Doit-on pour autant renoncer aux sciences et techniques ? Evidemment non car elles ont contribué à l’amélioration des conditions de vie et montré la grandeur de Dieu à travers sa création. Ceci étant, elles ne doivent pas être laissées à elles-mêmes mais orientés selon des principes éthiques. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme… » (François Rabelais)

Ayant renoncé à la toute-puissance, une bonne perspective quant à la fragilité et à la pauvreté

Les pauvres des béatitudes[23] sont ceux qui se savent en manque. Et ils sont heureux car c’est le manque qui les met en route, qui les met en mouvement vers l’eau.

Esaïe 55 : « 1 Vous tous qui avez soif, venez aux eaux, Même celui qui n’a pas d’argent ! Venez, achetez et mangez, Venez, achetez du vin et du lait, sans argent, sans rien payer ! »

Ap. 21 : 6b : « A celui qui a soif je donnerai de la source de l’eau de la vie, gratuitement. »

A l’inverse :

Ap. 3 : « 17 Parce que tu dis : Je suis riche, je me suis enrichi, et je n’ai besoin de rien, et parce que tu ne sais pas que tu es malheureux, misérable, pauvre, aveugle et nu, 18 je te conseille d’acheter de moi de l’or éprouvé par le feu, afin que tu deviennes riche, et des vêtements blancs, afin que tu sois vêtu et que la honte de ta nudité ne paraisse pas, et un collyre pour oindre tes yeux, afin que tu voies. » (Extrait de la lettre à l’ange de Laodicée)

Luc 6 : « 24 Mais, malheur à vous les riches25 Malheur à vous qui êtes rassasiés… »

La soif est un signe de vie[24]. Quand on se pense en situation de complétude ou de plénitude, il n’y a pas de place pour l’inattendu, il n’y a pas de place pour Dieu.

Aujourd’hui, le manque n’est plus supporté ou mal comblé. Nous devenons avides et encombrons nos vies d’objets, d’images, de sons, de bruit, de nourritures, de boissons au point d’en être parfois dépendants, accros, « addicted ». Nous vivons alors dans l’excès de tout, dans le « toujours plus », dans le trop.

De plus, nos manques doivent être immédiatement satisfaits.

Nous n’apprenons plus à réorienter nos manques et donc nos désirs, nous n’apprenons plus le renoncement, nous n’apprenons plus à faire le deuil de nos pertes. Nous ne voulons plus avoir soif, nous ne voulons plus avoir faim, nous voulons être comblés voire « gâtés pourris »… ce qui nous mène parfois à l’amertume et la morosité. Nous ressemblons alors à ces enfants qui boudent parce qu’ils n’ont pas obtenu satisfaction.

Un changement de perspective est impératif car « Malheur à vous qui êtes rassasiés… » « Quand le manque manque  à quelqu’un, il ne se sent pas très bien[25]. »

Le manque transcendé peut nous amener plus loin et à être autrement. Il est source de vie.

Lors de son ministère terrestre, Jésus a côtoyé les pécheurs, les malades, les blessés de la vie, les pauvres, les enfants, les exclus car c’est auprès d’eux qu’il pouvait déployer son amour et sa puissance.

La fragilité est le lieu privilégié par lequel Dieu offre à l’homme son intervention. C’est par les échardes dans notre chair, dans les fragilités et les faiblesses de notre humanité, que Dieu manifeste sa puissance (2 Co. 12 : 9).

C’est ainsi que contrairement à toute logique humaine, la plus grande fécondité va naître là où il y avait stérilité. C’est ce que nous observons dans le Premier Testament notamment avec Abraham – père d’une multitude – et Sarah, ou avec Anne la mère du prophète Samuel. Dans le Nouveau Testament, Elisabeth, qui était stérile, va donner naissance au plus grand prophète qu’une femme ait porté : Jean-Baptiste (Luc 1 : 7 et Mt 11 : 11).

« Bienheureux les fêlés car ils laisseront passés la lumière. » (Michel Audiard[26])

Dieu n’aime pas nos fragilités en tant que telle. Ce qu’il aime, c’est notre attitude de pauvreté (pour reprendre la première béatitude), c’est-à-dire notre attitude de disponibilité, de dépendance vis-à-vis de lui. Alors seulement, l’être fragile que nous sommes peut devenir fécond et porter du fruit.

Pour qu’il y ait une place pour l’action de Dieu dans notre vie, il faut de la disponibilité devant l’inattendu ; ce qui suppose confiance en Dieu et espérance.

Comme il serait dommage de vivre ce que nous observons par ailleurs : l’exigence de garanties extravagantes auprès des hommes politiques et des compagnies assurances pour porter nos vies sans trembler.

