Notre monde sera-t-il celui
de la marchandisation de toute la vie ?
Le marché mondial de la reproduction est une question qui doit nous interpeller. La vie, même devient dans toutes ses dimensions, un objet de catalogue consumériste et de marchandisation.
Nous assistons dans notre monde contemporain, à l’émergence probable d’un marché de la vie, de fait à une intensification consumériste touchant à la chosification même de la fécondation. La vie devient alors un bien à consommer, une forme de capital boursier qui fera les joies des actionnaires.
Avec la fécondation in vitro comme le mentionnent fort bien d’autres lanceurs d’alerte, tout est potentiellement à vendre OU à louer : embryons, gamètes, utérus.
En quelques années notamment dans le monde occidental pays nordiques, anglo saxons, nous assistons à l’émergence de sites Internet proposant la vente de spermes sur catalogues virtuels, les clientes peuvent accéder aisément à ces sites marchands et combiner les caractéristiques des spermes afin de dénicher le potentiel géniteur présentant toutes les garanties génétiques d’un corps idéal et d’un potentiel intellectuel satisfaisant. Puis à partir de la détermination de critères d’achat, voire demain d’un label et d’étoiles attribuées à la future progéniture, de pouvoir effectuer leurs commandes en ligne.
Il n’est pas improbable que ces sites étalent des rayons de gamètes, d’embryons, de spermes. Puis sur ces linéaires de la marchandisation de la vie que soient proposés des écarts de prix selon la marque de la future progéniture, sperme de prix Nobel, sperme de tel ou tel star du show-biz ou du monde du sport. Des différentiels de prix entre garçons et filles, ou entre « géniteurs » selon leur QI, leur aspect physique et la couleur de leur peau, dénotent dès lors un marché potentiellement sauvage. Ce libéralisme a des relents sélectifs d’une société qui primerait la performance, la recherche de l’« enfant parfait », ou du moins indemne de nombreuses affections graves et ceci évoque toute une dimension eugéniste, l’enfant choisi, le sera en regard de critères qui touchent à sa performance éventuelle, l’enfant de facto est réduit à un objet de consommation et non à l’être aimé tel qu’il est.
Dans ce contexte de marché, la vie est devenue une forme de produit commercial. Nous assistons en fait à l’avènement et l’avenir d’une société Eugéniste dont un Père fantôme pourrait engendrer des dizaines de progénitures, des enfants qui plus tard seront en quête d’identité, d’origine mais ne pourront pas taire la souffrance que vivent partout dans le monde les orphelins qui ignorent d’où ils viennent !
Qui sera le grand perdant ?
Pour répondre à cette question, il s’agira incontestablement de l’enfant vulnérable, fragile, souffrant d’un handicap qui ne répondra pas aux normes d’une société qui entendra étalonner un niveau d’exigence consumériste… Ici je veux citer le médecin Laurent Alexandre qui appelle pourtant de ces vœux l’émergence d’un monde transhumaniste mais nous met en garde sur l’engrenage qui touche le monde social à venir…
«La Médecine dite prédictive va de plus en plus prévoir et prévenir. La tendance va s’accélérer. Mais le début de la prédiction, c’est quand même de le faire in utero, de sélectionner entre guillemets les bons bébés par rapport aux mauvais. Ça se fera pendant la grossesse comme ça se fait déjà pour le mongolisme. On voit bien qu’on a mis le doigt dans l’engrenage. En Suisse, comme en France ou en Belgique, la quasi-totalité des enfants trisomiques sont avortés, ce qui est stricto sensu de l’eugénisme et de l’eugénisme intellectuel »
C’est le philosophe François-Xavier Bellamy qui n’hésite pas à parler d’un « monde où la médecine ne servirait plus à réparer les corps, mais à les mettre au service de nos rêves. Ce n’est plus un acte médical : c’est une prestation technique. La différence est aussi grande, qu’entre greffer un bras à une personne amputée, et greffer un troisième bras sur un corps sain. »
Nous voulons en quelque sorte satisfaire une stérilité sociale et déplacer les barrières de la nature, en nous fondant sur le recours des avancées techniques de la science. Or s’adosser à cette dimension technique, pose inévitablement un problème au monde médical. Un monde médical qui passerait d’une médecine réparatrice et de soins à une médecine de prestations de services, une médecine qui résout des envies sociales. La question vertueuse qui est également une question d’éthique, que nous posons dans ces débats, est de savoir si c’est la mission de la médecine de satisfaire des appétences consuméristes ? Puis à force de contourner les limites mêmes de la nature, d’endiguer, de dépasser les frontières du corps, ne serons-nous pas confrontés à d’autres difficultés majeures et toxiques, fragilisant le socle social, la révolte d’enfants devenus adultes qui rejetteront le monde que nous leur avons créé.