Confiant en Dieu et en Ses ressources, affrontons la vie et notre condition humaine. Tolérons l’aléatoire. Ne comptons pas que tout ira bien mais grandissons toujours enracinés dans l’espérance et sachant prendre des risques. « Ce ne sont pas les risques qu’il faut supprimer – cela on ne le peut pas, les risques sont consubstantiels à la vie dans le temps –, m’ais c’est l’espérance qu’il faut retrouver. » (Chantal DELSOL)

Osons, soyons audacieux.

Et dans un monde de performance et de compétitivité dans lequel bon nombre d’hommes et de femmes sont courbés, inquiets, fatigués, sommés de se conformer au monde des « objets » virtuels, sommés de n’être qu’un individu monétisé et de réussir le bonheur consumériste dans cet âge d’or du monde numérique. N’oublions pas cette réalité, nous sommes humains… juste humain ! Et c’est immense !

Retenons cette « nouvelle équation mathématique » pour résoudre la problématique existentielle, une note mathématique finalement chargée d’espérance : Que nos relations soient « l’alliance de nos faiblesses, la multiplication de nos projets, la soustraction de nos problèmes et la somme de nos promesses » Cette équation-là est supérieure à tous les algorithmes qui déconstruisent l’homme, une équation qui renverse les projets démiurgiques de la toute-puissance.

[1] A notre époque, il y a une dérive compassionnelle qui fait de la victime une figure de l’innocence. Un seul a été victime et sans faute : le Christ. D’ailleurs, « il était blessé pour nos péchés, Brisé pour nos iniquités ; Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, Et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. » (Es. 53 : 5)

[2] Carlos PAYAN

[3] Même si, significativement, il existe un fantasme de parthénogenèse : « Elle a fait un bébé toute seule » chante Jean-Jacques Goldman

[4] Bernard Ugeux, Directeur de l’institut de Science et de Théologie des Religions de Toulouse

[5] Gontran Lejeune. En complément : « Une société est forte de la place qu’elle donne aux plus fragiles. Les personnes ayant un handicap humanisent la société, elles invitent à la relation. » (Association Simon de Cyrène)

[6] Titre d’un libre de Christian Charrière-Bournazel, ancien bâtonnier du barreau de Paris.

[7] Possibilité qu’une chose arrive ou n’arrive pas, éventualité.

[8] On en est même arrivé au concept de « guerre zéro mort » ! C’est un concept absurde même si la mort de soldats émeut à juste titre.

[9] A Dubaï, l’immense tour se conjugue avec une dette publique abyssale : plus de 100 milliards de dollars !

[10] Les richesses à partager ont des limites. « Ce qui est en cause, c’est la logique même de notre fonctionnement économique, dont le dynamisme repose sur l’expansion indéfinie des revenus et de la consommation. » (Cardinal Vingt-trois)

[11] Inspiré et partiellement repris de la page : http://incesteabusetviolence.blogspot.com/2011/01/la-toute-puissance-infantile.html

[12] Inspiré et partiellement repris de la page : http://pierresultan.blogs.nouvelobs.com/tag/toute-puissance%20infantile

Eduquer – du latin educere – signifie conduire hors de soi pour introduire à la réalité.

[13] Il a reconnu sa finitude ontologique.

[14] Inspiré et partiellement repris de la page : http://larevuereformee.net/articlerr/n225/les-racines-de-la-violence

[15] 2 Co. 12 : 9

[16] Inspiré et partiellement repris de la page : http://www.missionvieetfamille.com/index.php/la-relation-daide/desirer-aider

[17] L’Arche travaille étroitement avec des personnes ayant une déficience intellectuelle afin que chaque personne puisse découvrir et exercer pleinement son rôle dans la société.

[18] Celui ayant emporté par l’épée l’oreille d’un serviteur du souverain sacrificateur

[19] Entre autres : Ap. 5 : 6, 12 / Ap. 13 : 8

[20] Illustration : Hérode (Act. 12 : « 21 A un jour fixé, Hérode, revêtu de ses habits royaux, et assis sur son trône, les harangua publiquement. 22 Le peuple s’écria : Voix d’un dieu, et non d’un homme ! 23 Au même instant, un ange du Seigneur le frappa, parce qu’il n’avait pas donné gloire à Dieu. Et il expira, rongé des vers. »)

[21] Les deux derniers paragraphes sont inspirés et partiellement repris de la page : http://www.irenees.net/fr/fiches/analyse/fiche-analyse-73.html

[22] La puissance de Dieu est inséparable de ses autres attributs : notamment sa sagesse et son amour.

[23] Mt. 5 : 3 : « Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux ! »

[24] Être le sel de la terre, c’est donner soif, c’est susciter le désir et donc la vie.

[25] Jacques Lacan

[26] Dialoguiste, scénariste et réalisateur français de cinéma, également écrivain et chroniqueur de presse.